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Il va sans dire que Rothbard affirme que nous devrions rejeter cette "ruse stratègique" comme un contenu dont la nouvelle répartition des biens ne serait pas le résultat de « juste » moyens. Toutefois, il a omis de noter à quel point son argumentation sape ses propres demandes à ce que le capitalisme puisse être libertaire. Comme il l'affirme lui-même, pas seulement que le propriétaire du bien ait le même pouvoir de monopole sur un territoire donné que l'État, c'est plus despotique, car c'est basé sur le "droit absolu de la propriété privée" ! Et souvenez-vous, Rothbard plaide en faveur de l'"anarcho"-capitalisme ( "''si vous avez un capitalisme débridé, vous aurez tous les types d'autorité : vous aurez l'extrême autorité.''" <ref>Chomsky, Understanding Power, p. 200</ref>). Le problème fondamental est que l'idéologie de Rothbard l'aveugle sur l'évidence, à savoir que l'État et la propriété privée produisent des rapports sociaux identiques (ironiquement, il pose la théorie de l'État propriétaire de son territoire qui "''rend l'État, ainsi que le roi du Moyen-Age, le maître féodal, au moins en théorie, sont propriétaires de toutes les terres dans leurs domaine''", sans remarquer que cela rend le propriétaire ou le capitaliste, un Roi et un maître féodal au sein de l'"anarcho"-capitalisme.<ref>Op. Cit., P. 171</ref>).
 
Il va sans dire que Rothbard affirme que nous devrions rejeter cette "ruse stratègique" comme un contenu dont la nouvelle répartition des biens ne serait pas le résultat de « juste » moyens. Toutefois, il a omis de noter à quel point son argumentation sape ses propres demandes à ce que le capitalisme puisse être libertaire. Comme il l'affirme lui-même, pas seulement que le propriétaire du bien ait le même pouvoir de monopole sur un territoire donné que l'État, c'est plus despotique, car c'est basé sur le "droit absolu de la propriété privée" ! Et souvenez-vous, Rothbard plaide en faveur de l'"anarcho"-capitalisme ( "''si vous avez un capitalisme débridé, vous aurez tous les types d'autorité : vous aurez l'extrême autorité.''" <ref>Chomsky, Understanding Power, p. 200</ref>). Le problème fondamental est que l'idéologie de Rothbard l'aveugle sur l'évidence, à savoir que l'État et la propriété privée produisent des rapports sociaux identiques (ironiquement, il pose la théorie de l'État propriétaire de son territoire qui "''rend l'État, ainsi que le roi du Moyen-Age, le maître féodal, au moins en théorie, sont propriétaires de toutes les terres dans leurs domaine''", sans remarquer que cela rend le propriétaire ou le capitaliste, un Roi et un maître féodal au sein de l'"anarcho"-capitalisme.<ref>Op. Cit., P. 171</ref>).
  
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Un groupe d'anarchistes chinois a souligné l'évidence en 1914. Comme l'anarchisme "''prend opposition à l'autorité comme son principe essentiel''", les anarchistes visent à "''balayer tout les systèmes mauvais de la société actuelle qui ont un caractère autoritaire''" et que "''notre société idéale''" serait "sans propriétaires, sans capitalistes, sans dirigeants, sans fonctionnaires, sans représentants ou chefs de famille.''"<ref>Cité par Arif Dirlik, anarchisme dans la révolution chinoise, p. 131</ref> seulement cela, à l'élimination de toutes les formes de hiérarchie (politique, économique et sociale) permettrait d'atteindre anarchisme, une véritable société sans autorité (an-archie). Dans la pratique, la propriété privée est une source importante de l'oppression et d'autoritarisme au sein de la société -, il y a peu ou pas de liberté sous réserve d'un propriétaire ou au sein de la production capitaliste (comme Bakounine l'exprime «'' le travailleur vend sa personne et de sa liberté pendant un temps donné'' »). À l'opposé des anarchistes, les "anarcho"-capitalistes n'ont aucun problème avec les propriétaires et le fascisme d'usine (c'est-à-dire le travail salarié), une position qui semble très illogique pour une théorie qui se fait appeler ''libert''aire. Si elle était réellement libertaire, elle s'opposerait à toutes les formes de domination, et pas seulement à l'Étatisme («'' ceux qui rejettent l'autoritarisme, n'auront besoin de personne pour avoir la permission de respirer. Le libertaire... n'est pas reconnaissant d'obtenir la permission de résider n'importe où sur sa propre planète et il dénie le droit à quiconque d'inscrire sur tout un écran large que celle-ci est pour leur propre usage ou pour leur propre règle.'' »<ref>Stuart Christie et Albert Meltzer, Floodgates of Anarchy, p. 31</ref>). Cette position illogique et auto-contradictoire découle de la définition "anarcho"-capitaliste de la liberté comme absence de contrainte et qui sera examinée dans la section F.2 plus en détail. L'ironie, c'est que les "anarcho"-capitalistes prouvent implicitement la critique des anarchistes sur leur propre idéologie.
  
 
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Revision as of 14:53, 19 April 2008

FAQ anarchiste
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« L'anarchie c'est l'ordre moins le pouvoir »
F - L’anarcho-capitalisme est-il un type d’anarchisme ?

Introduction

F.1 - Les "anarcho"-capitalistes sont-ils vraiment des anarchistes ?


F.2 - Que signifie "liberté" pour les "anarcho"-capitalistes ?


F.2.1 - Comment la propriété privée affecte la liberté ?
F.2.2 - Les libertarians-capitalistes supportent-ils l'esclavage ?

F.3 - Pourquoi les "anarcho"-capitalistes n'attribuent-ils généralement peu ou pas de valeur à l'"égalité" ?


F.3.1 - Pourquoi la négligence vis-à-vis de l'égalité est-elle si importante ?
F.3.2 - Peut-il y avoir une harmonie des intérêts dans une société inégalitaire ?

F.4 - Quelle est la position des libertariens sur la propriété privée ?


F.4.1 - Quel est le problème avec la théorie de propriété « homesteading » ?

F.5 - Privatiser les « terrains communaux » augmentera-t-il la liberté ?


F.6 - L'"anarcho"-capitalisme est il contre l'État ?


F.6.1 - Quel est le problème avec cette justice de « libre marché » ?
F.6.2 - Quelles sont les conséquences sociales d'un tel système ?
F.6.3 - Mais sûrement que les forces du marché arrêteront l'abus des riches ?
F.6.4 - Pourquoi ces « associations de défense » sont-elles des États ?

F.7 - Comment l'histoire de l'"anarcho"-capitalisme prouve-t-elle que cette théorie n'est pas anarchiste ?


F.7.1 - Les gouvernements en concurrence sont-ils de l'anarchisme?
F.7.2 - Le gouvernement est-il compatible avec l'anarchisme ?
F.7.3 - Peut-il exister un "anarchisme" de droite ?

F.8 - Quel rôle l'État a-t-il pris dans la création du capitalisme ?


