Difference between revisions of "Capitalisme"

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(Histoire du capitalisme)
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Les premières formes de capitalisme au sens moderne sont graduellement apparues en [[Occident]] à la suite du [[Moyen Âge]], d'abord dans les cités marchandes d'[[Italie]] et d'Europe du Nord ([[Hanse|Ligue de la Hanse]], [[Pays-Bas]]). Le système prend son essor avec la [[Révolution industrielle]].
 
Les premières formes de capitalisme au sens moderne sont graduellement apparues en [[Occident]] à la suite du [[Moyen Âge]], d'abord dans les cités marchandes d'[[Italie]] et d'Europe du Nord ([[Hanse|Ligue de la Hanse]], [[Pays-Bas]]). Le système prend son essor avec la [[Révolution industrielle]].
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== Les origines d’une civilisation ==
  
!!!'''à développer'''!!!
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=== Le capitalisme médiéval ===
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[[Image:Turner, J. M. W. - The Grand Canal - Venice.jpg|300px|right|thumb|''Le Grand Canal à [[Venise]]'', par [[Joseph Mallord William Turner|Turner]] (v.&nbsp;[[1835]])]]
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Pour Fernand Braudel (''la Dynamique du capitalisme'', [[1985]]), le capitalisme est une « civilisation » aux racines anciennes, ayant déjà connu des heures prestigieuses, telles celles des grandes cités-États marchandes : [[Venise]], [[Anvers]], [[Gênes]], [[Amsterdam]]... Werner Sombart date quant à lui l’émergence de l’esprit bourgeois et de l’esprit d’entreprise du {{XIVe siècle}}, à [[Florence]].
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==== Commerce médiéval ====
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Comme le montre Braudel, on trouve dès le Moyen Âge des premières manifestations du capitalisme commercial en [[Italie]] et aux [[Pays-Bas]]. Le commerce maritime avec l’Orient, suite aux [[croisade]]s, a enrichi les cités italiennes, tandis que les Pays-Bas, à l’embouchure du [[Rhin]], font le lien entre l’Italie et l’[[Europe du Nord]]. Dans les grandes cités, les marchands de [[drap]]s et de [[soierie]]s adoptent des méthodes de gestion capitalistes. Ils effectuent des ventes en gros, établissent des comptoirs et vendent leurs produits dans l’ensemble des grandes foires européennes. Ils se fournissent en matières premières aussi bien en Europe qu’au Levant. Dans cette époque troublée du Moyen Âge, ils règlent leurs paiements par [[lettre de change|lettres de changes]], moins dangereuses que le transport de métaux précieux. C'est donc logiquement que se développent, en parallèle du capitalisme commercial, les premières activités [[banque|bancaires]] du capitalisme financier : [[Types de dépôts bancaires|dépôts]], [[Emprunt|prêts]] sur gage, lettre de change, [[assurance]] pour les navires.
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[[Image:Commerce medieval de Venise.JPG |400px|left|thumb|[[Venise]], centre d’une « économie-monde » à la fin du [[Moyen Âge]]]]
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Ces capitalistes s’enrichissent si bien qu’il étendent leur emprise économique sur l’ensemble de l’[[Occident chrétien]], créant ainsi ce que Braudel appelle une « économie-monde ». Dans son analyse, Braudel distingue l’« économie de marché » du capitalisme, ce dernier constituant une sorte de « contre-marché ». Selon lui, l’économie de marché (c'est à dire l’économie locale à cette époque) est dominée par les règles et les échanges loyaux, parce que soumise à la concurrence et à une relative transparence, le capitalisme tente de la fuir dans le commerce lointain afin de s’affranchir des règles et de développer des échanges inégaux comme nouvelles sources d’enrichissement.
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On peut remarquer que dès l’[[Antiquité]], des systèmes identiques avaient étés mis en place par les [[Phénicie]]ns, les [[Économie de la Grèce antique|Grecs]], les [[Carthage|Carthaginois]], les [[Rome antique|Romains]]. Ces systèmes étaient toutefois davantage marqués par l’impéralisme et l’esclavagisme que par le capitalisme. À travers le monde, d’autres formes de capitalisme commercial se développent de manière précoce à l’époque féodale (sous la [[dynastie Ming]] en [[Chine]] par exemple).
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==== Vie urbaine ====
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Dans les grandes villes spécialisées d’Europe, l’[[artisanat]], tourné essentiellement vers l’[[exportation]], est dominé par les grands négociants et drapiers, si bien que les rapports économiques entre artisans et marchands s’apparentent à du salariat. Les négociants contrôlent à la fois l’apport de matières premières en amont et la vente des produits finis en aval.
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La population urbaine se différencie déjà en plusieurs classes économiques distinctes, riches pour certaines, pauvres pour d’autres. La ville de Florence en est le parfait exemple : on y trouve très tôt des banquiers qui développent des succursales à travers l’Europe et asservissent l’industrie à leur recherche du profit. Parmi eux de grandes familles, telle celle des [[Médicis]], créent les premiers rapports « privilégiés » entre le monde des affaires et le monde politique
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==== Apparition des [[bourse]]s à la fin du Moyen Âge ====
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Selon Fernand Braudel, l’apparition des premières bourses remonte au {{XIVe}} siècle dans ces cités italiennes où le commerce est permanent (contrairement aux [[foire médiévale|foires médiévales]] se déroulant sur des périodes restreintes) et où se concentrent l’essentiel des activités financières.
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C’est toutefois la création en [[1409]] de la bourse de [[Bruges]], un hotel dédié à l’échange de marchandises, lettres de change et effets de commerce, qui marque un tournant dans le développement des activités financières. La place s’impose rapidement grâce à l’ouverture de son port, à la renommé de ses foires commerciales et au climat de tolérance et de liberté dont profitent marchands et investisseurs de toutes origines. C’est ces mêmes atouts qui permettront ensuite à la place d’[[Anvers]] (créée en [[1460]]) de se développer au début de la Renaissance. On pouvait lire à son fronton : ''Ad usum mercatorum cujusque gentis ac linguae'' (« À l’usage des marchands de tous les pays et de toutes les langues »).
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=== [[Renaissance (période historique)|Renaissance]] et [[Réforme]] ===
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==== L’éthique protestante ====
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Bien que partageant avec Braudel cette vue dans le temps long, [[Max Weber]] (dans ''[[Émergence du capitalisme selon Max Weber|l’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme]]'' en [[1905]]) considère que l’origine du capitalisme est plus récente. Sur la base d’un constat sociologique, il lie le capitalisme à la mentalité protestante et le voit donc comme le résultat d’une évolution lente issue de la Réforme. On remarque d’ailleurs que des formes sporadiques de capitalisme financier avaient été développées depuis bien longtemps par les [[Lombard]]s et les [[juif]]s, non soumis aux contraintes religieuses du [[catholicisme]]. C'est d’ailleurs à ces derniers que [[Werner Sombart]] (''le Capitalisme moderne'') attribuera la genèse du capitalisme moderne.
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Selon Weber, le capitalisme occidental correspond à l’apparition d’un esprit nouveau, d’une révolution culturelle. Weber emploi alors le terme ''capitalisme moderne'' « pour caractériser la recherche rationnelle et systématique du profit par l’exercice d’une profession. » Plus que la richesse, dont le désir n’est pas nouveau, c’est l’esprit d’accumulation qui s’impose comme vecteur d’ascension sociale.
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Cette nouvelle éthique se diffuse grâce à l’émergence de nouvelles valeurs : l’épargne, la discipline, la conscience professionnelle. Cette dernière permet par exemple l’apparition d’une élite [[ouvrier|ouvrière]] qui, au-delà du salaire, se soucie de la qualité de son œuvre. En parallèle émerge un personnage emblématique, l’entrepreneur, qui recherche une réussite professionnelle profitable à la société dans son ensemble.
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Le contexte favorable à cette évolution des valeurs est celui de la Réforme. Pour Max Weber, l’éthique du métier vient du [[luthéranisme]] qui encourage chaque croyant à suivre sa vocation, et qui fait de la réussite professionnelle un signe d’élection divine. En effet, les croyants ordinaires, sachant qu’ils n’ont pas la maîtrise de leur salut (logique de la [[prédestination]]), tentent ardemment de trouver dans leur vie privée des signes de cette prédestination, telle la réussite professionnelle, afin d’atténuer leur angoisse vis-à-vis de la mort et du jugement qui la suit. Par ailleurs le rapport direct à dieu prôné par la religion protestante accélère le processus de « désenchantement du monde » (en supprimant nombre de pratiques religieuses par exemple), ce qui concourt à l’émergence de la [[rationalité]]. Déjà, [[Karl Marx]] avait remarqué un processus de démystification en écrivant :
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« La bourgeoisie (...) a noyé les frissons sacrés de l’extase religieuse, de l’enthousiasme chevaleresque, de la sentimentalité à quatre sous dans les eaux glacés du calcul égoïste. »<br />
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(''Manifeste du Parti Communiste'', [[1848]]).
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Cette rationalisation permet l’apparition de nouveaux dogmes qui fondent l’esprit du capitalisme :
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« La répugnance au travail est le symptôme de l’absence de [[grâce]]. »,<br />
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« Le temps est précieux, infiniment car chaque heure perdue est soustraite au travail qui concourt à la gloire de Dieu. »<br />
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(Max Weber, ''l’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme'').
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Max Weber illustre ses propos d’un texte de [[Benjamin Franklin]], révélateur selon lui des nouvelles mentalités :
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« Celui qui perd cinq shillings perd non seulement cette somme, mais aussi tout ce qu’il aurait pu gagner en l’utilisant dans les affaires, ce qui constituera une somme d’argent considérable, au fur et à mesure que l’homme jeune prendra de l’âge. »<br />
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''Advice to a young tradesman'', [[1748]]
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Les thèses de Weber ont été très critiquées. Le lien entre le dogme de la prédestination et l’esprit du capitalisme est très paradoxal, vu qu'il revient pour un fidèle a rechercher des signes d’élection tandis que le dogme affirme la prédestination comme de toute manière impénétrable. Des historiens infirment quant à eux la concomitance des deux phénomènes (Braudel par exemple, qui date le capitalisme d’une période antérieure à la Réforme).
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==== L’esprit d’innovation ====
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[[Image:Gutenberg Bible.jpg|thumb|right|250px|La [[Bible]] de [[Johannes Gutenberg|Gutenberg]] ([[1450]]–[[1454]]), l’une des premières productions standardisées de grande série]]
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D'après [[Lewis Mumford]] (''Techniques et civilisations'', [[1950]]), le [[Bertrand Gille (historien)|système technique]] de la Renaissance annonce le futur économique du monde occidental.
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Le {{XVe siècle}} vit par exemple la mise au point de l’imprimerie à caractères mobiles (la « [[typographie]] ») par [[Johannes Gutenberg|Gutenberg]]. Soucieux de préserver autant qu'il se peut les secrets de ses recherches, contraints à des emprunts monétaires importants, il est en quelque sorte l’archétype des futurs capitalistes. Son objectif est de répondre à une demande insatisfaite : la demande de culture des esprits de moins en moins [[analphabétisme|analphabètes]] de la Renaissance. Au besoin de publications à grande échelle de livres majeurs va rapidement suivre la demande d’une production plus diversifiée. La diffusion de [[Bible]]s à usage personnel contribue à l’essor de la Réforme, tandis que celle-ci accroît en retour la demande. En partie permise par les progrès de la [[métallurgie]], la typographie lui fournit en retour des débouchés. Intérêt pour la [[mécanique]], prémices de « [[Normes et standards industriels|standardisation]] », productions de grandes séries, soucis de la « [[productivité]] » et esprit d’innovation... S’il faudra bien attendre des avancées similaires dans l’[[industrie textile]] pour connaître le décollage [[industrie]]l, l’imprimerie montre bien que le terreau du capitalisme est plus ancien. Au sujet de l’imprimerie, Max Weber fait remarquer qu'elle existait depuis bien longtemps en Chine et sûrement en [[Inde]], mais comme de nombreuses techniques, héritées parfois de l’Antiquité (la force de la vapeur était par exemple connue dans l’Égypte pharaonique), elle a dû attendre de pouvoir s'insérer dans un ensemble de techniques cohérentes et complémentaires pour pouvoir s’imposer. Elle ne le fit d’ailleurs pas sans rencontrer d’opposition, notamment de la part des [[copiste]]s médiévaux.
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==== Vers un nouveau système technique====
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Voir article détaillé [[Système technique|système technique]]
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Le nouveau '''système technique''' qui se met en place à la [[Renaissance (période historique)|Renaissance]] permet l’émergence de certains principes du capitalisme moderne comme l’amélioration de la productivité, l’économie de main d’œuvre, l’augmentation de la production en volume et sa diversification ou encore l’investissement. Il s’appuie sur quelques [[innovation]]s de rupture comme l’[[imprimerie]] ou le [[Bielle (mécanique)|système bielle-manivelle]], la montée en puissance des grands secteurs industriels ([[métallurgie]], [[Mine (gisement)|exploitation minière]]) et l’utilisation courante d’une source d’énergie (hydraulique). Ce système, qui persistera jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, entraînera l’adoption d’un système social correspondant pour être au final le terreau d’un capitalisme naissant et le tombeau du régime féodal qui n’aura pas su s’inscrire dans cette mutation en profondeur.
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==== Le [[mercantilisme]] ====
