La Conquête du pain

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La Conquête du pain
De Pierre Kropotkine


LA CONQUÊTE DU PAIN

  1. Nos richesses
  2. L'aisance pour tous
  3. Le communisme anarchiste
  4. L'expropriation
  5. Les denrées
  6. Le logement
  7. Le vêtement
  8. Les voies et moyens
  9. Les besoins de luxe
  10. Le travail agréable
  11. La libre entente
  12. Objections
  13. Le salariat collectiviste
  14. Consommation et production
  15. Division du travail
  16. La décentralisation
  17. L'agriculture
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Nos richesses : I

L'humanité a fait un bout de chemin depuis ces âges reculés durant lesquels l'homme, façonnant en silex des outils rudimentaires, vivait des hasards de la chasse et ne laissait pour tout héritage à ses enfants qu'un abri sous les rochers, que de pauvres ustensiles en pie - et la Nature, immense, incomprise, terrible, avec laquelle ils devaient entrer en lutte pour maintenir leur chétive existence.

Pendant cette période troublée qui a duré des milliers et des milliers d'années, le genre humain a cependant accumulé des trésors inouïs. Il a défriché le sol, desséché les marais, percé les forêts, tracé des routes ; bâti, inventé, observé, raisonné ; créé un outillage compliqué, arraché ses secrets à la Nature, dompté la vapeur; si bien qu'à sa naissance l'enfant de l'homme civilisé trouve aujourd'hui à son service tout un capital immense, accumulé par ceux qui l'ont précédé. Et ce capital lui permet maintenant d'obtenir, rien que par son travail, combiné avec celui des autres, des richesses dépassant les rêves des Orientaux dans leurs contes des Mille et une Nuits.

Le sol est, en partie, défriché, prêt à recevoir le labour intelligent et les semences choisies, à se parer de luxuriantes récoltes - plus qu'il n'en faut pour satisfaire tous les besoins de l'humanité. Les moyens de culture sont connus.

Sur le sol vierge des prairies de l'Amérique, cent hommes aidés de machines puissantes produisent en quelques mois le blé nécessaire pour la vie de dix mille personnes pendant toute une année. Là où l'homme veut doubler, tripler, centupler son rapport il fait le sol, donne à chaque plante les soins qui lui conviennent et obtient des récoltes prodigieuses. Et tandis que le chasseur devait s'emparer autrefois de cent kilomètres carrés pour y trouver la nourriture de sa famille, le civilisé fait croître, avec infiniment moins de peine et plus de sûreté, tout ce qu'il lui faut pour faire vivre les siens sur une dix millième partie de cet espace.

Le climat n'est plus un obstacle. Quand le soleil manque, l'homme le remplace par la chaleur artificielle, en attendant qu'il fasse aussi la lumière pour activer la végétation. Avec du verre et des conduits d'eau chaude, il récolte sur un espace donné dix fois plus de produits qu'il n'en obtenait auparavant.

Les prodiges accomplis dans l'industrie sont encore plus frappants. Avec ces êtres intelligents, les machines modernes, - fruit de trois ou quatre générations d'inventeurs, la plupart inconnus, - cent hommes fabriquent de quoi vêtir dix mille hommes pendant deux ans. Dans les mines de charbon bien organisées, cent hommes extraient chaque année de quoi chauffé dix mille familles sous un ciel rigoureux. Et l'on a vu dernièrement toute une cité merveilleuse surgir en quelques mois au Champ de Mars, sans qu'il y ait eu la moindre interruption dans les travaux réguliers de la nation française.

Et si, dans l'industrie comme dans l'agriculture, comme dans l'ensemble de notre organisation sociale, le labeur de nos ancêtres ne profite surtout qu'au très petit nombre, - il n'en est pas moins certain que l'humanité pourrait déjà se donner une existence de richesse et de luxe, rien qu'avec les serviteurs de fer et d'acier qu'elle possède.

Oui certes, nous sommes riches, infiniment plus que nous ne le pensons. Riches par ce que nous possédons déjà ; encore plus riches par ce que nous pouvons produire avec l'outillage actuel. Infiniment plus riches par ce que nous pourrions obtenir de notre sol, de nos manufactures, de notre science et de notre savoir technique, s'ils étaient appliqués à procurer le bien-être de tous.


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