F.8.1 - Quelles sont les forces sociales derrière la montée du capitalisme ?
F.8.2 - Quel était le contexte social amenant le « laissez-faire » ?
F.8.3 - Quelles autres formes l'intervention de l'État ont-elles prises en créant le capitalisme ?
F.8.4 - Les « enclosures » ne sont-elles pas un mythe socialiste ?
F.8.5 - Que diriez-vous du manque de clôtures en Amérique ?
F.8.6 - Comment les travailleurs voient-ils l'élévation de capitalisme ?
Sommaire complet et détaillé


Catégorie:L’anarcho-capitalisme est-il un type d’anarchisme ?

En un mot, non. Tandis que les "anarcho"-capitalistes essayent évidemment de s’associer à la tradition anarchiste en employant le mot" anarcho", leurs idées sont distinctement en désaccord avec celles liées à l’anarchisme. En raison de cela, le fait qu’ils réclament que leurs idées soient anarchistes ou qu’elles fassent parties de la tradition anarchiste ou du mouvement anar, est faux.

Les "Anarcho"-capitalistes prétendent être des anarchistes parce qu’ils disent qu’ils s’opposent au gouvernement. En tant que tel, comme définit dans la dernière section (introduction de F), ils emploient une définition de l’anarchisme venant du dictionnaire. Cependant, l’anarchisme est une théorie politique, pas une définition de dictionnaire. Car les dictionnaires sont rarement des objets de connaissance politiquement sophistiquées, ceci signifie qu’ils n’identifient pas que l’anarchisme est plus (+) que juste une opposition au gouvernement, il est également marqué par une opposition au capitalisme (c.-à-d. l’exploitation et la propriété privée). Ainsi, l’opposition au gouvernement est un état nécessaire mais non suffisant pour être un anarchiste - vous devez également être opposés à l’exploitation et à la propriété privée capitaliste. Du fait que les "anarcho"-capitalistes ne considérent pas l’intérêt, la location et les bénéfices (c.-à-d. le capitalisme) comme de l'exploitation, ni ne s’opposent aux droits de propriété capitaliste, ils ne sont pas anarchistes.

Une partie du problème est que les marxistes, comme beaucoup d'universitaires, ont également tendance à affirmer que les anarchistes sont tout simplement contre l'État. Il est significatif que les deux, marxistes et "anarcho"-capitalistes, ont tendance à définir l'anarchisme comme purement une opposition au gouvernement. Ce n'est pas une coïncidence, car les deux visent à exclure l'anarchisme de sa place dans le plus vaste mouvement socialiste. Cela prend tout son sens dans la perspective marxiste, qui leur permet de présenter leur idéologie comme la seule sérieuse autour de l'anti-capitalisme (sans parler de leur association de l'anarchisme avec l'"anarcho"-capitalisme qui est un excellent moyen de discréditer nos idées dans le plus vaste mouvement radical). Il va sans dire qu'il s'agit là d'une grave et évidente déformation de la position anarchiste et d'un regard superficiel sur la théorie anarchiste, et, l'histoire montre qu'aucun anarchiste n'ont limités leur critique de la société tout simplement à l'État. Donc, même si les universitaires et les marxistes semblent conscients de l'opposition des anarchistes à l'État, ils ne parviennent pas généralement à saisir que la critique anarchiste s'applique à toutes les autres institutions sociales autoritaires et comment il s'insère dans un contexte d'analyse et de lutte anarchiste. Ils semblent penser que les condamnations anarchistes de la propriété privée capitaliste, du patriarcat et ainsi de suite, sont en quelque sorte des ajouts superflus plutôt que d'une logique qui reflète la position de base de l'anarchisme.

« Les critiques ont parfois soutenus que la pensée anarchiste, et la théorie anarchiste classique, en particulier, a insisté sur l'opposition à l'État au point de négliger la véritable hégémonie de la puissance économique. Cette interprétation se pose, peut-être, d'un dépassement simpliste et une distinction entre les anarchistes, se concentrant sur la domination politique, et les marxistes, se concentrant sur l'exploitation économique... Il existe d'abondantes preuves contre une telle thèse tout au long de l'histoire de la pensée anarchiste. »[1]

Reclus énonce simplement une évidence quand il écrit que : « la critique anti-autoritaire dans laquelle l'Etat est soumis s'applique également à toutes les institutions sociales. »[2] Proudhon, Bakounine, Kropotkine, Goldman, et ainsi de suite seraient tous d'accord avec cela. Même si ils ont tous insistés sur le fait que l'anarchisme est contre l'Etat, ils ont rapidement évolué pour présenter une critique de la propriété privée et d'autres formes de l'autorité hiérarchique. Ainsi, alors que de toute évidence l'anarchisme s'oppose à l'Etat, « la théorie anarchiste produit davantage de sophistication et de développement. Il ne s'arrête pas à une critique de l'organisation politique, mais va enquêter sur le caractère autoritaire de l'inégalité économique, de la propriété privée, de la hiérarchie des structures économiques, de l'éducation traditionnelle, de La famille patriarcale, la discrimination raciale et de classe, de la rigidité sexuelle, de l'âgisme, pour n'en citer que quelques-uns des sujets les plus importants. » L'« essence de l'anarchisme est, après tout, pas une opposition théorique à l'État, mais une lutte pratique et théorique contre la domination ».[3]

C'est également le cas avec les anarchistes individualistes dont la défense de certaines formes de propriété ne les a pas fait cesser de critiquer les principaux aspects de droits de propriété capitaliste. Comme le note Jeremy Jennings, le « point à souligner est que tous les anarchistes, et pas seulement ceux attachés à la prédominance de la souche du communisme anarchiste du XXe siècle ont été critiques à l'égard de la propriété privée dans la mesure où elle est une source de hiérarchie et de privilège. » Il ajoute que les anarchistes comme Tucker et Spooner « d'accord avec l'idée que la propriété n'est légitime que dans la mesure où elle englobe pas plus que le total des produits individuels du travail. »[4] Cela est reconnu par les clients de Rothbard lequel avait explicitement comme point que sa position sur ces sujets était fondamentalement différente (c'est-à-dire fausse) avec l'anarchisme individualiste.

À ce titre, il serait juste de dire que la plupart des "anarcho"-capitalistes sont, d'abord et avant tout, capitalistes. Si les aspects de l'anarchisme ne cadrent pas avec certains éléments du capitalisme, ils rejettent cet élément de l'anarchisme plutôt que de questionner le capitalisme (l'appropriation sélective de la tradition individualiste anarchiste par Rothbard est l'exemple le plus évident de ce point.) Cela signifie que les "libertariens" attachent le préfixe "anarcho" à leur idéologie parce qu'ils croient que le fait d'être contre l'intervention de l'Etat est l'équivalent d'être anarchiste (qui suit leur utilisation de la définition du dictionnaire de l'anarchisme). Qu'ils ignorent l'essentiel de la tradition anarchiste doit prouver qu'il n'y a pas grand-chose d'anarchique à leur sujet du tout. Ils ne sont pas contre l'autorité, la hiérarchie ou l'État -, ils veulent tout simplement les privatiser.