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À partir du {{XVIe siècle}}, la pensée économique n’est plus dominée par les [[théologie]]ns, mais par des penseurs laïcs qui se soucient en premier lieu de la puissance de l’État : les mercantilistes. Afin d’assurer l’expansion de la richesse du Prince, les valeurs religieuses sont oubliées. Peu importe que l’[[Usure (finance)|usure]] soit un pêcher ou non, les gouvernants ne se soucient plus que telle ou telle politique commerciale ne soit pas chrétienne : seule compte la [[Raison d’État]]. Cette pensée n’est pas celle du capitalisme, vu qu’elle ne se soucie que de l’importance de la puissance de l’État et non du développement de la richesse privée. Toutefois, d’abord parce qu’elle contribue à éliminer les valeurs religieuses, ensuite parce qu’elle peut trouver intérêt au développement des affaires privées, elle prépare les évolutions futures. Souvent la création de monopoles par l’État constituait un compromis entre l’enrichissement des marchands et la mainmise de la puissance publique sur les activités les plus lucratives. Ce fut par exemple le cas des différentes [[Compagnie des Indes|Compagnies de Indes]].
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==== Évolutions juridiques et monétaires ====
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[[Image:Vereinigte_Ostindische_Compagnie_bond.jpg|200px|left|thumb|Une « [[obligation (finance)|obligation]] » de la [[Compagnie néerlandaise des Indes orientales|Compagnie hollandaise des Indes orientales]], émise en [[1623]]]]
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Au {{XVIIe siècle}}, la [[Hollande]] acquiert d’importants [[comptoir]]s en Inde et développe le commerce des [[épice]]s, du [[poivre]] en particulier ; elle s’est établi au [[Japon]] et commerce avec la Chine. Elle devient le nouveau centre de l’« économie-monde » selon Braudel. En [[1602]], elle fonde la première [[Compagnie néerlandaise des Indes orientales|Compagnie des Indes Orientales]] : c’est la première grande « [[société par actions]] ». Ses [[dividende]]s s’élevaient souvent à 15, voir 25&nbsp;%. De 3100 [[Florin néerlandais|florins]], les actions montèrent à 17&nbsp;000 florins à la fin du siècle. Elles étaient soumises à d’incessantes [[spéculation]]s, alimentées par les rumeurs les plus infondées, voire des campagnes de désinformation organisées. La Compagnie émet aussi des [[obligation (finance)|obligation]]s. La [[Compagnie anglaise des Indes orientales]] prend le relais et le modèle inspire la création de compagnies dans l’industrie [[métallurgie|métallurgique]], [[textile]], [[papier]]...
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[[Image:Hendrick Cornelisz. Vroom 001.jpg|thumb|right|300px|''Départ des voiliers de la [[Compagnie néerlandaise des Indes orientales|Compagnie des Indes orientales]]'', par [[Hendrick Cornelisz]] (v.&nbsp;[[1630]]–[[1640]])]]
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En parallèle, l’afflux d’[[or]] depuis les colonies d’[[Amérique]] permet à partir du {{XVIe siècle}} une stimulation des échanges, un perfectionnement des méthodes de paiement et des techniques monétaires. Les premières [[monnaie divisionnaire|monnaies divisionnaires]] sont frappées, les [[monnaie fiduciaire|monnaies fiduciaires]] connaissent une importante expansion, les premiers [[billet de banque|billets]] apparaissent. Dans le reste du monde, les échanges restent limités par l’usage de « monnaies métalliques dans l’enfance ».
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La Hollande connaît aussi la première bulle spéculative de l’histoire. Dans les années 1630 le prix des [[tulipe]]s connaît une forte envolée, l’oignon atteignant parfois le prix d’une maison bourgeoise. Lorsque celui-ci devînt manifestement irrationnel le premier krach de l’histoire se produisit. (voir [[Tulipomanie]])
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=== L’émergence du capitalisme ===
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[[Image:Rembrandt Harmensz. van Rijn 092.jpg|thumb|right|280px|''Le Syndic des drapiers'', par [[Rembrandt]] ([[1662]]). Œuvre de commande, elle symbolise la réussite de la [[bourgeoisie]] ainsi que la puissance d’[[Amsterdam]]]]
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Toutefois, l’émergence du capitalisme est plus souvent associée aux prémices de la [[révolution industrielle]], et en particulier au {{XVIIIe siècle}}. Les formes de [[propriété privée]] des moyens de production et de [[salariat]] se développent durant cette période.
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==== Évolution des rapports sociaux ====
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Dans le domaine artisanal, le [[capitalisme]] connaît des formes antérieures à l’usine ou à la manufacture. L’[[agriculture]] induit des périodes de faible activité (la morte saison surtout) et les [[manufacture|manufacturiers]] des villes s’intéressent rapidement à cette main d’œuvre régulièrement oisive. Le [[travail]] à domicile, ou ''« domestic system »'', va se développer. Il permet aux artisans et manufacturiers de sous-traiter une partie de leur production aux familles paysannes. Dans le cadre plus spécifique du ''« putting-out system »'', les entrepreneurs fournissent aux travailleurs ruraux (et toujours à domicile) des matières premières, voire des outils, puis viennent récupérer en échange d’un salaire le produit transformé, qui sera parfois achevé dans les ateliers urbains. Ce système a, par exemple, un intérêt majeur dans le cadre de la production textile. Si on ne peut qualifier de telles méthodes de capitalistes, elles sont bien annonciatrices des futurs rapports sociaux entre employeurs et salariés.
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==== Signes de déclin de l’artisanat ====
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[[Image:Spinning_jenny.jpg|thumb|left|220px|La ''« spinning-jenny »'' de [[James Hargreaves]], inventée en [[1765]], décuplait la productivité du fileur ; 20&nbsp;000 furent vendues avant [[1790]]]]
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Les [[innovation]]s des [[Début de la révolution industrielle|débuts de la révolution industrielle]] restent accessibles aux petits artisans (cf. image de la ''« spinning-jenny »'' ci-contre) et ne requièrent pas encore la concentration du capitalisme industriel. On assiste pourtant à de premières grandes concentrations sporadiques, sans lien avec le machinisme mais liées à des productions particulières, comme par exemple l’impression sur toile. Cette dernière nécessite des terrains étendus afin de blanchir les toiles, des pièces immenses où les sécher. Elle requiert un outillage diversifié et complexe, et entraîne des [[stock]]s importants de toiles et de colorants. Enfin, elle nécessite le regroupement d’ouvriers spécialistes dans des tâches distinctes. Finalement, de nombreuses formes de productions, pas encore mécanisées, entraînent les premières grandes concentrations de capitaux et de la main-d’œuvre.
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La question de l’accessibilité du capital aux plus humbles est essentielle dans l’analyse marxiste. En effet, Marx distingue deux formes différentes de propriété privée : celle du travailleur qui possède les moyens de la production qu’il met en œuvre et celle de la bourgeoisie qui emploie la force de travail des prolétaires. La première forme historique correspond au développement de l’artisanat et de la petite agriculture, elle permet le développement des qualifications. Puis la seconde forme, liée à l’appropriation des moyens de production (voir l’''Enclosure Act'' par exemple) par la bourgeoisie (ou la noblesse), permet l’apparition de la grande industrie, des grandes propriétés agricoles, du salariat et donc de l’ensemble des mécanismes qui fondent le mode de production capitaliste.
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==== Appropriation des terres ====
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[[Image:Enclosure.jpg|thumb|right|200px|thumb|Un acte d’enclosure datant de [[1793]]]]
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Dans le domaine agricole, le système féodal perdure longtemps (le [[servage]] n’est aboli qu’en [[1861]] en [[Russie]]). En [[1727]], l’''[[Mouvement des enclosures|Enclosure Act]]'' permet aux ''lords'' [[Angleterre|anglais]] de s’approprier et de clôturer les champs. Auparavant, la propriété revenait aux communes, et les champs étaient exploités par l’ensemble des paysans locaux qui profitaient ensemble des récoltes. L’imposition des droits de propriété sur les champs va créer une distinction nette entre le propriétaire et le [[salarié]] (les anciens petits exploitants devenant les salariés des ''landlords''). La [[France]] connaît dans ce domaine un phénomène différent au début du {{XIXe siècle}} : le [[Code Napoléon]], qui disperse les terres entre les héritiers au moment du décès, freine le développement des grandes propriétés du capitalisme agricole.
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En pleine [[transition démographique]], cette appropriation est le fait d’un intérêt nouveau pour le monde agraire de la part des élites anglaises, qui souhaitent développer une [[agriculture]] à haut rendement, et donc lucrative, sur le modèle de la [[Hollande]] et des [[Flandres]]. Cette appropriation entraînera immédiatement une activité et des investissements importants, du fait même de l’installation des clôtures. Sur le modèle des îles britanniques, la propriété privée des terres s’étend à travers l’Europe et les Amériques, non sans rencontrer des oppositions, notamment morales :
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« Le premier qui ayant enclos un terrain s’avisa de dire : ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile. Que de crimes, de guerres, de meurtres, que de misères et d’horreurs n’eût point épargnés au genre humain celui qui, arrachant les pieux ou comblant le fossé, eût crié à ses semblables : « Gardez-vous d’écouter cet imposteur ; vous êtes perdus si vous oubliez que les fruits sont à tous, et que la terre n’est à personne ! » »<br />
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[[Jean-Jacques Rousseau]], ''Discours sur l’origine de l’inégalité'', [[1755]]
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La légitimité historique du capitalisme agraire se trouve essentiellement dans son effet direct : la [[Révolution agricole]]. Comme l’a montré [[Max Weber]], l’introduction de l’idée de profit individuel a permis l’émergence du [[rationalisme]] dans la production, source principale de la [[productivité]] :
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« Lorsque les fruits sont à tous et que la terre n’est à personne, la terre ne produit que des bruyères et des forêts. »<br />
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[[Jean-Baptiste Say]]
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Les progrès de l’agriculture capitaliste ont étés nécessaires pour alimenter une population dont la [[croissance exponentielle]] (elle passe en [[Grande-Bretagne]] de 6 à 18&nbsp;millions entre [[1750]] et [[1850]]) faisait craindre aux plus pessimistes ([[Thomas Malthus]] en particulier) une fin désastreuse.
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=== L’avènement politique du capitalisme ===
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Selon Braudel, le capitalisme ne peut s’établir profondément que là où les lois le lui permettent et assurent son épanouissement :
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« Il y a des conditions sociales à la poussée et à la réussite du capitalisme. Celui-ci exige une certaine tranquillité de l’ordre social, ainsi qu'une certaine neutralité, ou faiblesse, ou complaisance de l’État. »<br />
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''La Dynamique du Capitalisme''
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La constitution des économies capitalistes telles que nous les connaissons a donc supposé d’importants changements législatifs instaurant la propriété privée du capital et un marché du travail. Pour Karl Marx, ces changements ne sont que la manifestation de la prise de pouvoir au sein de l’État de la bourgeoisie, une des étapes essentielles de la [[lutte des classes]].
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==== Propriété privée des moyens de production ====
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En [[Grande-Bretagne]], le vote de l’''Enclosure Act'' marque l’avènement de la propriété privée du capital, il est suivi au {{XIXe siècle}} de la libéralisation de l’actionnariat. En [[1825]], le ''Bubble Act'', qui limitait la taille des entreprises, est abrogé. En [[1856]], la création de [[société anonyme|sociétés anonymes]] est libérée de toute contrainte.
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[[Image:DDHCpropriete.jpg|thumb|right|300px|L’article XVII de la ''[[Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789|Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen]]'']]
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En [[France]], suite aux mouvements révolutionnaires de la [[Paris|capitale]], les châteaux des campagnes sont assaillis à la fin juillet [[1789]] par les paysans qui contestent la propriété seigneuriale. Dans la [[nuit du 4 août]] 1789, les privilèges de la noblesse sont abolis et la propriété foncière est dès lors ouverte à la bourgeoisie, tandis que la disparition de nombreux impôts d’[[Ancien Régime]] permet de (re)lancer l’investissement. Le 26 août, la propriété privée est, « sous les auspices de l’Être suprême », reconnu dans la ''[[Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789|Déclaration des droits de l’homme et du citoyen]]'' comme un droit inaliénable.
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Aux [[États-Unis d’Amérique|États-Unis]], depuis la [[colonisation]], la propriété privée des terres a été la règle. Toutefois, la législation américaine a pu se montrer très favorable envers les moins riches et a su, grâce à l’immensité du territoire, faire de la propriété privée de la terre une notion fondamentale défendue par les plus humbles (non [[esclave]]s). Une loi de [[1862]] accorde en effet la propriété privée de 160&nbsp;arpents aux pionniers. Le ''[[Homestead Act]]'', en offrant un jardin à cultiver aux Européens démunis, stimule les flux migratoires vers les États-Unis.
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==== Marché du travail ====
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En Angleterre, les économistes classiques de la fin du {{XVIIIe}} et du début {{XIXe}} siècle vont concentrer leurs critiques sur les lois établies afin de permettre l’émergence de lois favorisant le [[marché]]. Héritées du {{XVIIe}} siècle, les ''poor laws'' anglaises offraient via les paroisses une assistance aux indigents en leur attribuant un travail dans des ''workhouses'', voir leur faisaient la charité de quelques denrées nécessaires à leur survie. Les grands classiques de l’économie ([[Adam Smith]], [[Thomas Malthus]] et [[David Ricardo]]) s’acharnent contre ce système qui empêcherait la mobilité des travailleurs. En [[1834]], la quasi-abrogation de ces lois contraint les pauvres à se rendre en ville afin d’éviter la famine, en trouvant par la vente de leur force de travail les ressources nécessaires à leur survie.
