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Revision as of 09:51, 20 July 2007
Georges Darien (pseudonyme de Georges Hippolyte Adrien), 6 avril 1862 - 19 août 1921, écrivain français qualifié d'anarchiste. Anarchiste sans le savoir, puis individualiste absolu, Georges Darien s’est opposé au régime parlementaire, au cléricalisme, au militarisme et au colonialisme. Il publie quelque 375 articles entre 1890 et 1918, collabore à une vingtaine de revues, dont L’Ennemi du peuple, et dirige deux périodiques, L’Escarmouche et La Revue de l’impôt unique.Contents
Biographie
Ayant perdu sa mère alors qu'il était en bas âge, Darien fut élevé par une belle-mère catholique intransigeante, ce qui motive peut-être son anticléricalisme viscéral à venir.
En 1881, à 19 ans, Adrien devance l’appel et rejoint le 2ème escadron du Train. Son indiscipline foncière le fait vite remarquer de ses supérieurs. Condamné en juin 1883 par un conseil de guerre pour insubordination, il écope de 33 mois de travaux forcés au bagne militaire de Gafsa. Son insoumission l'envoie dans un bataillon disciplinaire en Tunisie à « Biribi »[1]. De cette expérience il tirera son roman Biribi [2], dans lequel il dénonce les difficultés de sa condition au bagne et celles de ses compagnons. Son roman est achevé en 1888 et est publié deux ans plus tard par son éditeur Savine. Libéré, il rentre à Paris où il survit de petits boulots. Écrit après Biribi, mais publié en 1889, Bas les cœurs ! est son premier roman.
Menant une vie de bohème, travaillant ses manuscrits au café ou dans une chambre louée, Darien collabore à des journaux anarchistes comme Le Roquet ou L’En-dehors. Il quittera brutalementce dernier en se battant en duel avec Zo d'Axa son fondateur. De novembre 1893 à mars 1894, il rédige - seul - L’Escarmouche, un hebdomadaire polémique qu’il fait illustrer par des artistes comme Vuillard ou Toulouse-Lautrec.
Mais aucun de ses projets ne rencontre de véritable succès.
En dépit d'une seconde biographie récente (Georges Darien et l'Anarchisme littéraire de Valia Gréau), il faut reconnaître que l'on sait peu de choses sur sa vie, ce qui laisse libre cours aux fantasmes qui associent la vie de l'écrivain à celle du héros du Voleur, Randal. En effet jusque 1897, il disparaît, voyage en Belgique, en Allemagne et en Angleterre, Londres en particulier, d'où il revient avec le manuscrit de son roman, Le Voleur. En 1899, il y épouse une jeune Allemande, Caroline Abresch, choix à l’époque surprenant pour un Français, mais nullement pour lui qui déclare : « Je suis un Sans-patrie. Je n’ai pas de patrie. Je voudrais bien en avoir une, mais je n’en ai pas ». Déjà , en 1890, dans son roman Les Pharisiens, il dénonçait l’influence des nationalistes et des antisémites français.
En 1903 - 1904, Darien renoue avec l’anarchisme et travaille pour L’Ennemi du peuple. Il poursuit de sa vindicte l’armée, « l’idole, le veau de fer et d’acier devant laquelle la France se prosterne ». Il participe aussi au Congrès antimilitariste d’Amsterdam de juin-juillet 1904 où il multiplie les provocations, « affirmant impérativement que, seule, la guerre pouvait tuer le militarisme exécré, que le devoir était donc de créer au plus tôt un conflit, et qu’il comptait spécialement sur ses compatriotes pour créer, dès leur retour à Paris, un incident diplomatique, par exemple, en lacérant le drapeau de l’ambassade allemande [3] ». De retour à Paris, il monte une Association internationale antimilitariste des travailleurs. En 1904, il fait paraître en anglais un nouveau roman Gottfried Krumm : Made in England, l’histoire d’un immigré allemand en Grande-Bretagne, qui ne sera traduit en français seulement en 1987.