Paradoxalement, cette définition limitée de "l'anarchisme" assure que l'"anarcho"-capitalisme est fondamentalement réfuté par elle même. On peut le constater à partir du leader "anarcho"-capitaliste Murray Rothbard. Il a tonné contre le fléau de l'Etat, faisant valoir qu'il "s'arroge à lui-même le monopole de la force, de l'ultime pouvoir de décision, sur une zone territoriale donnée." En soi, cette définition est presque intacte. Qu'un petit nombre de personnes (une élite de dirigeants) revendique le droit de diriger les autres doit faire partie de toute définition raisonnable de l'État ou d'un gouvernement. Cependant, les problèmes commencent pour Rothbard quand il note que « de toute évidence, dans une société libre, Smith a l'ultime pouvoir de décision sur sa propre juste propriété, Jones sur la sienne, etc" [5] La contradiction logique dans cette position devrait être évidente, mais pas à Rothbard. Il montre la puissance de l'idéologie, de la capacité des simples mots (l'expression "propriété privée") pour transformer les méchants ( "ultime pouvoir de décision, dans une zone donnée") par des gentils ( "ultime pouvoir de décision au cours d'une certaine Zone").

Maintenant, cette contradiction ne peut être résolue que par une seule manière - les utilisateurs de la "zone" sont aussi ses propriétaires. En d'autres termes, un système de possession (ou « d'occupation et d'utilisation ») comme favorisé par les anarchistes. Cependant, Rothbard est un capitaliste et soutient la propriété privée, les revenus du non-travail (rente), le salariat, les capitalistes et les propriétaires. Cela signifie qu'il est favorable à une divergence entre la propriété et l'utilisation, ce qui signifie que cette "ultime pouvoir de décision" s'étend à ceux qui l'utilisent, mais ne sont pas propriétaires de ces biens (c'est-à-dire les locataires et les travailleurs). Le caractère étatique de la propriété privée est clairement indiquée par les paroles de Rothbard - le propriétaire du bien dans une société "anarcho"-capitaliste possède l'"ultime pouvoir de décision", dans une zone donnée, ce qui est aussi le droit que l'État a actuellement. Rothbard a, paradoxalement, prouvé par sa propre définition que l'"anarcho"-capitalisme n'est pas anarchiste.

Bien sûr, il serait grossier de souligner que le nom usuel d'un système politique dans lequel le propriétaire d'un territoire en est également le souverain est, en fait, la monarchie. Ce qui suggère que si l'"anarcho"-capitalisme peut être appelé "anarcho-étatisme" un bien meilleur terme pourrait être "anarcho-monarchisme". En fait, certains "anarcho"-capitalistes ont rendu explicite cette évidente implication de l'argument de Rothbard. Hans-Hermann Hoppe en est un.

Hoppe préfère la monarchie à la démocratie, estimant qu'il n'y a pas de système supérieur. Il fait valoir que le monarque est le propriétaire privé du gouvernement - toutes les terres et d'autres ressources sont détenues par lui. Se basant sur l'économie autrichienne (quoi d'autre?), et sa notion de préférence temporelle, il conclut que le monarque va donc travailler à la fois pour maximiser le revenu courant et à la valeur totale du capital de son État. En supposant que son intérêt personnel, son horizon de planification soit perspicace et à exploitation beaucoup plus limitée. La démocratie, en revanche, est une propriété exclusive du gouvernement au public et les dirigeants ont étés élus pour l'utilisation des ressources pour une courte période seulement, et non pas par leur valeur en capital. En d'autres termes, ils ne possèdent pas le pays et s'efforceront de façon à maximiser leur intérêt à court terme (et les intérêts de ceux qu'ils pensent qui les éliront dans les bureaux). En revanche, Bakounine a souligné que si l'anarchisme rejette la démocratie, c'était « difficilement pour la faire renverser, mais pour la faire avancer » en particulier afin de l'étendre par l'intermédiaire de "la grande révolution économique sans lequel tous les droits, est une phrase vide de sens et d'une astuce." Il a rejeté de tout coeur "le camp des aristocrates... Réactionnaires."[6]

Toutefois, Hoppe n'est pas un monarchiste traditionnel. Son système idéal est une monarchie de concurrents, une société qui est dirigée par une "élite naturelle volontairement reconnue - une nobilitas naturalis " composé de « familles établies de longue date avec des dossiers de réalisation supérieures, de clairvoyance, et de conduite personnelle exemplaire." C'est parce que « quelques individus acquièrent rapidement le statut d'élite » et leurs qualités intrinsèques seront « plus probablement qu'improbablement transmismes au sein de quelques - nobles - familles. ». Le seul "problème" avec les monarchies traditionnelles était « avec le monopole, et non avec les élites ou la noblesse », en d'autres termes, le roi monopolisait le rôle de juge et leurs sujets ne pouvaient s'adresser à d'autres membres de la noblesse pour des services."[7]

Ce qui confirme simplement la critique de l'anarchisme au sujet de l'"anarcho"-capitalisme, à savoir qu'il n'est pas anarchiste. Cela devient encore plus évident lorsque Hoppe élargit utilement sur la réalité de l'"anarcho"-capitalisme :

« Dans un pacte conclu entre un propriétaire et une communauté de locataires dans le but de protéger leur propriété privée, on ne peut parler qu'un droit à la liberté de parole (illimité) existe, même pas par un nombre illimité de discours sur son propriétaire-locataire. On peut dire des choses innombrables et promouvoir presque toute idée sous le soleil, mais naturellement, personne n'est autorisé à prôner des idées contraires à l'objet même de l'alliance de la préservation de la propriété privée, telles que la démocratie et le communisme. Il ne peut y avoir de tolérance envers les démocrates et les communistes dans un ordre social libertarien. Ils devront être physiquement séparés et expulsés de la société. De même, en un pacte fondé dans le but de protéger la famille et les proches, il ne peut y avoir aucune tolérance à l'égard de ceux qui habituellement promeuvent des modes de vie incompatibles avec cet objectif. Ils - les partisans de l'alternative, de la non-parentalité-familiale et d'un mode de vie centré comme, par exemple, l'hédonisme individuel, le parasitisme, et le culte de l'environnement et de la nature, l'homosexualité, ou le communisme - devront être physiquement retiré de la société, aussi, si le but consiste à maintenir un ordre libertarien. »[8]