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En France, la constitution du marché du travail et la liberté des capitaux est permise en juin [[1791]] par la [[Loi Le Chapelier]], qui interdit toute liberté d’association : [[corporation]]s, associations et coalitions (c'est-à-dire [[syndicat]]s et [[grève]]s).
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Aux États-Unis, c'est le 13{{e}} amendement de la [[Constitution]] qui abolit l’esclavage le 18 décembre [[1865]], qui conclut la libéralisation du travail dans l’ensemble des secteurs d’activité.
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== Histoire du capitalisme moderne ==
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=== Introduction ===
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[[Image:Steam_engine_Zeche_Muttental.jpg |300px|left|thumb|La [[machine à vapeur]], exemple-type de la nécessaire concentration des capitaux]]
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Alors que la législation favorise la bourgeoisie, la révolution industrielle s’emballe au début du {{XIXe}} siècle. Les productions de plus en plus importantes en volume, et les produits de plus en plus complexes, nécessitent des investissements de plus en plus grands. C’est le cas dans l’industrie naissante, mais aussi dans l’agriculture où de grosses machines (les [[moissonneuse-batteuse|moissonneuses batteuses]] dès [[1834]]) font leur apparition. L’écart croissant entre le coût de ces machines et les salaires, ainsi que la limitation des biens communs et la dureté du travail, contribuent à segmenter la société en deux groupes bien distincts : les propriétaires du capital, et ceux que Marx appellera plus tard les « [[prolétaire]]s ». Les usines se développent, les paysans sont emmenés de leurs campagnes pour rejoindre les villes et vendre leur force de travail dans l’industrie.
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En un siècle, le triomphe du capitalisme industriel a transformé une société traditionnelle, rurale et agricole, en une société urbaine et industrielle. L’exode rural, combiné à l’explosion [[démographie|démographique]], a dépeuplé les [[campagne]]s et les ouvriers sont venus s’entasser dans les [[banlieue]]s des grandes cités industrielles. Cette concentration humaine, associée à la misère ouvrière et au [[chômage]] de masse (l’« armée de réserve » décrite par Marx), contribue à l’émergence de la conscience de classe au sein du prolétariat. Auparavant une misère agricole au moins égale, peut-être souvent pire n’entraînait pas de tels problèmes sociaux du fait de l’absence de concentration. Les paysages sont profondément transformés, les « villes champignons » se multiplient, les grands centres économiques sont rebâtis (Paris par [[Georges Eugène Haussmann|Haussmann]]), les régions [[charbon]]nières sont défigurées...
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Toujours au plan social, le « capitalisme managérial » ([[Alfred Chandler]], ''la Main visible des managers'') émergeant au tournant des deux siècles provoque de nouvelles distinctions entre « propriétaires », « entrepreneurs », « ouvriers » et « gestionnaires ». Dès lors, les profits des propriétaires sont de moins en moins légitimes et s’apparentent à une rente, car il n’est plus seulement question de la rémunération de leur talent d’entrepreneur. Toutefois, les riches familles de rentiers sont dépassées par les entrepreneurs de génie dés la fin du {{XIXe}} ([[Siemens]], [[Edison]], [[Ford]]... et plus récemment [[Bill Gates]]), comme le fut en son temps la noblesse.
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Après la [[Seconde Guerre mondiale]], une période de forte [[croissance économique]], les « [[Trente Glorieuses]] » ([[Jean Fourastié]]) en France, amène de nombreuses économies du Nord à la [[société de consommation]], tandis que s’impose une [[classe moyenne]] et que les niveaux de vie ont tendance à s’uniformiser.
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Le dernier quart du {{XXe siècle}} est marqué par l’ouverture croissante des [[marché financier|marchés financiers]] et par le nivellement des niveaux de vie. Les petits actionnaires se multiplient, l’[[actionnariat salarié]] se développe, ainsi que les [[fond de pension|fonds de pensions]] dans les pays anglo-saxons. Il semble que dans ses dernières évolutions, le capitalisme veuille se montrer comme bénéficiant à un plus grand nombre qu'auparavant. Mais surtout, la fin du {{XXe}} siècle est marquée par la chute du système économique alternatif exercé dans les pays du [[bloc communiste]] (dont certains estiment qu'ils constituaient en vérité qu'une [[Capitalisme d'État|forme étatique du capitalisme]]) ayant désormais des [[économie de transition|économies de transition]]. Le capitalisme est alors dominant sous sa forme libérale, mais des secteurs avec des modes de fonctionnement différents coexistent ([[économie sociale]], [[économie publique]], [[profession libérale|professions libérales]]), celles-ci représentent 50 à 60&nbsp;% du [[PIB]] dans les [[pays développé|pays développés]], ce qui rend relatif le poids de l’économie capitaliste dans nos sociétés contemporaines.
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=== Institution de l’économie de marché ===
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Selon [[Karl Polanyi]] (''La Grande Transformation, Aux origines de notre temps'', 1944), l’Occident a connu depuis la fin du {{XVe siècle}}, une généralisation des relations de marché. Il note toutefois que la prépondérance de celles-ci sur les relations traditionnelles, basées par exemple sur le don, le servage, le travail collectif … ne devient effective qu’au {{XIXe siècle}}. C’est en effet durant cette période que se met en place en Occident une civilisation dont l’économie repose sur le marché autorégulateur, l’État libéral, l’[[étalon-or]] comme [[système monétaire international]], et l’équilibre des puissances depuis la fin des guerres [[napoléon]]iennes.
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Pour décrire cette transformation, K. Polanyi reprend l’exemple de l’avènement du [[marché du travail]] en Grande-Bretagne. Le système traditionnel encadrait le travail par d’importantes restrictions juridiques. Les [[corporation]]s imposaient des règles, davantage basées sur la coutume que sur les lois du marché, concernant aussi bien les rapports entre maîtres, compagnons et apprentis, que les conditions de travail ou les salaires. Ces derniers étaient par exemple annuellement évalués par des fonctionnaires.
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Encore en 1795, des juges de [[Speenhamland]], un village d’Angleterre, avaient décidé d’accorder des compléments de salaires, voire un revenu minimum aux indigents. Cette décision inspira l’Angleterre entière et l’instauration d’un marché du travail, basé sur l’idée libérale que seul le travail doit être source de revenu, se heurtait à l’idée charitable que quiconque a un « droit de vivre ». Cet obstacle, critiqué par les classiques de l’économie et certaines philosophes utilitaristes fut finalement levé en 1834 avec la disparition des poor laws (cf. supra).
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Le dogme du marché autorégulé s’impose alors en Angleterre, et est complété par de nouvelles mesures qui vont former un système cohérent propice à l’expansion du grand capitalisme. Afin de garantir la régulation du marché, on indexe l’émission monétaire sur l’encaisse-or en 1844. Cette discipline monétaire, adopté par la plupart des nations dans la seconde moitié du {{XIXe}} permet la stabilisation, ou l’autorégulation, des balances des paiements, suivant le principe des points d’entrée et de sortie d’or. Cette rigueur monétaire induit une [[déflation]] continue au {{XIXe}} qui nécessite une baisse proportionnelle des salaires nominaux (afin de garantir les profits), que seules les durs lois du marché peuvent imposer aux travailleurs. De même, afin de garantir une stabilité du pouvoir d’achat des travailleurs, malgré la baisse des salaires nominaux, le [[libre-échange]] s’impose comme moyen d’alimenter la baisse des prix par l’importation de produits étrangers à moindres coûts, d’où l’abolition des ''corn laws'' (lois protectionnistes sur le blé) en 1846 (cf infra).
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=== {{XIXe}}–{{XXe}} siècle : histoire de l’« entreprise » ===
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Le capitalisme reste au {{XIXe}} siècle essentiellement familial (à l’exception de quelques grandes sociétés déjà évoquées). Les noms des grandes familles industrielles et financières les plus connues de nos jours évoquent toujours cette période : [[Rothschild]], [[Schneider]], [[Siemens]], [[Agnelli]],... C’est dans une optique familiale que se développe le grand capitalisme : on s’accorde pour éviter la dispersion de l’entreprise entre les héritiers, tandis que les « fusions » de l’époque se font par l’entremise d’alliances matrimoniales.
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Dans la seconde partie du siècle, une nouvelle bourgeoisie s’impose, non celle des propriétaires mais celle des diplômés. En France par exemple, les [[Grande école|Grandes Écoles]] ([[HEC]] est fondée en [[1881]]) fournissent l’essentiel des nouveaux entrepreneurs ([[Armand Peugeot]], [[André Citroën]], etc.). Mais l’arrivée de ces diplômés à la tête des grandes entreprises ne brise pourtant pas la tradition familiale :
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« Dans un cas de figure repris souvent dans les romans, l’ingénieur brillant pouvait succéder au patron après avoir épousé sa fille. »<br/>
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(Patrick Verley).
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Le développement de la législation sur les sociétés anonymes (libéralisation totale en [[1856]] en Grande-Bretagne, [[1867]] en France et [[1870]] en [[Prusse]]), permet progressivement à des capitaux anonymes de se joindre à ceux des grandes dynasties industrielles.
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Dans ''Capitalisme, socialisme et démocratie'' ([[1942]]), [[Joseph Schumpeter]] prévoit que ces évolutions juridiques feront à terme disparaître la fonction d’entrepreneur-innovateur et qu’« au romantisme des aventures commerciales d’autan succède[ra] le prosaïsme ». La disparition de l’entrepreneur, entendu au sens du {{XIXe}} siècle, mène selon Schumpeter à la disparition de l’initiative capitaliste. L’« évaporation de la substance de la propriété » nuit à la vitalité de l’économie, et de part ses succès même, « l’évolution capitaliste, en substituant un simple paquet d’actions aux murs et aux machines d’une usine, dévitalise la notion de progrès ». Finalement, Joseph Schumpeter craint à l’époque que le capitalisme disparaisse au profit du [[socialisme]].
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Au {{XXe siècle}}, les évolutions des productions, la taille des entreprises et la complexité de leur gestion poussent de nombreux économistes à annoncer la fin du pouvoir des propriétaires du capital au profit des « gestionnaires » (''managers''). [[John Kenneth Galbraith]] prévoit que le pouvoir au sein de l’entreprise passe « de façon inévitable et irrévocable, de l’individu au groupe, car le groupe est seul à posséder les informations nécessaires à la décision. Bien que les statuts de la société anonyme placent le pouvoir entre les mains de ses propriétaires, les impératifs de la technologie et de la planification les en dépouillent pour les transmettre à la technostructure. » On assiste à une « révolution managériale » (''corporate revolution''), où le ''manager'' prend le relais de l’entrepreneur. Les équilibres entre les différents caractères du capitalisme en sont subtilement transformés : l’objectif essentiel est désormais moins le profit (qui préoccupait l’entrepreneur propriétaire) et les dividendes (soucis de l’actionnaire) que l’agrandissement de l’entreprise et de sa prospérité, dont dépendent la rémunération et le prestige des ''managers''. L’accumulation du capital devient la nouvelle priorité.
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Les évolutions les plus récentes de l’entreprise traduisent toutefois un retour en force des propriétaires. L’''actionnaire'' redevient la finalité de l’entreprise. Il ne s’agit généralement plus d’un individu, mais souvent de fonds de placement ou de fond de pensions, ou de banques chargées de faire fructifier l’épargne des déposants, exigeants qu’ils soient petits ou grands. La logique de la « rentabilité financière » reprend l’avantage sur celle de la rentabilité économique. Les plus à même de remplir ces nouveaux objectifs restent les ''managers'' qui, bien qu’ayant perdu leur pouvoir d’orientation au profit de ce qu’on appelle désormais la « [[gouvernance d'entreprise|gouvernance d’entreprise]] » (''corporate governance''), obtiennent des salaires toujours plus importants.
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=== {{XIXe}}–{{XXe}} siècle : capitalisme et salariat===
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==== La machine contre l’ouvrier ? ====
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[[Image:TravailEnfantUSXIX.jpg|300px|left|thumb|Une usine de verre de l’[[Indiana]], au {{XIXe}} siècle, où travaillent entre autres des enfants]]
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Cette problématique s’illustre dès les débuts de la première [[révolution industrielle]]. Les modifications du travail et de son organisation engendrées par l’arrivée de machines entraînent pour les [[travailleur]]s une source de [[chômage]], mais surtout de déqualification. [[Adam Smith]] (''[[Recherche sur la nature et les causes de la richesse des nations]]'', [[1776]]) reconnaît que le développement du machinisme et la [[division du travail]] abrutissent les hommes et amène à les considérer comme de simples machines devant réaliser un même geste simple toute la journée. En [[1811]], les ouvriers du [[Nottinghamshire]] se révoltent, inspirés par la légende du célèbre [[Robin des Bois]], sous la direction d’un mythique [[Ned Ludd]], pour détruire les machines, devenues leurs ennemies. Il en fut de même en [[1831]], lors de la « [[révolte des Canuts]] » (ouvriers de la soie [[Lyon]]nais).
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De fait, pour les capitalistes, la [[machine]] a longtemps primé sur l’[[homme]]. C’est ce dernier qu’on adapte. Lorsqu’un accident le prive d’un bras, on change l’homme sans s’inquiéter de l’adéquation de la machine. Lorsque la machine et certains de ses composants sont d’accès difficiles, on emploie les enfants, dont la taille permet d’aller dans des endroits peu accessibles.