Un temps enthousiasmé par l’anarcho-syndicalisme, Darien fonde et dirige en 1910, l’Union syndicale des Artistes dramatiques avant de devenir le vulgarisateur français du fiscaliste étatsunien Henry George. En 1911, il fonde la revue de l'Impôt unique et se présente aux élections générales. Il se consacre ensuite au théâtre, sa pièce "Le Parvenu" est joué aux Bouffes du nord, puis "Chez les Zoaques" avec le tout jeune Sacha Guitry. Il mourra le 19 août 1921
Pamphlétaire
Admiré par Alfred Jarry, Alphonse Allais -qui lui dédiera, onze ans plus tard, son Conte de Noël- et plus tard par André Breton, Georges Darien devient un auteur prisé des milieux libertaires.
En plus de ses romans, Darien est le pamphlétaire le plus violent de son époque. Il collabore à plusieurs revues anarchistes, parmi lesquelles L'Escarmouche et L'Endehors, où il côtoie Zo d'Axa.
Tout en France révulse Darien. Il ne supporte pas le style de la IIIe République bourgeoise. Il en exècre la mentalité, s’irrite de la veulerie généralisée et triomphante de la société française.
Adversaire du colonialisme, il se gausse des prétendues justifications humanitaires :
- « La libération de certains peuples fut souvent un prétexte à l’invasion de certains pays ; mais rien qu’un prétexte. »
Antimarxiste, il juge la lutte des classe dépassée. Il s'étonne donc :
- « cette obstination de certaines gens à parler de conflits d’intérêts, d’avènement du prolétariat, d’abaissement de la bourgeoisie. Mais il y a longtemps qu’ils sont terminés, les conflits ; il y a beau jour qu’ils sont fondus l’un dans l’autre, le prolétariat et la bourgeoisie, et qu’ils marchent la main dans la main, malgré leurs dénégations ».
Et Darien de dénoncer « la formation d’une nouvelle classe moyenne, énorme mais idiote, dogmatique par respect et gouvernementale par discipline, à qui la misère même n’a pas donné la haine, mais la vénération jalouse, et qui ne veut pas détruire, mais prendre - pour conserver », autrement dit « un nouveau Tiers-État, qui ne tient à être quelque chose que pour avoir tout, coalition des intérêts mesquins, des appétits ignobles, des cultes déshonorants».
Sa vision de la société n'est pas moins lucide :
- « Obligatoire ! tout l’est à présent, rugit-il : instruction, service militaire, et demain, mariage. Et mieux que ça : la vaccination. La rage de l’uniformité, de l’égalité devant l’absurde, poussée jusqu’à l’empoisonnement physique ! Du pus qu’on vous inocule de force - et dont l’homme n’aurait nul besoin si la morale ne lui donnait pas de mépriser son corps ; - de la sanie infecte qu’on vous infuse dans le sang au risque de vous tuer (comptez-les, les cadavres d’enfants qu’assassine le coup de lancette !) du venin qu’on introduit dans vos veines afin de tuer vos instincts, d’empoisonner votre être ; afin de faire de vous, autant que possible, une particules passives qui constituent la platitude collective et morale. »
Darien considère que l'éducation est au service de l'ordre - immoral et hypocrite- et ne peut que légitimer la révolte et encourager l'effort que font certains "caractères" pour se soustraire à son emprise étouffante.
- « Education. La chasse aux instincts . On me reproche mes défauts ; on me fait honte de mes imperfections. Je ne dois pas être comme je suis mais comme il faut. Pourquoi faut-il ? .... On m'incite à suivre les bons exemples ; parce qu'il n'y a que les mauvais qui vous décident à agir. On m'apprend à ne pas tromper les autres; mais point à ne pas me laisser tromper . On m'inocule la raison - ils appellent ça comme ça- juste à la place du coeur. Mes sentiments violents sont criminels, ou au moins déplacés; on m'enseigne à les dissimuler. De ma confiance, on fait quelque chose qui mérite d'avoir un nom : la servilité; de mon orgueil quelque chose qui ne devrait pas en avoir : les respect humain. Le crâne déprimé par le casque d'airain de la saine philosophie , les pieds alourdis par les brodequins à semelles de plomb dont me chaussent les moralistes, je pourrai décemment, vers mon quatrième lustre me présenter à mes semblables. J'aurai du savoir vivre. Je regarderai passer ma vie derrière le carreau brouillé des conventions hypocrites, avec permission de la romantiser un peu , mais défense de la vivre. J'aurai peur. Car il n'y a qu'une seule chose que l'on m'apprenne ici , je le sais! On m'apprend à avoir peur.