Ainsi, le propriétaire a le pouvoir / l'autorité sur ses locataires et peut décreter ce qu'ils peuvent et ne peuvent pas faire, à l'exclusion de tous ceux qu'il considère comme étant subversifs (dans les propres intérêts des locataires , bien sûr;). En d'autres termes, les pouvoirs autocratiques du patron sont étendus à tous les aspects de la société - tous sous le masque de la liberté prôné. Malheureusement, la préservation des droits de propriété détruit la liberté pour beaucoup (Hoppe stipule clairement que pour les "anarcho"-capitalistes, le "résultat naturel des transactions volontaires entre les différents propriétaires de droits de propriété privée est décidément non égalitaire, hiérarchique et élitiste."[9]). Sans surprise, Chomsky a fait valoir que le "libertarianisme" n'a "pas d'objection à la tyrannie tant que c'est une tyrannie privé." En fait, celle-ci (comme les autres idéologies contemporaines) se "réduit à la défense des intérêts de l'une ou de l'autre forme d'autorité illégitime, très souvent une réelle tyrannie."[10]. En tant que tel, il est difficile de ne pas conclure que l'"anarcho"-capitalisme n'est guère plus qu'un jeu avec les mots. Ce n'est pas de l'anarchisme, mais un substitut intelligemment conçu et rédigé pour l'élitiste, un conservatisme autocratique. Ni qu'il soit trop difficile de conclure que les véritables anarchistes et libertaires (de tous types) ne seraient pas tolérée dans ce soi-disant « ordre social libertarien »

Certains "anarcho"-capitalistes semblent vaguement conscients de cette contradiction qui saute aux yeux. Rothbard, par exemple, présente un argument qui pourrait servir à la résoudre, mais il n'y parvient pas tout à fait. Il ignore simplement le nÅ“ud de l'affaire, que le capitalisme est basé sur la hiérarchie et, par conséquent, ne peut pas être anarchiste. Il le fait en faisant valoir que la hiérarchie associée avec le capitalisme est bien en autant que la propriété privée qui l'a produite a été acquise d'une "juste" maniére. Pourtant, ce faisant, il attire l'attention encore une fois sur l'identique entre les structures d'autorité et les relations sociales d'Etat et de propriété. Il confie :

« Si l'Etat peut être à proprement parlé propriétaire de son territoire, alors cela est bon pour lui de formuler des règles pour tous ceux qui supposent vivre dans son domaine. Il peut légitimement saisir ou contrôler des propriétés privés parce qu'il n'y a pas de propriété privée dans son domaine, puisqu'il est vraiment propriétaire de la totalité de la surface du sol. Tant que l'État permet à ses sujets de quitter son territoire, alors, on peut dire qu'il agit comme le fait n'importe quel autre propriétaire qui fixe des règles pour les personnes qui vivent sur ses biens. »[11]

Évidemment Rothbard affirme que l'État ne posséde pas "justement" son territoire. Il affirme que « notre théorie de la prescription acquisitive » de la création de la propriété privée "suffit à démolir toute prétention par l'appareil d'Etat", et ainsi le problème de l'État est que celui-ci "revendique et exerce un monopole obligatoire de la défense et, à terme, la prise de décision sur une zone plus grande qu'une propriété justement acquise par l'individu."[12] Il existe quatre problèmes fondamentaux à son argumentation.

Premièrement, ça assume sa "théorie de la prescription acquisitive" comme une théorie solide et libertaire, mais ça n'est pas non plus le cas (voir la section F.4.1). Deuxièmement, ça ignore l'histoire du capitalisme. Étant donné que la distribution actuelle de la propriété est tout autant le résultat de la violence et de la contrainte de l'État, son argument est donc gravement vicié. Elle s'élève à pas plus qu'une "immaculée conception de la propriété" sans rapport avec la réalité. Troisièmement, même si on fait abstraction de ces questions, et supposons que la propriété privée pouvait être légitime et ait été produit par les moyens que suppose Rothbard, elle ne justifie pas la hiérarchie qui lui est associé comme les générations actuelles et futures de l'humanité ont, effectivement, été excommuniés de la liberté par leurs ancêtres. Si, comme l'affirme Rothbard, la propriété est un droit naturel et la base de la liberté alors pourquoi les nombreux devraient être exclus de leurs droits par une minorité ? En d'autres termes, Rothbard conteste que la liberté doive être universelle. Il choisit la propriété au dessus de la liberté alors que les anarchistes choisissent la liberté au dessus de la propriété. Quatrièmement, ça implique que le problème fondamental de l'Etat n'est pas, comme les anarchistes ont continuellement souligné son caractère hiérarchique et autoritaire, mais plutôt le fait qu'il ne posséde pas "justement" le territoire qu'il prétend gérer.

Pire encore, la possibilité que la propriété privée puisse donner lieu à de nouvelles violations de la liberté individuelle (au moins pour les non-propriétaires) que l'état de ses citoyens a été implicitement reconnue par Rothbard. Il utilise comme exemple hypothétique, un pays dont le roi est menacé par une hausse d'un mouvement «libertarien». Le roi répondant par "l'emploi d'un astucieux stratagème", à savoir qu'il « proclame la dissolution de son gouvernement, mais juste avant de le faire, il parcellairise arbitrairement sur l'ensemble du territoire de son royaume à la 'propriété' de lui-même et de ses proches ». Plutôt que des taxes, ses sujets maintenant payent un loyer et il peut « réglementer la vie de tous les gens qui vivent sur la présomption de » ses biens comme bon lui semble. Rothbard demande alors :

« Alors, quelle devrait être la réponse des rebelles libertariens devant ce défi expert ? Si ils sont de consistant utilitaristes, ils doivent se plier à ce subterfuge, et se résigner à vivre sous un régime, non moins despotique que celui qu'ils avaient combattus pendant si longtemps. Peut-être, d'ailleurs, plus despotique, pour l'instant le roi et ses proches peuvent réclamer pour eux-mêmes les principes libertariens du droit absolu de la propriété privée, un absolu qu'ils n'avaient peut-être pas osé réclamer avant. »[13]

Il va sans dire que Rothbard affirme que nous devrions rejeter cette "ruse stratègique" comme un contenu dont la nouvelle répartition des biens ne serait pas le résultat de « juste » moyens. Toutefois, il a omis de noter à quel point son argumentation sape ses propres demandes à ce que le capitalisme puisse être libertaire. Comme il l'affirme lui-même, pas seulement que le propriétaire du bien ait le même pouvoir de monopole sur un territoire donné que l'État, c'est plus despotique, car c'est basé sur le "droit absolu de la propriété privée" ! Et souvenez-vous, Rothbard plaide en faveur de l'"anarcho"-capitalisme ( "si vous avez un capitalisme débridé, vous aurez tous les types d'autorité : vous aurez l'extrême autorité." [14]). Le problème fondamental est que l'idéologie de Rothbard l'aveugle sur l'évidence, à savoir que l'État et la propriété privée produisent des rapports sociaux identiques (ironiquement, il pose la théorie de l'État propriétaire de son territoire qui "rend l'État, ainsi que le roi du Moyen-Age, le maître féodal, au moins en théorie, sont propriétaires de toutes les terres dans leurs domaine", sans remarquer que cela rend le propriétaire ou le capitaliste, un Roi et un maître féodal au sein de l'"anarcho"-capitalisme.[15]).