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D’un point de vue général, les études sur longues périodes ont montré que le résultat de l’introduction des machines est plus complexe que l’unique concurrence envers le travailleur, puisqu'elle amène aussi à créer de nouveaux postes plus qualifiés (apparition des ingénieurs) en parallèle des anciens postes d’ouvriers. Plus tardivement, les machines ont aussi pu réduire la pénibilité et la durée du travail lorsque leur conception prenait en compte cette approche. Elles ont aussi permis aux hommes d’accéder à une société où les biens sont plus abondants grâce à l’augmentation de la productivité. Certains auteurs, enthousiastes face à la forte productivité des secteurs primaire et secondaire, confiants en la robotisation, n’hésitent pas à prophétiser « la fin du travail » ([[Jeremy Rifkin]], [[1996]]), et encouragent l’avènement d’une économie essentiellement tournée vers les services à la personne (« la production de l’Homme par l’homme » selon [[Robert Boyer]]).
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==== Les droits sociaux ====
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« Désespérés, réduits à l’alternative de mourir de faim ou d’arracher à leur maître par la terreur la plus prompte condescendance à leur demande. »<br />
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[[Adam Smith]], ''[[Recherche sur la nature et les causes de la richesse des nations]]'', [[1776]]
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Sous la pression du développement du [[mouvement ouvrier]] et de la question sociale, le législateur va devoir réagir pour améliorer les conditions de vie des travailleurs. Des lois vont progressivement améliorer le temps de travail, les conditions de travail, le premier âge du travail, l’accès aux soins, à la « retraite », etc. Dès [[1833]] en Grande-Bretagne avec le ''Factory Act'') mais de façon très progressive puisque la loi de 1833 ne fait que limiter à [[temps de travail|9 h par jour]] le [[travail des enfants]] de moins de 13 ans. Les problèmes humains ne se résoudront donc que tardivement.
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Cette période voit aussi se développer de nouvelles formes de [[solidarité]] entre travailleurs qui s’auto-organisent pour faire face à un dur quotidien. Les formes modernes de l’[[économie sociale]] se développent en opposition au capitalisme et proposent des services aux salariés. Dans un premier temps, les premières [[mutuelle]]s servent à financer les enterrements, puis elles étendent leur champ d’action au financement des jours de grèves, puis aux congés maladie et à la retraite.
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Certains grands patrons ne seront pas insensibles à la misère du monde ouvrier, et s’illustreront par leur paternalisme, par leur philanthropie et leurs méthodes de travail tout aussi avant-gardistes que compétitives. [[Robert Owen]], commença ainsi à poser les bases du mouvement coopératif dans son usine de New Lanark, en proposant à ses ouvriers aussi bien des cours du soir, que des jardins pour leurs enfants. En France, au [[Le Creusot|Creusot]], [[Schneider]] offre aussi divers services à ses salariés, sans négliger toutefois de faire implanter une caserne.
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==== Les salaires ====
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Plus tard, [[Henry Ford]] comprendra que l’insatisfaction de l’ouvrier, engendrée par les méthodes de travail [[Frederick Winslow Taylor|tayloristes]], se fait au détriment de la productivité, et proposera des salaires bien au-dessus du marché afin de limiter la rotation du personnel et de fidéliser une main-d’œuvre devenue difficile à recruter sur des postes peu valorisants de [[travail à la chaîne]] en une période sans chômage. Cette pensée se généralisera et aboutira au « [[Fordisme|compromis fordiste]] » des années 1945-1970, période sur laquelle la [[partage de la valeur ajoutée|part des salaires dans la valeur ajoutée]] va progresser au détriment de la part relative du profit. Toutefois, la productivité toujours accrue des salariés satisfaits de leurs salaires permet aux profits de s’accroître dans l’absolu : c'est ici qu'apparaît l’idée de compromis. La fin du compromis fordiste, depuis les [[années 1970]] ou [[années 1980|1980]] selon les pays, va cependant entraîner un mouvement inverse toujours en cours, dans lequel la part du profit progresse rapidement au détriment des salaires.
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Des modèles d’organisation du travail plus récents, tel le « [[toyotisme]] », invitent le salarié à faire part de ses réflexions sur le processus de production, lui permettant dés lors de reprendre un ascendant sur la machine, ou du moins d’en avoir l’illusion.
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=== X{{IXe}}–{{XXe}} siècle : évolution des enjeux politiques du capitalisme ===
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==== Capitalisme agricole contre capitalisme industriel ====
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L’opposition entre les grands capitalistes agricoles et d’autres parties de la population ne va malgré la [[révolution agricole]] pas tarder à se manifester. Dès [[1776]], [[Adam Smith]] écrit :
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« Les propriétaires, comme tous les autres hommes, aiment à recueillir là où ils n’ont pas semé. »
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Le capitalisme agricole, qui cherche à alimenter la hausse des prix par le protectionnisme (via les ''[[Corn Laws]]''), va alors s’opposer au capitalisme industriel. En [[1810]], l’économiste et parlementaire [[David Ricardo]] (''Essai sur l’influence du bas prix du blé'') pense que l’ouverture du pays aux importations agricoles permettra, grâce à la faiblesse du prix des subsistances, de réduire les salaires et donc de favoriser l’industrie. De fait, c'est bien un [[lobby]] d’industriels du textile (l’''Anti Corn Laws League'') qui, au terme d’une bataille politique incertaine contre les grands propriétaires fonciers, fera abroger les ''Corn Laws'' en [[1846]]. Le capitalisme libéral remporta alors l’un de ses premiers triomphes.
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À l’inverse, aux [[États-Unis d'Amérique|États-Unis]], le Sud, qui repose sur une agriculture [[esclavagisme|esclavagiste]], est [[libre-échange|libre-échangiste]], tandis que le Nord, qui développe un capitalisme industriel, est [[protectionnisme|protectionniste]]. Durant les décennies précédant la [[Guerre de Sécession]], des propriétaires du Sud prétextaient d’ailleurs que la condition de l’ouvrier du Nord n’était que rarement enviable à celle de l’esclave du Sud. Ils dénonçaient donc souvent l’appétit que les capitalistes dissimulaient derrière les discours abolitionnistes. L’imposition du capitalisme se traduisit donc par un ancrage profond de l’économie dans le protectionnisme qui a permis un essor rapide de nouveaux secteurs industriels.
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==== Capitalisme et [[démocratie]] ====
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Selon [[Raymond Aron]] (''Dix-huit leçons sur la société industrielle'', [[1962]]), le capitalisme a besoin dans son évolution d’accroître la [[qualification]] de la main-d’œuvre afin de garantir la pérennité de la croissance économique. Cette qualification accrue provoque l’émergence des aspirations égalitaires. La société capitaliste conduit naturellement à la démocratie « parce qu’elle est fondée non pas sur des inégalités de statut, sur l’hérédité ou sur la naissance, mais sur la fonction remplie par chacun. » La démocratisation rend sensible la population au [[plein emploi]], à la diminution du [[temps de travail]], à la réduction des inégalités de revenus, ce qui aboutit finalement à une intervention croissante de l’État et à l’apparition de nombreuses formes de [[contre-pouvoir]]s.
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Pour [[Joseph Schumpeter]] (''Capitalisme, socialisme et démocratie'', [[1942]]), c’est l’apparition du capitalisme et l’émergence d’une élite bourgeoise qui a permis la succès de la démocratie en lui fournissant des hommes capables de mettre en place une structure [[bureaucratie|bureaucratique]] efficace. Si le socialisme peut selon lui aussi être démocratique, il en est toutefois moins apte que le capitalisme :
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« Une classe dont les intérêts sont le mieux servis par une politique de non-intervention met plus facilement en pratique la discrétion démocratique que ne sauraient le faire des classes qui tendent à vivre aux crochets de l’Etat. »<br />
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(''ibid.'')
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Toutefois, pour des raisons similaires à celles exposées plus tard par Raymond Aron, la démocratisation mène souvent à une socialisation de la démocratie et à un recul du capitalisme.
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==== Capitalisme et [[patriotisme]] ====
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Selon [[Michel Aglietta]] (''Régulation et crises du capitalisme'', [[1976]]), le succès du capitalisme aux États-Unis et lié au « [[mythe de la Frontière]] ». L’idée originale de l’aménagement d’un espace géographique gigantesque se serait transformé en une idéologie favorable au capitalisme : « celle exprimant la capacité de la nation américaine à polariser les activités industrielles dans un sens de progrès. » L’assimilation de l’avantage de la grande industrie à la construction de la nation dans la conscience populaire aurait permis de justifier l’ensemble des dégradations du processus de production ([[taylorisme]] puis [[fordisme]]) nécessaires à la réalisation des profits des capitalistes.
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« C’est pourquoi la bourgeoisie industrielle a pu faire avaliser ultérieurement par l’ensemble de la nation les transformations technologiques induites par la plus-value relative en les présentant comme l’édification d’une « nouvelle frontière ». »<br />
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(''ibid.'')
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Dans l’histoire, le patriotisme serait donc un outil permettant de justifier les sacrifices des travailleurs au profit du grand capitalisme : c’est par exemple la conclusion que tireront certains [[poilus]] revenant des [[tranchées]] de la [[Première Guerre mondiale]] et constatant l’enrichissement nouveau de nombreux industriels.
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==== Confrontation des pouvoirs politiques et des pouvoirs privés ====
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Un des soucis majeurs de l’accumulation du capital matériel a été l’accumulation de pouvoir qu’elle signifiait. Les grandes [[manufacture|manufactures]] ont donc longtemps été étroitement contrôlées par l’État (on pense aux manufactures de [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]]) afin de limiter la constitution de formes de pouvoir privé. La création de sociétés sans l’aval du Parlement n’est accordée par exemple qu’en [[1825]] en Grande-Bretagne (abrogation du ''Bubble Act''). La libéralisation complète de la création de [[société par actions|sociétés par actions]] n’est achevée qu’en [[1856]] en Grande-Bretagne.
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Avant même la [[révolution Russe]], c’est aux États-Unis que se manifestent les premières oppositions entre le pouvoir politique et les grandes firmes capitalistes. Le capitalisme sous la forme du [[libéralisme économique]] apparaît et prône la [[concurrence économique|concurrence]] par une nouvelle organisation du [[marché]] comme gage d’efficacité, tandis que les précédentes formes de capitalisme avaient une tendance à la concentration et à l’entente. Dans cette optique libérale, la création de [[monopole]]s est donc contrariée par des lois anti-[[trust]]. Elles seront mis en pratique par [[Theodore Roosevelt]] qui s’opposera particulièrement à [[Famille Rockefeller|Rockefeller]] et à [[J.P. Morgan]]. Plus tôt, les États du Sud avaient provoqué la [[guerre de Sécession]] en proclamant leur indépendance, craignant de se voir imposé le modèle du nord (opposé à leur système esclavagiste) par le gouvernement fédéral républicain d’[[Abraham Lincoln]].
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==== Collaboration des pouvoirs politiques et des pouvoirs privés ====
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Dans l’histoire récente, les tentatives de nationalisations des biens matériels des grandes firmes transnationales ont provoqué la chute de certains gouvernements : celui de [[Salvador Allende]] en [[1973]] au [[Chili]] (renversé par un coup d’État militaire décidé à Washington). En [[1956]], la nationalisation du [[Canal de Suez]] par le gouvernement égyptien de [[Nasser]], provoque l’entrée en guerre de la France, de la Grande-Bretagne et d’[[Israël]]. À l’opposé, de nos jours, les privatisations des entreprises s’accompagnent presque systématiquement de mouvements sociaux et de protestations. La question du capitalisme, de par sa nature juridique, est source de pressions et de déséquilibres politiques. La [[Guerre Froide]] n’en est-elle pas la meilleure manifestation ?
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Pour [[John Kenneth Galbraith]] :
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« Le système industriel est inextricablement lié à l’État. Il n’échappe à personne que, de bien des façons, la grande entreprise moderne est un bras de l’État, et celui-ci, dans les circonstances importantes, est lui-même un instrument du système industriel. »<br />
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''Le Nouvel État industriel'', [[1967]]
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Selon Galbraith, les grandes firmes américaines de la seconde moitié du {{XXe siècle}} s’accaparent un pouvoir excessif afin de mettre en place à leur profit une économie planifiée. Le danger de guerres ayant pour seul objet de fournir des débouchés à l’industrie de l’armement est notamment évoqué. Quelques années plus tôt, le président américain avait d’ailleurs déclaré :
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« Nous ne devons jamais permettre que le [[complexe militaro-industriel]] ne menace nos libertés ou le processus démocratique. »<br />
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[[Dwight David Eisenhower]], Dernier discours à la nation du président des États-Unis, le 29 janvier [[1961]]
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Le libéralisme et ses théories les plus fondamentales sont par ailleurs remises en cause par le capitalisme industriel. Selon sa théorie dite de la « [[filière inversée]] », c'est par exemple la consommation qui s’adapte à la production grâce au harcèlement et aux besoins créés par la publicité. Il insiste donc sur la nécessité de l’existence de « pouvoirs compensateurs », et sur le rôle essentiel de l’éducation dans l’émancipation de l’individu.
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Les liens entre le monde politique et les grandes entreprises font régulièrement l’objet de polémiques. On pense par exemple à celles liées à la [[Guerre en Iraq (2003-2005)|guerre en Irak]], ou aux critiques faites au mode de financement des campagnes électorales aux États-Unis.