- Pour que j'aie bien peur des autres et bien peur de moi, pour que je sois un lieu commun articulé par la résignation et un automate de la souffrance imbécile, il faut que mon être moral primitif, le moi que je suis né disparaisse. Il faut que mon caractère soit brisé, meurtri , enseveli. Si j'en ai besoin plus tard , de mon caractère - pour me défendre, si je suis riche et pour attaquer si je suis pauvre - il faudra que je l'exhume ...»
En écrivant tout le mal qu’il pensait de la société française de son temps, s’appliquant le principe qu’il faut « agir ce qu’on rêve » et affirmant que « le secret du bonheur c’est le courage », Georges Darien ne pouvait que déplaire à ses contemporains.
André Breton a caractérisé Darien comme, "Un cœur trop grand et trop bien battant pour ne pas heurter en tout sens les parois de sa cage." Il a décrit ses écrits comme "le plus rigoureux assaut que je sache contre l'hypocrisie, l'imposture, la sottise, la lâcheté".
Å’uvres
ROMANS :
- Bas les coeurs ! ([1889]) (Lire en ligne)
- Biribi (1890)
- Le Voleur (1897) (Lire en ligne)
- La Belle France (1898)
- L'Epaulette (1901) non publié
PAMPHLETS :
- Les Pharisiens
PIECES DE THÉATRE :
- L'ami de l'ordre (1898)
Citations
«C'est le fanatisme de la liberté, seul, qui peut avoir raison du fanatisme de la servitude et de la superstition.»
- La Belle France (1900)
«La Bourse est une institution, comme l'Eglise, comme la Caserne,... les charlatans qui y règnent sont d'abominables gredins, mais il est impossible d'en dire du mal tellement leurs dupes les dépassent en infamie.»
- Le Voleur (1897)
«Le patriotisme n'est pas seulement le dernier refuge des coquins; c'est aussi le premier piédestal des naïfs et le reposoir favori des imbéciles.»
- La Belle France (1900)
«Qu'est-ce que c'est que la civilisation? - C'est l'argent mis à la portée de ceux qui en possèdent.»
- Le Voleur (1897)
«La Justice est représentée, au fronton des édifices où l'on en débite, par une femme masquée d'un bandeau, à la longue robe, qui tient dans sa main droite un glaive et dans sa main gauche une balance. Cette femme vous la connaissez. La Superstition religieuse protectrice du sabre soudard et de la balance du mercanti, voilà le symbole de la Justice.»
«Je mange, je bois ; et je laisse l'assiette sur le buffet et la bouteille sur la table. Il y a des voleurs qui remettent tout en ordre, dans les maisons qu'ils visitent. Moi, jamais. Je fais un sale métier, c'est vrai ; mais j'ai une excuse : je le fais salement.»
- Le Voleur (1897)
« Je n'aime pas les pauvres. Leur existence, qu'ils acceptent, qu'ils chérissent, me déplaît ; leur résignation me dégoûte. A tel point que c'est, je crois, l'antipathie, la répugnance qu'ils m'inspirent, qui m'a fait devenir révolutionnaire. Je voudrais voir l'abolition de la souffrance humaine afin de n'être plus obligé de contempler le repoussant spectacle qu'elle présente.
Je ferais beaucoup pour cela. Je ne sais pas si j'irais jusqu'à sacrifier ma peau ; mais je sacrifierais sans hésitation celles d'un grand nombre de mes contemporains. Qu'on ne se récrie pas. La férocité est beaucoup plus rare que le dévouement.»
- La Belle France (1900)
Voir aussi
- Bibliothèque du Docteur Faustroll
- Le Voleur, film de Louis Malle
- Biribi, film de Daniel Moosman (Fiche IMDB : http://french.imdb.com/title/tt0207340/)
Liens
- Pages consacrées à Georges Darien :
http://raforum.apinc.org/article.php3?id_article=979
http://www.excentriques.com/darien/index.html (contient une bibliographie substantielle)
Darien, Georges Darien, Georges