Un groupe d'anarchistes chinois a souligné l'évidence en 1914. Comme l'anarchisme "prend opposition à l'autorité comme son principe essentiel", les anarchistes visent à "balayer tout les systèmes mauvais de la société actuelle qui ont un caractère autoritaire" et que "notre société idéale" serait "sans propriétaires, sans capitalistes, sans dirigeants, sans fonctionnaires, sans représentants ou chefs de famille."[16] seulement cela, à l'élimination de toutes les formes de hiérarchie (politique, économique et sociale) permettrait d'atteindre anarchisme, une véritable société sans autorité (an-archie). Dans la pratique, la propriété privée est une source importante de l'oppression et d'autoritarisme au sein de la société -, il y a peu ou pas de liberté sous réserve d'un propriétaire ou au sein de la production capitaliste (comme Bakounine l'exprime « le travailleur vend sa personne et de sa liberté pendant un temps donné »). À l'opposé des anarchistes, les "anarcho"-capitalistes n'ont aucun problème avec les propriétaires et le fascisme d'usine (c'est-à-dire le travail salarié), une position qui semble très illogique pour une théorie qui se fait appeler libertaire. Si elle était réellement libertaire, elle s'opposerait à toutes les formes de domination, et pas seulement à l'Étatisme (« ceux qui rejettent l'autoritarisme, n'auront besoin de personne pour avoir la permission de respirer. Le libertaire... n'est pas reconnaissant d'obtenir la permission de résider n'importe où sur sa propre planète et il dénie le droit à quiconque d'inscrire sur tout un écran large que celle-ci est pour leur propre usage ou pour leur propre règle. »[17]). Cette position illogique et auto-contradictoire découle de la définition "anarcho"-capitaliste de la liberté comme absence de contrainte et qui sera examinée dans la section F.2 plus en détail. L'ironie, c'est que les "anarcho"-capitalistes prouvent implicitement la critique des anarchistes sur leur propre idéologie.


De quelles manières les "anarcho"-capitalistes diffèrent-ils des anarchistes ?

Elles sont de trois sortes :

  • Premièrement, à la différence des anarchistes individualistes et socialistes, les "anarcho"-capitalistes soutiennent le capitalisme (un type de "marché libre" capitaliste pur). Ceci signifie qu’ils rejettent totalement les idées des anarchistes quant à la propriété et à l’analyse économique. Par exemple, comme tous les défenseurs capitalistes, ils considèrent le loyer, le profit et l’intéret en tant que revenus valides. En revanche, tous les anarchistes considèrent ces derniers comme exploitation et approuvent Tucker (anarchiste individualiste) lorsque celui-ci dit que "Quiconque contribue à la production est seul à pouvoir prétendre à des droits. "Ce" n’a pas de droits, faisant que, "Qui" doit être respecté. "Ce" est une chose. "Qui" est une personne. Les choses n’ont pas de prétentions ; elles n’existent que pour être réclamées. La possession d’un droit ne peut pas être déduit à partir d’une matière inerte, mais en fonction d’une personne vivante." [cité par Wm. Gary Kline, les anarchistes individualiste, P. 73] (et cela, nous devons le noter, est la critique fondamentale de la théorie capitaliste pour qui le capital est productif. De l’intérieur et par eux-mêmes, les coûts fixes ne créent pas de valeur. Ou plutôt, la valeur est la création dépendant de la façon dont des investissements sont développés et employés une fois en place. Pour cette raison les anarchistes individualistes considérent le revenu d’usure un dérivé du non-travail, ceci à la différence des "anarcho"-capitalistes).

De même, les anarchistes rejettent la notion de propriété capitaliste en faveur de la possession (incluant les pleins fruits de son travail). Par exemple, les anarchistes rejettent la propriété privée de la terre en faveur d’un régime d’"occupation et d’usage". En cela nous suivons Proudhon dans Qu’est ce que la propriété ? et notant du fait que "la propriété c’est le vol".

Comme ces idées sont une part essentielle de la politique d’anarchiste, elles ne peuvent pas être enlevées sans endommager sérieusement le reste de la théorie. Ceci peut être vu par les commentaires de Tucker pour qui "la liberté insiste.. . [ sur ] l’abolition de l’État et de l’abolition de l’usure ; sur plus de gouvernement de l’homme par l’homme, et plus d’exploitation de l’homme par l’homme."[cité par Eunice Schuster dans l’anarchisme indigène américain, P. 140]. Il indique que l’anarchisme a des idées politiques et économiques spécifiques, qu’il s’oppose au capitalisme qu’avec l’État. Par conséquent, l’anarchisme n’a jamais été purement un concept "politique", mais a toujours combiné une opposition à l’oppression ainsi qu’une opposition à l’exploitation. Les anarchistes socialistes ont fait exactement la même remarque. Ce qui signifie en cela que quand Tucker discute cela par "la Liberté insiste sur le socialisme. . - socialisme vrai, socialisme Anarchiste : la prédominance sur terre de la liberté, de l’égalité, et de la Solidarité" [à l’intérieur d’un livre, P. 363] il sait exactement ce qu’il disait et l’exprimait de tout son coeur.

Cette combinaison du politique et de l’économique est essentielle, car ils se renforcent mutuellement. Sans idées économiques, les idées politiques seraient sans signification, et le déséquilibre inégal ferait d’elles une conception stupide. Comme note Kline, les propositions des anarchistes individualistes "ont été conçues pour établir une vraie égalité des possibilitées... et ils ont prévu que ceci aurait comme conséquence une société sans grande richesse ou pauvreté. En l’absence des facteurs monopolistiques qui fausseraient la concurrence, ils se sont attendus à une société en grande partie des ouvriers indépendants sans la disparité significative de la richesse entre n’importe lequel d’entre elles puisque tous seraient requis de vivre à leurs propres frais et pas aux dépens du camarade/être humain exploité."[Op CIT, les pp 103-104 ]

En enlevant l’engagement fondamental de supprimer le revenu du non-travail, n’importe quelle société "anarchiste" capitaliste aménerait de vastes différences dans la richesse, ainsi que dans les rapports politiques. Au lieu d’un gouvernement imposé, des monopoles sur la terre, l’argent et ainsi de suite, le pouvoir économique découlant de la propriété privée et le capital s’assureraient que la majorité est demeurée dans (pour employer les mots de Spooner) "à l’état de domestiques" (voir section F.2 et F.3.1 pour davantage sur ce sujet). Les anarchistes individualiste se rendaient compte de ce danger et soutenaient une opposition à ces idées économiques d’usure (c.-à-d. loyer, bénéfice et intérêt), afin d’assurer à l’ouvrier la pleine valeur de son travail. Tandis que parmi eux certains appelaient ces idées de "socialiste", il est clair que ces idées sont socialistes de par la nature et dans le but de ces idées (De même, pas tous les anarchistes individualiste se sont appelés anarchistes, mais leurs idées sont clairement anarchistes en nature et dans le but).

Puisque les "anarcho"-capitalistes embrassent le capitalisme et rejettent le socialisme, ils ne peuvent donc pas être considérés anarchistes, ni faisant partie de la tradition anarchiste.