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==== Le capitalisme face aux velléités de régulation de l’État au {{XXe}} siècle ====
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Tout au long du {{XXe}} siècle, l’épanouissement du capitalisme a été remis en cause par les [[crise économique|crises économiques]] et l’émergence de modèles économiques alternatifs : les [[guerre mondiale|guerres mondiales]], le [[bloc communiste]], le [[nazisme]] en [[Allemagne]] et surtout la [[Grande dépression|crise économique des années 1930]].
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C'est en effet au cours de cette décennie que le capitalisme dut faire face aux défis les plus importants depuis son avènement au {{XVIIIe siècle}}. La crise amena une remise en question du « capitalisme sauvage » et du libéralisme. Par exemple, la théorie économique alors dominante (keynésienne) préconisait l’intervention publique ([[John Maynard Keynes]], ''Théorie générale de l’emploi de l’intérêt et de la monnaie'', [[1936]]) pour réguler les dysfonctionnements d’un système économique qu'elle qualifiait d’imparfait et de fondamentalement instable.
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Après la [[Seconde Guerre mondiale]], le développement des [[État-providence|États providence]] s’accompagna d’une prise de contrôle par l’État des plus grandes sociétés industrielles, commerciales et bancaires dans de nombreux pays. Les systèmes d’assurance privée furent quant à eux remplacé par une prise en charge collective des risques à l’échelle étatique. On mit alors en place des économies mixtes, où le capitalisme devait désormais non plus dominer, mais coexister avec des systèmes économiques alternatifs.
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Toutefois, suite au [[choc pétrolier]] et à la crise économique des années [[1970]], les fondements théoriques de l’intervention publique et de la [[régulation]] du capitalisme furent bouleversés. Le retour des politiques [[Libéralisme économique|libérales]] et la [[privatisation]] de pans entiers de l’économie marqua le retour en force du capitalisme comme système dominant des économies de marché. Par ailleurs, les [[années 1990]] furent marquées par la disparition progressive des systèmes alternatifs dans les pays de l’ancien [[bloc communiste]] et dans de nombreux [[pays en voie de développement]].
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== L’expansion du capitalisme : des capitalismes nationaux au capitalisme mondialisé ==
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L’essor du capitalisme a été encouragé par le nationalisme économique et le [[mercantilisme]] (voir plus haut). Au début des [[années 1950]], [[Charles Wilson]], PDG de [[General Motors]], déclarait « ce qui est bon pour General Motors est bon pour les [[États-Unis d'Amérique|États-Unis]] et réciproquement ». Un siècle plus tôt, [[Karl Marx]] expliquait que le capitalisme requiert un marché protégé où écouler ses produits, le [[nationalisme]] était donc la meilleure manière de se le garantir :
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« Le [[marché]] est la première école où la [[bourgeoisie]] apprend le nationalisme ».
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Depuis, la convergence des intérêts nationaux et de ceux du capitalisme est de plus en plus contestée, et il semble que le capitalisme cherche à s’affranchir des contraintes nationales en se faisant le moteur de la [[mondialisation économique]].
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=== Les capitalismes nationaux ===
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L’histoire économique des différentes nations depuis le {{XIXe siècle}} a mené le capitalisme à prendre des formes différentes d’un pays à l’autre.
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===== Le capitalisme britannique =====
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La croissance du capitalisme britannique au {{XIXe siècle}} a été fortement marquée par un [[libre-échange|libre-échangisme]] mêlé à la tradition du mercantilisme commercial. Cette évolution contre-nature a mené à la constitution d’un empire colonial important et à une insertion très précoce du pays dans la [[division internationale du travail]] (la part de la population agricole est devenue largement minoritaire en Angleterre dès le {{XIXe}} siècle). Important depuis ses colonies les matières premières, le Royaume-Uni est devenu au {{XIXe}} siècle l’« atelier du monde ». Héraut du libéralisme à travers un monde protectionniste, la Grande-Bretagne a toutefois connu une parenthèse marquée par l’émergence d’un État-providence important à la suite de la [[Seconde Guerre mondiale]], avant de redevenir à partir des [[années 1980]] un des exemples du capitalisme libéral anglo-saxon.
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===== Le capitalisme américain =====
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Si capitalisme américain et capitalisme britannique sont désormais réunis sous l’étiquette « capitalisme anglo-saxon », leurs histoires respectives sont pourtant différentes. Le capitalisme américain a été jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale marqué par un protectionnisme important. À la fin du {{XIXe}} siècle, le capitalisme américain a connu une concentration importante dans la plupart des branches de l’économie, la constitution des ''trusts''. Ainsi fusionnaient (ou s’alliaient) de leurs cotés les [[banques]], de leurs cotés les compagnies [[pétrole|pétrolières]], et ainsi de suite. Bien qu’on considère le modèle américain contemporain comme proche de celui de la Grande-Bretagne, c’est-à-dire comme ultra-libéral, l’État joue tout de même un rôle important dans le soutien de ses entreprises comme le montre les interventions protectionnistes récentes, les commandes importantes à certaines industries... ce qui pousse certains économistes à qualifier les États-Unis de pays mercantiliste.
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===== Le [[capitalisme rhénan]] =====
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Le modèle de l’[[Allemagne]] est plus récent, du fait même de la constitution plus tardive de cet État ([[1870]]). Il est depuis cette origine marqué par une forte prise en charge sociale (depuis [[Otto von Bismarck|Bismarck]]), une forte intervention de l’État dans les activités économiques, et une concentration importante des entreprises. Cette concentration s’est faite dans une logique totalement différente de celle de la concentration américaine, vu qu'elle a consisté dans le rapprochement de secteurs d’activité différents et complémentaires, comme par exemple une forte implication du secteur bancaire dans l’ensemble des grandes branches de l’économie. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, avec l’essor de la [[social-démocratie]], l’[[Allemagne]] a aussi réussi à développer un système [[syndicalisme|syndical]] efficace où la collaboration entre entrepreneurs et représentants du personnel assure une relative stabilité, et un faible taux de [[grève]]s contrastant avec le taux de syndicalisation élevé.
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===== Le capitalisme nippon =====
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Au [[Japon]], les origines du capitalisme se trouvent dans l’intervention vigoureuse de l’État. C’est en effet l’État qui, centralisant les anciens revenus des grandes familles féodales, va développer l’industrie sous l’[[ère Meiji]] (à partir de [[1868]]) avant de la confier à ses dernières. Les principes du capitalisme nippon sont semblables à ceux du capitalisme allemand dans la façon dont sont concentrées les entreprises. L’État joue toujours un rôle important dans l’économie, notamment via l’intervention du [[MITI]]. Au plan social, les grandes firmes entretiennent avec leurs salariés des rapports privilégiés basés sur la sécurité de l’emploi et en retour le dévouement à l’entreprise de la part du salarié.
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==== Évolution récente des deux grands modèles ====
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Dans son ouvrage de [[1991]], ''Capitalisme contre capitalisme'', [[Michel Albert]] a analysé les évolutions des deux grands modèles, le modèle « néo-américain » (ou anglo-saxon) et le modèle « rhénan » ([[Allemagne]], mais aussi pays scandinaves, [[Autriche]], [[Suisse]], et partiellement le [[Japon]]).
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Pour Michel Albert, les performances économiques américaines depuis l’arrivée au pouvoir de [[Ronald Reagan]] en [[1981]] sont à relativiser. La forte [[croissance économique|croissance]] du capitalisme néo-américain est selon lui le fait d’acquis des années antérieures à la libéralisation de l’économie opérée par ce président. Cette croissance a aussi été marquée par une accentuation du dualisme social et des inégalités, tandis l’économie connaît des déséquilibres dangereux (déficits budgétaires, extérieurs...) : « ils se jettent à corps perdu dans l’endettement pour la consommation, la jouissance immédiate ». Par ailleurs l’économie est menacée par la prépondérance des marchés financiers et de leurs exigences.
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Au contraire le modèle rhénan accorde une part moins importante à l’économie de marché via l’intervention de divers organismes. Les salaires sont par exemple fixés par les conventions collectives, l’ancienneté... Les grandes entreprises ne sont pas considérées comme des biens marchands mais comme une communauté « industrialio-financière » où les banques prennent une responsabilité de long terme. L’[[économie sociale de marché]] allemande incarne par ailleurs une synthèse entre le capitalisme et le socialisme. Moins générateur d’inégalités sociales, fondé sur des équilibres économiques solides (on pense à la rigueur monétaire allemande), le capitalisme rhénan semble donc supérieur.
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Pourtant le capitalisme rhénan connaît de nombreuses difficultés. La [[cohésion sociale]] serait menacée par la montée de l’[[individualisme]] tandis que la globalisation financière détourne les banques de leur rôle traditionnel. La confrontation des deux capitalismes tourne donc en faveur du moins performant (c’est l’opinion de Michel Albert), c’est à dire du modèle néo-américain. Finalement, cette évolution a tendance à orienter le capitalisme français vers le modèle anglo-saxon.
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Quoi qu’on pense des opinions de Michel Albert sur la qualité de tel ou tel modèle, on remarque que l’effondrement des sociétés socialistes n’a pas signifié la disparition des alternatives entre systèmes économiques différents.
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=== Capitalisme, [[colonialisme]], [[impérialisme]] et guerre ===
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==== L’impérialisme ====
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L’émergence du capitalisme au {{XVe siècle}} coïncide étrangement avec les premières grandes vagues de colonisations. [[Hernán Cortés|Cortés]], lucide conquérant des Amériques, déclara « nous autres Espagnols souffrons d’un mal que seul l’or peut guérir ».
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L’influence de l’économie sur les rapports de puissance des états, soulignés par les penseurs mercantilistes, poussera plusieurs siècles plus tard certains à lier capitalisme et impérialisme. Déjà au {{XVIIIe siècle}}, [[Voltaire]], plutôt enthousiasmé, soulignait que les marchands étaient plus utiles à la puissance de leur pays que les nobles :
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« Le commerce, qui a enrichi les citoyens en Angleterre, a contribué à les rendre libres, et cette liberté a étendu le commerce à son tour ; de là s’est formée la grandeur de l’État. C’est le commerce qui a établi peu à peu les forces navales par qui les Anglais sont les maîtres des mers. Ils ont a présent près de deux cents vaisseaux de guerre. La postérité apprendra peut-être avec surprise qu’une petite île qui n’a de soi-même qu’un peu de plomb, de l’étain, de la terre à foulon et de la laine grossière, est devenue par son commerce assez puissante pour envoyer, en 1723 [1726 en fait], trois flottes à la fois en trois extrémités du monde... »<br />
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''Lettres anglaises''
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[[Image:China_imperialism_cartoon.jpg|thumb|220px|left|Caricature politique montrant le partage de la [[Chine]] entre puissances européennes, fin des [[années 1890]]]]
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De fait, la Grande-Bretagne impose violemment son commerce au monde au {{XIXe}} siècle. Par exemple, celui de l’[[opium]] à la [[Chine]] ([[guerre de l’opium]], [[1838]]–[[1842]])
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Au début du {{XXe}} siècle, des penseurs, marxistes pour la plupart, ont associé le phénomène de la multinationalisation des firmes et du colonialisme au développement du capitalisme, faisant de l’impérialisme son stade suprême.
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En [[1913]], [[Rosa Luxembourg]] explique dans ''l’Accumulation du capital'', que la reproduction du système capitaliste nécessite l’ouverture continuelle de nouveaux débouchés et son implantation dans les régions géographiques dont il est encore absent. Illustrant l’importance économique des colonies, où plutôt reflétant l’importance qu’on leur attribuait à l’époque peut-être à tort, [[Jules Ferry]] déclara à la Chambre que « la politique coloniale est fille de la politique industrielle ». En effet, au fur et à mesure de son développement et de l’émergence économique de nouveaux pays, l’accès au marché et le partage des débouchés deviennent de plus en plus problématiques. Mais la constitution de marchés coloniaux exclusifs est limitée par la taille finie de la planète. Le temps du monde fini commence et les antagonismes entre les grandes puissances économiques ne peuvent s’en trouver qu’exacerbées. Ainsi selon Rosa Luxembourg, l’impérialisme mène inévitablement à la guerre.
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De fait, des crises et des conflits opposent à plusieurs reprises le Royaume-Uni à la France ([[crise de Fachoda]] en [[1898]]), les britanniques à des colons [[Pays-Bas|néerlandais]] ([[guerre des Boers]] de [[1899]] à [[1902]]), la France à l’Allemagne (au [[Maroc]] en [[1905]]–[[1906]] puis en [[1911]])... [[Jean Jaurès]], opposant à la première guerre mondiale, déclara que « le capitalisme porte la guerre comme la nuée porte l’orage ».
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En 1916, [[Lénine]] explique dans ''l’Impérialisme, stade suprême du capitalisme'', que la concentration du capital mène à un stade de l’histoire du capitalisme marqué par les positions de monopoles des grandes firmes industrielles et financières. Confrontées à la baisse tendancielle du taux de profit (théorie marxiste qui prône que les profits du capitalisme baissent naturellement sur le long terme, et que le système est donc condamné) les grandes firmes tentent d’investir sur les marchés étrangers afin de retrouver de forts niveaux de profit. Les grandes firmes nationales s’entendent alors pour se partager le monde. Lénine prend par exemple le cas d’[[AEG]] (Allemagne) et de [[General Electric]] (États-Unis) dans le domaine de l’[[électricité]].
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« Ce qui caractérisait l’ancien capitalisme où régnait la libre concurrence, c'était l’exportation des marchandises. Ce qui caractérise le capitalisme où règnent les monopoles, c'est l’exportation des capitaux. »<br />
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(''ibid.'')
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La nature belliqueuse du capitalisme a été beaucoup discutée. Nombre de libéraux ont fait remarquer que l’impérialisme s’était aussi révélé comme une tendance récurrente de l’[[Union soviétique]]. Dans ''les Étapes de la croissance économique'' ([[1960]]), [[Walt Whitman Rostow]], pense que la guerre n’est pas proprement liée au capitalisme, mais plus simplement au développement économique. L’émergence d’une nouvelle puissance économique, qu’elle soit capitaliste, communiste ou autre, signifie l’apparition d’une adéquation entre les équilibres géopolitiques passés et les rapports de forces nouveaux. La remise en question par la nation émergente des traités passés mène naturellement à la guerre.
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==== La question du pillage colonial ====
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Du point de vue de [[Fernand Braudel]], si le capitalisme se fonde dans le commerce lointain, les colonies ont clairement joué un rôle positif. Toutefois la concomitance du colonialisme et du capitalisme n’est pas si évidente dans les faits. Les grands empires coloniaux qu’ont été l’[[Espagne]] et le [[Portugal]] n’ont par exemple pas connu le développement du capitalisme industriel avant le {{XXe}} siècle. Au contraire, des nations comme l’Allemagne et le Japon, et surtout les États-Unis, on su développer un capitalisme efficace bien que ne possédant pratiquement pas de colonies.
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Certains historiens ont souligné le rôle pervers des colonies dans le développement économique des métropoles. Ces dernières, constituant des débouchés « faciles », ont joué le rôle de marchés captifs, c’est à dire qu’elles ont découragé l’investissement matériel sur le territoire national en détournant d’importants volumes de capitaux vers l’extérieur.
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Il n’est pas absurde de considérer que les efforts de conquête, mais surtout d’aménagement des territoires occupés, ont coûté davantage qu’ils n’ont rapporté aux économies capitalistes d’Europe. La théorie du « pillage colonial » est donc largement contestable.
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Dans une thèse datée de [[1984]], ''Empire colonial et capitalisme français, histoire d’un divorce'', [[Jacques Marseille]] se demande si l’empire colonial a été un frein ou un moteur pour le développement du capitalisme français. Selon lui, l’importance de l’empire pour le capitalisme français n’a été qu’une apparence statistique. En effet, de grandes compagnies ont su profiter de la crédulité des épargnants pour s’attirer des capitaux qui ne prenaient souvent pas de formes matérielles dans les colonies. Par ailleurs, les produits importés des colonies n’étaient pas, contrairement aux a priori, des produits rares ni des produits dont les prix étaient substantiellement inférieurs aux cours mondiaux. À partir de la [[Grande dépression|crise des années 1930]], ce sont les secteurs économiques en déclin qui se sont accaparés les marchés coloniaux, tandis que les secteurs sources d’innovation ne s’y sont en réalité que très rarement intéressés. Il semble ainsi que l’empire n’a pas été la source du progrès économique.
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Une prise de conscience de ce phénomène a progressivement renversé l’opinion des élites quant aux bienfaits du colonialisme, tandis que l’opinion publique, pourtant rapidement opposée au colonialisme, pour des raisons morales, conservait l’idée que celui-ci était favorable à la France. Le problème des marchés captifs a d’abord été identifié comme une source de démotivation à l’innovation pour les entreprises nationales, cette dernière n’étant pas nécessaire dans un contexte d’absence de concurrence de la part des pays étrangers. Le résultat serait alors de ce point de vue une perte de compétitivité face aux autres économies avancées. Seul le [[régime de Vichy]] a un temps préconisé le développement industriel des colonies, notant que le commerce avec des économies développées était plus profitable que celui avec des pays sous-développés. À la suite de la Seconde Guerre mondiale, les capitalistes ont cédé au « [[complexe hollandais]] ». En effet, le constat de la croissance exceptionnelle de l’économie des Pays-Bas suite à l’abandon en [[1949]] de l’[[Indonésie]] troublait la thèse couramment admise sur l’influence économique positive de l’empire.
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Finalement, la thèse du pillage colonial est très largement contestable, et il est notable que le développement récent du capitalisme a exigé au contraire un abandon des colonies, un divorce à l’amiable entre les deux parties. Si un des divorcés en a largement profité, la métropole, le cas du second est plus nuancé. Si certaines anciennes colonies ont su développer un capitalisme efficace suite à leur émancipation, de nombreux pays, d’Afrique notamment, ont de nos jours des revenus par habitants inférieurs à ceux qu’ils avaient avant leur indépendance.
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=== Le capitalisme mondial ===
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==== De l’« économie-monde » à l’économie mondiale ====
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Au sens de Braudel, il faut entendre « monde » comme un ensemble économique cohérent. Dès lors, il peut coexister plusieurs « économies-monde », qui forment différents ensembles économiques. Ainsi les grandes cités marchandes sont-elles les centres d’ensembles économiques cohérents à l’échelle d’un continent, ou d’une mer (la [[mer Méditerranée|Méditerranée]] au {{XVIe siècle}} pour les cités italiennes par exemple) :
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« un morceau de la planète économiquement autonome, capable pour l’essentiel de se suffire à lui-même et auquel ses liaisons et ses échanges intérieurs confèrent une certaine unité organique ».
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Ce n’est qu’avec la révolution industrielle à la fin du {{XVIIIe}} siècle que s’entame un processus qui fera de [[Londres]] le centre d’une « économie-monde » à l’échelle mondiale. Elle sera plus tard dépassée par [[New York]].
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L’étude parallèle des deux termes n’est pas gratuite, car on tend à retrouver les caractéristiques des « économies-monde » de la [[Renaissance (période historique)|Renaissance]] dans l’économie mondiale actuelle.
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* L’« économie-monde » est toujours dominée par un pôle urbain, une ville capitaliste assurant le rôle de centre décisionnel et logistique. Cette analyse peut être rapporté à la prépondérance de la [[Triade (économie)|Triade]] (Europe, Japon, Amérique du Nord) qui concentre 75&nbsp;% du commerce mondial et de ses grandes mégalopoles (Londres, New York, [[Tokyo]]), qui concentrent une part similaire des opérations financières de la planète.
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* Une division en zones successives fortement hiérarchisées faisant l’objet d’une division internationale du travail. On retrouve près des cités dominantes les activités décisionnelles et à forte valeur ajoutée (la Triade), puis s’éloignant des pôles on trouve des économies de moins en moins avancées et subordonnées aux économies dominantes (les pays en voie de développement qui se consacrent aux activités de main-d’œuvre), puis à la périphérie, des pays oubliés et isolés, hors de l’activité économique mondiale (les pays les moins avancées).
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On peut donc considérer que c’est une longue évolution de schémas existant depuis la Renaissance qui a progressivement mené le capitalisme à constituer une économie mondialisée.
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==== Multinationalisation des entreprises ====
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Les premières [[multinationale]]s modernes datent du milieu du {{XIXe}} siècle. À titre d’exemple, [[Samuel Colt]] réalise le premier investissement américain en Grande-Bretagne en [[1852]] afin d’y faire produire son [[revolver]]. Singer, fabricant américain de [[machine à coudre|machines à coudre]] s’installe en Europe à partir de [[1867]]. Ces entreprises, le plus souvent britanniques, ouvrent la voix de l’internationalisation de la production. Elles sont suivies dans les années de la Grande dépression (1873-1896) par un premier groupe de grandes firmes nationales : [[General Electric]], [[AEG]], [[Nestlé]], [[Kodak]], [[United Fruits]],... En [[1908]], [[Henry Ford]] ouvre sa première usine en Europe, à [[Manchester]]. La stratégie d’installation sur les marchés étrangers à été par la suite modifiée par la déréglementation et la modernisation des marchés financiers qui ont permis l’échange d’actifs financiers à l’échelle de la planète. Les grands groupes fusionnent avec des firmes étrangères (un des plus vieux exemples étant [[Royal Dutch Shell]], compagnie anglo-néerlandaise fondée en [[1908]]). On peut par exemple noter que les entreprises « françaises » cotées au [[CAC 40]] sont en moyenne détenues à plus de 40&nbsp;% par des investisseurs étrangers.
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Pour [[Robert Reich]] (''l’Économie mondialisée'', [[1991]]), l’économie nation tend à disparaître au profit d’un réseau mondial dans lequel les entreprises abandonnent la production standardisée aux pays en développement, ce qui ne reflètent pas une perte de compétitivité des pays riches (on peut noter par exemple que seul 10&nbsp;% du prix d’un [[ordinateur]] est lié à sa production proprement dite), mais conservent le plus souvent les activités de conception. Enfin la production est dispersée sur la planète afin de profiter des avantages de chaque région.
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Du point de vue social, l’effet de cette mutation du capitalisme est un accroissement des inégalités. Les travailleurs les moins qualifiés sont mis en concurrence avec ceux des pays du [[tiers monde]], tandis que les « manipulateurs d’idées » profitent de marchés gigantesques où accroître leur profit. En effet l’idée ([[logiciel]], gestion, [[brevet]],...), produite une fois, se multiplie à coût quasi nul une infinité de fois, ce qui entraîne pour son concepteur un revenu proportionnel à la taille du marché.
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=== Vers un « [[capitalisme cognitif]] » ? ===
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La perte de valeur du travail non qualifié et même du capital matériel (de plus en plus délocalisé dans les pays pauvres) entraîne une prise d’importance toujours croissante du capital immatériel (la [[propriété intellectuelle]]) et de la [[connaissance technique]] et du [[savoir-faire]] des travailleurs (le [[capital humain]]).
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==== La propriété intellectuelle ====
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[[Image:Hebern-patent.png|right|thumbnail|220px|Le [[brevet]] de la ''« Hebern single-rotor machine »'' ([[machine de Hebern]]), brevet n°&nbsp;1510441 daté de [[1918]]]]
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La première loi sur les brevets d’invention (''statute of monopolies'') fut votée par le Parlement anglais en [[1623]]. Depuis la Renaissance, de nombreuses cités reconnaissaient des privilèges aux inventeurs. En France, l’[[Ancien Régime]] leur assure aussi des droits. C’est [[Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais|Beaumarchais]] qui fera, durant la [[Révolution Française]], voter des « [[droit d'auteur|droits d’auteurs]] ». C’est le meilleur exemple du lien substantiel du capitalisme au Droit, car rien d’autre que la violence de l’État ne peut prévenir la copie. L’[[Angleterre]] de la révolution industrielle se garantira l’exclusivité de ses [[innovation]]s en empêchant la sortie de toute machine jusqu’en [[1843]].
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De nos jours, les brevets posent des problèmes éthiques dans les domaines médicaux tandis que se pose la question de la brevetabilité du vivant (le génome humain en particulier). L’évolution des supports informatiques et des méthodes d’échange, tel le « [[pair-à-pair]] » (''peer-to-peer''), montrent bien que la pérennité du capitalisme repose sur la volonté et la capacité de l’État à assurer la protection de la propriété privée.
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==== L’émergence du « capital humain » ====
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On doit la notion de « capital humain » à l’économiste américain [[Gary Becker]] (''Human Capital'', [[1964]]). Il définit l’ensemble des [[Connaissance technique|aptitudes et compétences]] accumulées par l’individu et susceptibles de jouer un rôle dans le processus de production. C’est la forme de capital dont la prise en compte est la plus récente. Il joue un rôle croissant dans une société de plus en plus tertiarisée et où la [[recherche scientifique|recherche]] et les [[science]]s ont une place cruciale. Ce capital est substantiel à l’individu et il semble donc improbable qu'on puisse l’en déposséder. Il existe toutefois des exceptions notables. Les salariés quittant leur entreprise peuvent par exemple être soumis à une clause de confidentialité, les empêchant alors de faire profiter de leur savoir une entreprise concurrente, et ce pour un certain temps. Mais le capital humain pose bel et bien de vrai problèmes : la « fuite des cerveaux » par exemple (hauts diplômés formés aux frais d’un État et qui profitent à un autre). De même, le risque de perdre leurs salariés décourage les entreprises de leur offrir une formation onéreuse. Le capital humain représente une forme de capital que le capitaliste ne peut pas encore s’approprier. De plus, les problèmes d’accumulation, d’inégalités sociales et économiques, n’épargnent pas cette forme de « capital » ; elles sont pour parties liées aux institutions, telle l’école (phénomène de [[la reproduction|reproduction]] sociale).
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Les évolutions décrites par ses deux derniers paragraphes, accélérées par le processus de mondialisation, amènent certains à considérer le passage dans un nouveau type d’économie (« [[économie du savoir]] » ou « capitalisme cognitif ») dans laquelle les droits de propriété sur le capital seraient plus limités.
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===Formes de capitalisme===
 