  • Ce qui nous apporte bien au deuxième point, à savoir un manque de souci pour l’égalité. Par un rigide contraste des anarchistes de toutes les tendances, l’inégalité n’est pas vue pour être un problème pour les "anarcho"-capitalistes (voir la section F.3). Cependant, c’est un truisme que tous les "commerçants" ne soient pas sujets de maniére égale au marché (c.-à-d. avoir le même pouvoir de marché). Dans beaucoup de cas, quelques-uns ont le controle suffisant des ressources afin d’influencer ou de déterminer le prix et dans ces cas-ci, tous les autres doivent se soumettre à ces limites ou ne pas acheter le produit. Quand le produit est un pouvoir de travail, même cette option manque - les ouvriers doivent accepter un travail afin de vivre. Comme nous discutons dans la section F.10.2, les ouvriers sont habituellement dans une position défavorable sur le marché du travail, à la différence des capitalistes, et ceci les forcent à vendre leur liberté en échange, permettant des bénéfices pour d’autres. L’inégalité d’augmentation de ces bénéfices dans la société en tant que propriétaires reçoivent la valeur en surplus produit par les ouvriers. Ceci augmente l’autre inégalité, consolidant la puissance du marché et ainsi affaiblit la position de négociation des autres ouvriers, s’assurant que même la plus libre concurrence possible ne pourrait pas éliminer la pouvoir de la société de classe (quelque chose, selon B. Tucker, identifié comme se produisant avec le développement de la confiance dans le capitalisme - voir la section G.4). Peu se demandent ce que Proudhon disait du fait que la loi de l’offre et de la demande était "une loi trompeuse... approprié seulement à assurer la victoire du fort au-dessus du faible, de ceux qui possèdent l’excédent de propriété sur ceux qui possèdent rien."[cité par Alan Ritter, "de la pensée politique de Pierre-Joseph Proudhon", P. 121]

Le travail salarié est une manière principale de créer, de maintenir et d’augmenter l’inégalité (aussi bien qu’être une source de domination et de subordination, c.-à-d. de non liberté). Inutile de dire, que les inégalités de pouvoirs et de richesses ne se limitent pas seulement aux lieux de travail, ni que les dommages de la hiérarchie sur les individus et de leur liberté limitée aux heures de travail. Tous les deux ont un impact profond sur le reste de la société, augmentant dans toutes les aires de la vie et limitant partout la liberté (voir la section F.3 pour une discussion sur ce sujet). Vous ne pouvez pas isoler un aspect de la vie (c.-à-d. ici, le travail) et croire qu’il n’affectera pas de façon ou d’une autre tous les autres. Cependant, l’"anarcho"-capitaliste semble croire que vous le pouvez.

Par conséquent, les anarchistes identifient que "l’échange libre" dans des circonstances inégales augmentera l’inégalité entre les individus et les classes, sans le réduire (et que l’inégalité produira les rapports sociaux qui sont basés sur la hiérarchie et la domination, et non la liberté). Comme Noam Chomsky disait :

l’"Anarcho-capitalisme, à mon avis, est un système doctrinal qui, si jamais il était mis en application, mènerait aux formes de tyrannie et d’oppression qui ont peu de contre-parties dans l’histoire humaine. Il n’y a pas la plus légère possibilité que ces (de mon point de vue, affreuse) idées soient mises en application, parce qu’elles détruiraient rapidement n’importe quelle société qui aurait fait cette erreur colossale. L’idée du ’contrat libre’ entre le potentat et son sujet affamé est une plaisanterie difficile, peut-être une valeur pour quelques moments dans une conférence universitaire explorant les conséquences (de mon point de vue, absurdes) de ces idées, mais nulle part ailleurs." [Noam Chomsky sur l’anarchisme, entrevue avec Tom Lane, 23 décembre, 1996]

En raison des effets mauvais de l’inégalité sur la liberté, les anarchistes sociaux et individualistes ont désiré créer un environnement dans lequel les circonstances ne conduiraient pas des personnes à la vente de leur liberté à d’autres en échange de salaires. En d’autres termes, ils ont désirés une égalisation du pouvoir du marché en s’opposant à l’intérêt, au loyer et au bénéfice et les définitions capitalistes de la propriété privée. Kline récapitule ceci en disant "[les anarchistes américains individualiste] a exposé la tension existant dans la pensée libérale entre la propriété privée et l’idéal de l’égalité d’accès. Les différents anarchistes se rendaient, au moins, compte que les conditions existantes étaient loin d’être idéal, que le système lui-même fonctionnant contre une majorité d’individus dans leurs efforts d’atteindre ses promesses. Le manque de capital, de moyens de création et d’accumulation de la richesse, ont habituellement condamné le travailleur à une vie d’exploitation. Ceci les anarchistes le savent et ils rejéttent un tel systeme."[Op.CIT, le P. 102]

Ce désir pour l’égalité de négociation est reflété dans leurs idées économiques et en enlevant ces idées économiques fondamentales des anarchistes individualiste, l’"anarcho"-capitalisme fait une moquerie de toutes les idées qu’elles s’approprient. Essentiellement, les anarchistes individualiste étaient d’accord avec Rousseau qu’afin d’empêcher l’inégalité extrême des fortunes vous devez en premier lieu priver des personnes des moyens de s’accumuler et ne pas emporter la richesse des riches. Un point important que l’"anarcho"-capitalisme feint de comprendre ou n’apprécie pas.

En outre, nous devons noter que de telles inégalités dans le pouvoir et la richesse auront besoin d’être "défendues" par ceux sujet à elles (les "anarcho"-capitalistes reconnaissent le besoin de la police et des cours privées de "justice" pour défendre la propriété du vol - et, les anarchistes ajoutent, pour défendre le vol et le despotisme liés à la propriété !). En raison de son appui à la propriété privée (et à l’autorité), l’"anarcho"-capitalisme en finit par maintenir un État dans son " anarchie " ; à savoir un État privée dont l’existence que ses partisans essayent de nier simplement en refusant de l’appeler un État, comme une autruche cachant sa tête dans le sable (voir la section F.6 pour plus sur ceci et pourquoi l’"anarcho"-capitalisme est mieux décrit en tant que "capitalisme d’État privé").

Pour les anarchistes, ce besoin de capitalisme d’un certain genre d’État n’est pas surprenant, parce que :

"l’Anarchie sans Socialisme nous semble également aussi impossible [que Socialisme sans Anarchie], parce que en ce cas il ne pourrait pas être autre chose que la domination du plus fort, et mettrait donc en marche tout de suite l’organisation et la consolidation de cette domination ; c’est à dire la constitution d’un gouvernement." [Errico Malatesta, la vie et les idées, le P. 148]

Pour cette raison, le rejet par les "anarcho"-capitaliste des idées anarchistes sur la science économique de la propriété capitaliste et le besoin d’égalité, elles ne peuvent donc pas être considérés anarchistes ou faisant partie de la tradition anarchiste.

  • Troisièmement, à la différence des anarchistes, les "anarcho"-capitalistes considèrent une société généralisé par le travail salarié en tant que libre et non-exploitative - mais une telle société en est opposée pour les anarchistes. Comme tous les socialistes, les anarchistes désirent voir les ouvriers unis avec les moyens de production qu’ils utilisent et en finir ainsi avec l’exploitation des ouvriers par des capitalistes et des propriétaires. En d’autres termes, quand les différents anarchistes se sont appelés des "socialistes" ils ont voulus dire ceci ! (voir la section G pour plus de détails sur ce sujet).