===Formes de capitalisme===

Revision as of 13:24, 14 February 2006

Catégorie:Capitalisme

Catégorie:Articles à retravailler Le mot capitalisme désigne au sens strict un système économique fondé sur la propriété privée des moyens de production, qui se caractérise en consquence par l'Accumulation de capital, et le Salariat (marché du travail).

La propriété privée des moyens de production est le plus souvent partagée entre les individus et l’État, donnant naissance à une gamme continue de sociétés d’économie mixte. La propriété privée des moyens de production peut coexister avec un haut degré d’interventionnisme dans les échanges, par exemple la fixation des prix et des conditions d’échange. De telles pratiques peuvent être le fait de propriétaires qui y voient un moyen d’augmenter leurs profits en demandant à l’État de les protéger contre la concurrence et contre la volonté des consommateurs.

Enfin la propriété privée des moyens de production ne préjuge pas de la façon dont leurs propriétaires les utilisent. Quel que soit le régime, ils peuvent les consacrer à des fins humanitaires au lieu de rechercher le profit, ou de les gaspiller (volontairement ou non) au lieu d’accroître leur capital. On parle de « capitalisme libéral » pour désigner une situation où les moyens de production sont propriété d'individus, de firmes, et usant de la concurrence et du marché à des fins de profits. On parle de « capitalisme d’État » pour désigner une situation où tous les moyens de production sont propriété de l’État, mais où la caste au pouvoir les utilise dans son propre intérêt, comme le ferait une personne privée, et non dans l’intérêt de la collectivité.

Le même mot « capitalisme » désigne des réalités différentes selon les personnes qui l’utilisent. L'incertitude quant à la définition exacte du capitalisme autorise des interpretations diversifiées et contribue à alimenter les nombreuses et vives controverses dont le « capitalisme » est l'objet.

Étymologie et définition succincte

Capitalisme et capitaliste, dérivé de capital, a d'abord signifié (1753Template:refl) l'état de la personne qui possède des richesses . Le sens moderne est donné par Richard de Radonvilliers en 1842. Il est repris par Pierre Leroux (1848), William Thackeray (1854, première apparition en anglais), Pierre Joseph Proudhon (1867), Louis Auguste Blanqui (1869), parmi d'autres. Karl Marx et Friedrich Engels parlent de forme capitaliste de production («kapitalistische Produktionsform»), puis dans Le Capital de capitaliste.

Au début du Template:XXe siècle, le terme est de plus en plus utilisé, comme avec Max Weber dans L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme en 1904. le capitaliste (pour des raisons que Weber analyse comme religieuse) renonce à consommer ses biens tout en voyant dans leur quantité un indicateur de conduite de sa vie ; il s'organise donc de façon rationnelle et méthodique dans le seul but de produire, et il accumule et investit ses biens pour en produire de plus en plus, non pas dans un but de consommation future ou de sécurité, mais dans une logique de pure "croissance". C'est là, et seulement là, qu'il apparait une rupture majeure par rapport aux systèmes antérieurs, qui fonctionnaient (à l'exception des plus primitifs) également au moins en partie sur la recherche de "profit" et l'accumulation de capital.

C'est en 1906 que Werner Sombart parle de capitalisme moderne, celui dont il est question ici.

Le capitalisme est à l'origine un concept, sociologique, d'analyse du fonctionnement économique de certaines sociétés. Ce n'est que beaucoup plus tard, sous l'influence et en réaction à des critiques (spécialement la critique marxiste et ses dérivées) qu'il est apparu des théoriciens politiques partisans du capitalisme.

On oppose alors le capitalisme

  • à l'économie primitive, où les échanges sont marginaux et chaque groupe exploite la nature pour son propre compte.
  • à l'économie de potlatch, où les échanges, même importants, ne visent pas à une accumulation de capital (ni parfois même à la consommation : il arrive que les biens soient détruit purement et simplement à l'issu de l'échange), mais à une démonstration symbolique de puissance statutaire.
  • à « l'ancien régime » (et au féodalisme), où c'est le statut personnel des individus qui détermine leurs droits, y compris économiques, de sorte que la propriété est une notion inadaptée (par exemple le seigneur n'est pas propriétaire de son fief, il est détenteur de droits complexes plus ou moins cessibles et exploitables selon un droit très variable d'un lieu à un autre).
  • au communisme, qui désigne d'une manière générale une théorie d'organisation politique, sociale et économique sans classe sociale censée bénéficier de la mise en commun des moyens de production pour répondre aux besoins de chacun.
  • au socialisme d'État, où la propriété privée est réduite au minimum, et où tout le capital productif est géré collectivement ; toutefois, dans ce contexte économique, on trouve aussi le terme de capitalisme d'État, que certains socialistes utilisent pour désigner l'économie où l'État est seul et unique propriétaire de capital, ce qui n'en fait, de leur point de vue, qu'un capitalisme totalitaire.

Il faut insister sur le fait que l'accumulation de capital se produit toujours dans toutes les sociétés, et que donc elle n'est pas déterminante dans ces oppositions.

On notera par ailleurs que les formes politiques sont rarement "pures" en pratique, de sorte que le capitalisme coexiste très largement avec les autres systèmes. Certains théoriciens préconisent même explicitement des formes mixtes, avec des dosages variés selon le domaine et le but.

Le capitalisme est dépendant du système politique et législatif en place : une des bases nécessaires est l'existence d'une protection juridique de la propriété privée et de moyens pour faire respecter cette propriété (Justice, Police, Armée). Il est communément admis qu'un État est nécessaire pour remplir ce rôle. On notera à cet égard qu'en réalité, le capitalisme fonctionne très largement (et même essentiellement, pour le grand commerce internationnal) sur la base d'un arbitrage privé, où l'État n'intervient qu'à titre d'acteur potentiel en dernier ressort (sachant qu'il ne faut pas négliger l'effet économique d'une simple possibilité d'intervention).