Si nous regardons le travail de l’anarchiste individualiste Lysander Spooner, nous constatons qu’il a considéré le capitalisme avoir comme conséquence sur le devenir des travailleurs que "les seuls outils et machines dans les mains des employeurs" de leur travail "est seulement au profit de leur employeurs" [Lettre à Grover Cleveland, p. 50 ] il considérait le monopole d’argent (une combinaison d’argent des produits d’espèce et un impôt de 10% sur les banques non-enregistrées) comme "le grand obstacle à la libération de la classe travailleuse partout dans le monde", un monopole créé par "les employeurs du travail salarié" pour assurer la nécessité qui a contraint le grand corps des producteurs de richesse par l’alternative de la famine - vendre leur travail aux monopolistes d’argent [Op. CIT, p. 49, p. 48, P. 20]

Une telle analyse est essentiellement socialiste par nature, identifiant que l’apparente "liberté" des marchés créent les conditions qui conduisent des personnes de la classe ouvrière à la vente de leur liberté sur le marché. De même, sa vision d’une société libre est également socialiste, par plus de travail salarié. Avec la fin des monopoles d’argent (et des terres), il a considéré que "avec peu ou sans aucune exceptions" Les travailleurs cesseraient d’être des esclaves du salariat et deviendrait les ouvriers indépendants. En contraste rigide avec le travail salarié, il a considéré que le travail libre applique le travailleur "à faire participer les deux... sa tête et ses mains" [Op. CIT, p. 48, P. 50]. Ainsi Spooner reconnait que sous le travail salarié, il y a une division du travail, avec quelques uns qui emploient leurs têtes (donnent des ordres) et les nombreuses autres utilisant leurs mains (suivent les ordres).

"leur engagement, comme ils l’étaient pour l’égalité dans la recherche de la propriété," dit Kline, "l’objectif pour l’anarchiste est devenu la construction d’une société fournissant l’égalité d’accès à ces choses nécessaires pour créer la richesse. Le but des anarchistes qui exprimaient le mutualisme et l’abolition de tous les monopoles, était, alors, une société, où chacun voulant travailler, aurait les outils et les matières premières nécessaires pour la production dans un système sans exploitation. vision dominante de la future société... [qui était] soutenu par différent travailleurs indépendant."[Op. CIT, P. 95]

Les "anarcho"-capitalistes supposent que le travail salarié généralisé, demeurerait sous leur système (tandis que le paiement du LIP-service aux possibilités de co-operatives - et si un "anarcho"-capitaliste pense que la co-operative deviendra la forme dominante d’organisation du lieu de travail, alors ils sont en quelque sorte d’un certain genre de socialisme de marché, et non capitaliste). Il est clair que leur point final (un capitalisme "pur", c.-à-d. le travail généralisé en salariat) est directement l’opposé de ce qui est désiré par les anarchistes. C’était le cas des anarchistes individualiste qui ont embrassé l’idéal (non-capitaliste) de la concurrence du "laisser faire" - ils faisaient cela, comme noté plus haut, pour en finir avec le salariat et l’usure, non pour les maintenir (en effet, leur analyse du changement de la société américaine pour un principe de producteurs indépendants au contraire de l’autre basé principalement sur le travail salarié, a beaucoup de parallèles avec les personnes, que Karl Marx présentait au chapitre 33 du "capital").

les "Anarcho"-capitalistes, en revanche, croient qu’il est préférable que les lieux de travail restent hiérarchiques (c.-à-d. capitaliste) même si l’État public a été dissous et que c’est sans souci. Cette croyance indique la priorité de leurs valeurs : l’"efficacité" (le résultat inférieur) est considérée plus importante que l’élimination de la domination, de la coercition, et de l’exploitation des ouvriers. De même, ils considèrent que les bénéfices, intérêts et loyers en tant que sources de revenu comme valides, tandis que les anarchistes s’opposent à ces derniers comme usure et exploitation.

D’ailleurs, dans la pratique, le travail salarié est une source importante d’oppression et d’autoritarisme dans la société - il y a peu ou pas de liberté dans la production capitaliste (comme Bakounine disait, "l’ouvrier vend sa personne et sa liberté pendant un temps donné"). Ainsi, au contraire des anarchistes, les "anarcho"-capitalistes n’ont aucun problème avec le fascisme d’usine (c.-à-d. du travail salarié), une position qui semble fortement illogique pour une théorie s’appellant "libertarian". Si elle était vraiment libertaire, elle s’opposerait à toutes les formes de domination, et pas simplement à l’Étatisme. Cette position découle de la définition "anarcho"-capitaliste de liberté, comme absence de coercition (cela sera discutée dans la section F.2 plus en détail).

Ce soutien sincère des droits de propriété et du travail salarié indique que les "anarcho"-capitalistes ne sont pas des anarchistes, parce qu’ils ne rejettent pas toutes les formes d’autorités. Ils soutiennent évidemment la hiérarchie entre le patron et l’ouvrier (travail salarié) et entre le propriétaire et le locataire (loyer). L’anarchisme, par définition, est contre toutes les formes d’autorité, y compris la hiérarchie produite par la propriété capitaliste. Ignorer l’évidente association de l’autorité avec la propriété capitaliste est fortement illogique.

La nature anti-anarchiste de l’"anarcho"-capitalisme peut mieux être comprise en citant un penseur "anarcho"-capitaliste, tel Murray Rothbard. Il discute, que l’État "s’arroge à lui-même le monopole de la force, du pouvoir final de prise de décision, au-dessus d’un secteur territorial donné." [Rothbard territorial, l’éthique de la liberté, p. 170 ] De et par elle même, cette définition est intouchable. Malheureusement pour lui (et des "anarcho"-capitalistes se réclament d’être anarchiste), il note également que les propriétaires capitaliste ont des pouvoirs semblables. Pourtant il énonce, "[cependant], dans une société libre, Smith a l’ultime pouvoir de prise de décision juste sur ses propres propriétés, Jones au-dessus des siennes, etc."[Op. Le CIT, le P. 173] et, également évidemment, cette ultime pouvoir de prise de décision se prolonge à ceux qui utilisent, mais ne possède pas, une telle propriété (c.-à-d. des locataires et des ouvriers). La nature Étatiste de la propriété est clairement indiquée par les mots de Rothbard - le propriétaire dans une société d’"anarcho"-capitaliste possède l’ultime pouvoir de prise de décision pour un secteur donné, c’est également ce que l’État a actuellement.

Comme nous en discutons plus de profondeur dans la section F.2, l’"anarcho"-capitalisme ne peut pas être considéré comme anarchiste, simplement parce qu’ils remplacent l’autorité de l’État par celle du propriétaire. Tous les deux ont "le pouvoir" ultime de prise de décision sur un secteur (une propriété) et ainsi que sur ceux qui vivent (ou utilisent) dans ce secteur. Les similitudes entre le capitalisme et l’Étatisme sont claires - et ainsi pourquoi l’"anarcho"-capitalisme ne peut pas être anarchiste. Rejeter l’autorité ("la puissance ultime de prise de décision") de l’État et embrasser celle du propriétaire indique non seulement une position fortement illogique mais une position en désaccord avec les principes de base de l’anarchisme.