Depuis la fin de la Guerre Froide entre le capitalisme d'État et le capitalisme libéral (par la chute du premier), et les tensions qui l'accompagnaient, le capitalisme se résume à la version libérale.

Historique et formes du capitalisme

Histoire du capitalisme

La question du commencement de l’histoire du capitalisme, de ses origines, a été source de débats sociologiques, économiques et historiques depuis le Template:XIXe siècle. Karl Marx a fait de ce système de production une étape d’une histoire de l’humanité marquée par la lutte des classes, symbole du triomphe de la bourgeoisie sur la noblesse, mais condamné à être renversé par le prolétariat. Les sociologues allemands du début du Template:XXe siècle ont quant à eux mis en avant des explications culturelles et religieuses, Werner Sombart l’associant à la mentalité juive, Max Weber à l’éthique protestante. Plus récemment des historiens, tel Fernand Braudel, se sont intéressés à l’évolution dans le temps long de cette « civilisation », en faisant remonter ses racines jusqu’au Moyen Âge.

Les premières formes de capitalisme au sens moderne sont graduellement apparues en Occident à la suite du Moyen Âge, d'abord dans les cités marchandes d'Italie et d'Europe du Nord (Ligue de la Hanse, Pays-Bas). Le système prend son essor avec la Révolution industrielle.

Formes de capitalisme

De nombreux auteurs distinguent plusieurs formes de capitalisme, selon la nature des moyens de production qui prédominent ou qui leur semblent prédominer dans une société. Ils repèrent ainsi, selon les circonstances historiques:

  • un capitalisme à base foncière, exploitant les rentes constituées par les différences de rendement agricole ;
  • un capitalisme minier, interférant avec la politique internationale quand le contrôle des ressources relève du pouvoir politique ;
  • un capitalisme industriel, exploitant un stock de machines onéreuses concentrées dans des manufactures ou usines ; la place accordée aux travailleurs est alors variable, elle peut se réduire à un rôle d'objet sans plus d'importance qu'un cheval ou qu'un tas de charbon, ou obtenir plus de respect et de considération comme dans le fordisme;
  • un capitalisme financier portant sur des biens abstraits (actifs financiers) non directement liés aux équipements de production. Cette forme moderne du capital, le "capital financier", est l'objet d'anathèmes nombreux, y compris de la part de capitalistes.

On parle aussi de deux formes archétypiques de capitalisme:

  • le "capitalisme rhénan", caractérisé par un poids majeur des banques (détentrices de près de la moitié des actions des sociétés cotées, et très influentes sur les autres entreprises), et une influence importante de syndicats puissants;
  • le "capitalisme anglo-saxon", désignant une forme où ce sont les actionnaires individuels, souvent regroupés dans des fonds d'investissement, dont les fonds de pension pour les futurs retraités, qui ont l'influence déterminante.

Mécanisme

Dans un régime capitaliste, les biens qui forment le capital, comme tous les facteurs de production, appartiennent à des personnes ou des groupess, les privant à des fins de posséder un pouvoir sur les besogneux (que sont aussi les salariés). Les rôles de détenteur de capitaux, d’apporteur de travail et d’entrepreneur y sont dissociés et peuvent être joués par des individus différents, chacun cherchant à satisfaire ses propres objectifs. Si pour l'analyse théorique il est commode d'insister sur cette séparation, en pratique un même individu peut jouer simultanément ou successivement plusieurs de ces rôles, en plus de son rôle de consommateur.

Une des caractéristiques essentielles du capitalisme est de de fonctionner sur la base de la recherche du profit par le capitaliste. Mais il laisse chacun déterminer ses objectifs de profit, qualitativement et quantitativement. Le profit effectivement réalisé dépend, lui, de la réaction du marché aux offres des "entrepreneurs" qui mettent en œuvre ce capital.

La rémunération du capital investi encourage l’accumulation du capital, qui est nécessaire à la fois pour compenser l’usure et l’obsolescence des facteurs de production et pour permettre le progrès technique par utilisation d’outils de plus en plus nombreux et efficaces.

Les intérêts des hommes en tant que travailleurs ou entrepreneurs sont donc subordonnés à leurs intérêts en tant que consommateurs ou détenteurs de capitaux. Cette pression subie par les producteurs tend à mettre les facteurs de production entre les mains de ceux qui savent le mieux les utiliser pour la satisfaction des consommateurs.

Le capitalisme est un régime économique et social dans lequel les capitaux, source de revenus, n'appartiennent pas, en règle générale, à celles et ceux qui les mettent en valeur par leur travail.

Coopératives, mutuelles, associations et l'économie sociale

Très généralement, les entreprises de l'économie sociale, qui regroupe les coopératives, les associations et les mutuelles :

  • lient l'obtention du service à une adhésion (historiquement souvent soumise à une condition de statut de la personne, mais de plus en plus libre) ; de ce fait,
  • elles ont un capital détenu par les usagers (mutuelles, associations, coopératives de crédit et de consommation) ou par leurs salariés (coopératives de production et SCIC), et
  • elles ont un capital variable, au gré des entrées et sorties de membres.
  • appliquent le principe démocratique « une personne, une voix » pour les prises de décision, mais
  • préfèrent traduire le profit en service « en nature », au profit de leurs adhérents (dans le cas où les bénéficiaires du service ne sont pas les adhérents, mais une population qu'il s'agit d'aider, on peut discuter de savoir s'il s'agit encore d'une forme capitaliste) ; c'est alors l'importance de l'implication de l'adhérent qui détermine sa part de bénéfice ;
  • inversement, elles minimisent les distributions financières aux adhérents.

Ces entreprises peuvent tenir une place importante dans certains secteurs économiques (par exemple en France : la banque, l'assurance, la santé ; les coopératives agricoles ont même une place dominante dans le négoce et la transformation agricole).

Rien n'oblige les adhérents à être des personnes physiques : ainsi, des personnes morales et notamment des entreprises peuvent également s'associer sous cette forme. Un "Groupement d'intérêt économique" leur permet de coopérer sur certains points non stratégiques ou pour lesquels la concurrence a moins d'avantage que la coopération. Cela leur permet de mettre en place des services communs (carte bancaire, approvisionnement de magasin, marketing, exportation, recherche, etc.). Deux des trois plus grands systèmes français de "grande distribution" sont construits autour d'un GIE, dont les adhérents sont les magasins distributeurs, propriétés de capitalistes locaux.

Le terme d'"économie sociale" recouvre des sociétés et groupes très divers. Ce secteur représente environ 10% des emplois en France .

Cas particulier de l'État

L'État dispose d'un "domaine privé", correspondant aux propriétés privées d'un individu ordinaire ou d'un groupe privé. Très souvent, la distinction n'est pas bien faite entre ce domaine privé et le domaine public (la partie dont l'État est gestionnaire pour le compte de la collectivité). D'autant que dans certains cas un même bien peut appartenir, en fonction des circonstances, au domaine privé de l'État ou au domaine public, et que la gestion des possessions de l'État (publiques ou privées) est l'occasion de débats aussi bien théoriques que pratiques.

  • Par rapport à son domaine privé, l'État se trouve en théorie dans la même situation qu'un capitaliste ordinaire. Mais c'est en fait rarement le cas : les impératifs et les méthode de gestion politiques l'emportent très généralement sur les exigences économiques.
  • Par ailleurs, il arrive, dans le cadre d'une économie de marché, que l'État agisse avec une participation capitalistique, mais en recherchant une optimisation politique et non une optimisation économique de sa participation : voir économie mixte.
  • Le cas où l'État est propriétaire de tout le capital est appelé capitalisme d'État (ou socialisme d'État) où le surplus est un capital d'État : la production des richesses et leur distribution s'y font pour l'essentiel sous contrôle des détenteurs d'un pouvoir politique. Il est souvent utilisé pour décrire les régimes de L'URSS et de ses satellites où l'État, unique propriétaire des moyens de production, prive de cette propriété l'ensemble de la collectivité exproprié, ce dernier devenant alors salarié de l'État. Depuis la chute du mur de Berlin en 1989, les États soviétiques ayant pratiqué cette économie, s'orientent vers une libéralisation de l'économie avec une privatisation pratiquement totale, certains abandonnant jusqu'à l'idée même d'une économie mixte.

Critiques du capitalisme

Le capitalisme est l'objet de nombreuses controverses, rendues obscures par la confusion entre les sens du mot. Ces controverses peuvent porter:

  • sur l’accumulation du capital en elle-même
  • sur la propriété du capital
  • sur le comportement des propriétaires du capital

On trouve en régime capitaliste de nombreuses inégalités de revenu, de patrimoine, des déséquilibres d'imposition favorisant le capital au détriment du travail, etc... Certains y voient un scandale spécifique au capitalisme, et préconisent d'autres systèmes qu'ils estiment exempts de ces défauts.

Quatre positions

Marxisme

L'analyse marxiste, inspirée de Karl Marx à travers plusieurs ouvrages, dont le plus connu est le Capital, est que dans une société capitaliste, les prolétaires sont obligés de vendre leur force de travail pour subvenir à leurs besoins. Ils sont contraints de se salarier, c'est-à-dire d'échanger leur force de travail contre un salaire (autrement dit ils louent leur force de travail).

Cette dépendance les place dans une situation d'exploitation (domination) par les capitalistes, propriétaires du capital. La force de travail seule ne produit que de la valeur d'usage, pas de valeur d'échange, elle nécessite des matières premières et des moyens de production, donc l'usage de capital, détenu par les capitalistes. Le travail vivant (l'usage de la force de travail) est transformé en travail mort (le capital).

Dans les entreprises qui survivent à la compétition, le salaire est moindre que ce que le travail effectué a créé comme valeur d'échange, une part (selon les sociétés et les époques, généralement entre 30 % et 50 %) étant prélevée par le capitaliste (propriétaire individuel, ou actionnaires). En plus de ce bénéfice, le capitaliste regagne le capital investi, qui retourne alors à l'investissement (équipements de production, recherche et développement, salaires...).

Selon les marxistes le capitalisme oppose les êtres humains entre eux (notamment par la lutte des classes), ils souhaitent donc l'abolition du capitalisme, afin de remplacer la compétition par la coopération.

Néanmoins, certains marxistes (notamment Lénine, Boukharine, ...) développeront l'idée d'un Capitalisme d'État, comme période d'accumulation et de monopole capitaliste d'État nécéssaire afin d'arriver à la période de transition socialiste.

Libéralisme classique

Pour les libéraux classiques, le système ne doit pas être jugé (seulement) en terme d'utilitarisme, mais (surtout) d'un point de vue moral : il appartient à chacun de déterminer ce qu'il fait de son capital de départ, et l'important est surtout d'assurer un bon départ. Les libéraux ne nient pas les rapports de forces économiques, mais ils nient que l'on puisse les équilibrer ou les résoudre : on peut selon eux seulement les déplacer avec une perte due à la prise en compte de critères moins pertinents du point de vue de l'allocation optimum des ressources, et sans garantir plus de « justice sociale ». Toute notion d'arbitrage est alors considérée comme un leurre.

Libéralisme néoclassique

L'école néoclassique d'économie voit dans le capitalisme une coopération générale (la concurrence poussant les acteurs à se positionner au mieux compte tenu des positions des autres) qui inclut les générations passées et futures, et un accroissement de production général qui bénéficie à tous. Une interférence du pouvoir politique ne peut que perturber le système économique et provoquer des pertes et bloquer la société.

Interventionnisme

Les interventionnistes de gauche et de droite jugent le système à ses résultats sociaux. Selon eux, le capitalisme produit des rapports entre riches et pauvres toujours plus déséquilibrés en terme de pouvoir et d'inégalités économiques, et une sclérose sociale qui nuit à l'économie générale. Il appartient alors au pouvoir politique de rétablir à la fois l'équilibre et les conditions de la prospérité générale et de développement.

Selon leur sensibilité à l'un ou l'autre aspect et leur appréciation globale de la situation, les utilitaristes préconiseront un arbitrage politique variable.

Voir aussi

Bibliographie

Liens externes



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