Ainsi l’anarchisme est bien davantage que la définition commune du dictionnaire de "sans gouvernement" — il nécessite également d’être contre toutes les formes d’autorité, y compris celles produites par la propriété capitaliste. C’est clair par les racines du mot "anarchie". Comme nous avons noté dans la section A.1, le mot anarchie signifie "aucune régle intangible" ou "contraire à l’autorité ". Car Rothbard lui-même reconnaît, que le propriétaire est la règle de leur propriété et, en conséquence, de ceux qui l’utilisent (aynt pour conséquence ce que Bakounine disait au-dessus "l’ouvrier vend sa personne et sa liberté pendant un temps donné"). L’"Anarcho"-capitalisme pour cette raison ne peut pas être considéré comme une forme d’anarchisme - un vrai anarchiste doit logiquement s’opposer à l’autorité du propriétaire autant qu’à celle de l’État.

Puisque l’"anarcho"-capitalisme explicitement (ou implicitement, de son contenu) ne réclame pas les arrangements économiques qui aboliront le travail salarié et l’usure, il ne peut pas être considéré anarchiste ou ni faisant partie de la tradition anarchiste.

Pour conclure.

Des théories politiques devraient être identifiées par leur caractéristique et de par leur histoire réelle, plutôt que par des étiquettes (facile à apposer). Une fois que nous identifions cela, nous découvrons bientôt que l’"anarcho"-capitalisme est un oxymoron. Les anarchistes et les "anarcho"-capitalistes ne sont pas une partie du même mouvement ou tradition. Leurs idées et leurs objectifs sont en opposition directe à toutes les sortes d’anarchistes. Tandis que les anarchistes se sont toujours opposés au capitalisme, les "anarcho"-capitalistes l’ont embrassé. Et en raison de l’embrassé, leur "anarchie" sera marqué par des différences étendues dans la richesse et le pouvoir, les différences qui augmenteront dans les rapports basés sur la subordination et la hiérarchie (tel que le travail salarié), pas la liberté (peu se demande quand Proudhon a noté du fait que la "propriété est despotique" — qu’elle crée des rapports autoritaires et hiérarchiques entre les personnes d’une manière semblable que l’Étatisme).

Leur soutien au capitalisme de "marché libre" ignore l’impact de la richesse et du pouvoir sur la nature et les résultats des décisionhs individuelles dans le marché (voir de discussion des sections F.2 et F.3 pour davantage d’élèments). Par exemple, comme nous indiquons dans les sections J.5.10, J.5.11 et J.5.12, le travail salarié est moins efficace que l’auto-gestion dans la production mais cela en raison de la structure et de la dynamique du marché capitaliste, les "forces du marché" décourageront activement l’auto-gestion due à son nature autoritaire pour les ouvriers. En d’autres termes, un capitalisme de marché développé favorisera la hiérarchie et la non liberté dans la production malgré ses effets sur différents ouvriers et leur volonté (voir également la section F.10.2). Ainsi le capitalisme de "marché libre" tend à re-imposer des inégalités de richesse et de pouvoir, et non à les éliminer.

En outre, un tel système de pouvoir (économique et sociale) exigera une force étendue pour le maintenir et le systéme de concurrence "anarcho"-capitaliste" des "firmes de défense" sera simplement un nouvel État, imposant le pouvoir du capitaliste, les droits de propriété et sa loi.

De façon générale, le manque de souci pour la liberté signicative dans la production et les effets de vastes différences dans le pouvoir et la richesse dans les sociétés dans son ensemble rend l’"anarcho"-capitalisme pas meilleur que "l’anarchisme pour les riches". Emma Goldman a reconnu ceci quand elle a noté du fait que "’l’individualisme raboteux a signifié tout l’individualisme pour les maîtres... quand ce qu’on nomme tyrannie politique et oppression sociale sont défendues et mises comme vertus tandis que chaque aspiration et tentative de l’homme de gagner la liberté... est dénoncé comme... le mal nommé de même individualisme." [Emma la rouge, paroles, de P. 112] et, en tant que tels, n’est pas de l’anarchisme du tout.

Ainsi, à la différence des anarchistes, les "anarcho"-capitalistes ne cherchent pas "l’abolition du prolétariat" (expression utilisé par Proudhon) par l’intermédiaire du changement des droits de propriété capitaliste et des institutions. Ainsi l’"anarcho"-capitaliste et l’anarchiste ont différentes positions au départ et des buts opposés à l’esprit et ainsi ils ne peuvent pas être considérés comme partie de la même tradition (anarchiste).

Nous discutons plus loin dans les sections postérieures, les réclamations des "anarcho"-capitalistes d’être des anarchistes sont fausses simplement parce qu’elles rejettent tellement la tradition anarchiste quant à ce qu’elles acceptent de non-anarchiste dans leur théorie et leur pratique. Peu se demandent quand Peter Marshall dit que "peu d’anarchistes accepteraient les "anarcho"-capitalistes dans le camp anarchiste puisqu’ils ne partagent pas un souci pour l’égalité économique et la justice sociale." [Demandant l’impossible, p. 565 ]

Notes et références

  1. John P. Clark and Camille Martin, Anarchy, Geography, Modernity, p. 95
  2. Cité par Clark et Martin, op. Cit., P. 140
  3. John Clark, The Anarchist Moment, p. P. 128 et 70
  4. "Anarchisme", Contemporary Political Ideologies, Roger Eatwell et Anthony Wright (eds.), p. 132
  5. The Ethics of Liberty, p. P. 170 et 173
  6. The Basic Bakounine, p. 87
  7. L'Économie politique de la monarchie et la démocratie et l'idée d'un Ordre naturel", pp. 94-121, Journal of Libertarian Studies, vol. 11, no. 2, p. P. 118 et 119
  8. Democracy: the God that Failed, p. 218
  9. " L'Économie politique de la monarchie et la démocratie et l'idée d'un Ordre naturel ", op. Cit., P. 118
  10. Chomsky sur l'anarchisme, p. P. 235 et 181
  11. Op. Cit., p. 170
  12. Op. Cit., P. P. 171 et 173
  13. Op. Cit., P. 54
  14. Chomsky, Understanding Power, p. 200
  15. Op. Cit., P. 171
  16. Cité par Arif Dirlik, anarchisme dans la révolution chinoise, p. 131
  17. Stuart Christie et Albert Meltzer, Floodgates of Anarchy, p. 31

F.1.1 - Ne pas renoncer à la hierarchie : le talon d’Achilles des libertariens et des "anarcho"-capitalistes ?

F.1.2 - A quel point la théorie libertarienne est-elle libertaire ?

F.1.3 - La théorie libertarienne est-elle scientifique par nature ?