Individualisme aristocratique
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Catégorie:Ébauches L'individualisme aristocratique (ou élitiste) est un type d'individualisme qui se caractérise par la volonté d'élever l'individu au-dessus de lui-même en le rendant digne de sa liberté. Principalement représenté par Friedrich Nietzsche, Georges Palante et Michel Onfray, et par tout un courant nommé de nietzschéisme de gauche, cet individualisme uniciste préconise une affirmation intense et complète du moi, qui doit conduire à l'épanouissement d'un individu supérieur à l'homme du troupeau. Par le libre développement de ses facultés, l'individu fort est appelé à devenir un homme supérieur.
L'individu aristocratique[edit]
L'individu prôné par Nietzsche et Palante n'est ni le sujet cartésien, ni la personne kantienne mais plutôt un centre de volonté de puissance.
La volonté de puissance[edit]
Nietzsche rejette le primat de la conscience et de la raison qui se trouve à la base de la philosophie occidentale. Pour lui, la conscience n'est que la traduction en termes grégaires de ce que nous sommes réellement. Le rationalisme de Descartes est donc pour lui une illusion : les forces qui agissent en l'individu et qui motivent ses actions ne sont pas conscientes. Il s'agit plutôt d'instincts, de pulsions qui luttent en son sein et qui lui donnent son énergie.
Ces pulsions tirent leur sens et leur unité de la volonté de puissance, qui tend à diriger les instincts de l'individu vers un accroissement de force et de puissance. Le concept de volonté de puissance de Nietzsche a souvent été mal interprété elle n'est pas volonté de dominer autrui, ni de se dominer soi-même (comme le proposent les stoïciens). Elle est plutôt pour l'individu la volonté de se surpasser soi-même, en laissant jouer librement ses instincts les plus forts et sans chercher à les soumettre à sa raison ou se laisser berner par la clarté illusoire de sa conscience.
Ainsi, Nietzsche traite souvent l'individu ou le sujet dans son oeuvre d'illusion. Il rejette ainsi le sujet conscient de Descartes et la personne kantienne mais non l'individu en tant que tel, qu'il défini comme un centre de volonté de puissance et considère comme source de valeurs positives.
La volonté de puissance est le chemin même de l’implacable loi de la nature de la vie qui vise à l’expansion de l'être humain vers les plus hautes sphères de la vie et apporte ainsi le surhomme.
L'égoïsme aristocratique[edit]
L'égoïsme est un concept central dans la pensée de Nietzsche comme celle de Stirner. Par contre, ces deux penseurs abordent l'égoïsme de façon très différente. Pour Nietzsche, l'égoïsme n'est pas une valeur en soi. Il est lié au nihilisme s'il n'est que souci de soi conscient en calculateur. Pour Nietzsche, l'égoïsme n'a pas pour centre l'ego conscient, mais plutôt le « Soi organique », formé de l'ensemble des pulsions et des instincts de L'individu, animés par la volonté de puissance.
Valeur relative, l'égoïsme est pour Nietzsche un symptôme. Ainsi, l'intérêt personnel peut être diversement défini comme, la conservation de soi, la quête des biens matériels, la gloire, le salut de l'âme, le bonheur, le plaisir sensuel, la sagesse, le dépassement de soi, etc. Tous ces intérêts ne se valent pas et doivent être jugés non pas selon la morale mais selon le critère de la volonté de puissance.
Ainsi, une forme d'égoïsme est positive si elle va dans le sens de d'un accroissement d'être, d'un dépassement de soi, d'un épanouissement. Mais une autre forme d'égoïsme peut être négative si elle va dans le sens d'une décadence ou d'un amoindrissement de l'individu.
L'inégalité de valeur des individus[edit]
L'individualisme de Nietzsche est aristocratique dans le sens où il est convaincu que tous les individus ne sa valent pas : il y a les forts et les faibles. L'erreur est de comprendre ces termes dans le cadre des relations sociales actuelles et surtout de croire que « forts » veut dire bourgeois, maîtres ou dictateurs et que « faibles » veut dire prolétaires. esclaves ou opprimés, car la pensée de Nietzsche est beaucoup trop complexe pour tomber dans un tel manichéisme.
Nietzsche distingue plutôt la force et de la faiblesse, la volonté de puissance ascendante (qui va dans le sens de la vie) et la perversion de cette volonté (lorsqu'elle se heurte à des obstacles comme la morale, la religion, la société...) qui se retourne contre l'individu et l'affaiblit en le poussant vers l'autodestruction. Le fort et le faible ne sont donc pas nécessairement deux individus séparés dont l'un réduirait l'autre en esclavage. Ce sont plutôt deux tendances en lutte qui coexistent chez l'individu, le tirant tantôt vers le bas, tantôt vers le haut.
Le fort (qui est l'aristocrate étymologique : le meilleur) et le faible ne sont donc pas deux individus séparés dont l'un réduirait l'autre en esclavage. Ce sont plutôt deux tendances qui tirent l'individu tantôt vers le bas, tantôt vers le haut.
L'individu fort est celui qui s'est placé dans des conditions de vie qui favorisent la tendance ascendante de sa volonté et qui parvient à faire triompher en lui les forces positives. Le faible est celui qui renonce à lui-même, qui a honte de son égoïsme, qui préfère se dominer lui-même, dominer ses passions, ses instincts, plutôt que d'exercer sa puissance vers le monde extérieur.
Le grand individu[edit]
L'homme supérieur est un individu isolé par choix et non par dépit. Souvent les marginaux appartiennent à la race des déçus : le troupeau n'a pas voulu d'eux et leurs tentatives désespérées de s'y intégrer ont échoué. Leur critique de la société relève alors du ressentiment, que Nietzsche définit comme une volonté de vengeance qui ne se réalise pas immédiatement par peur ou par faiblesse et se développe sournoisement en se satisfaisant de la dévalorisation de ce qu'elle ne peut vaincre.
Le grand individu n'est donc pas l'homme du ressentiment. Il ne méprise pas la foule et la société parce qu'elles le rejettent. C'est plutôt lui qui les rejette et se place au-dessus d'elles. Il sort de la norme par en haut, non par en bas. Le grand individu est un génie, un artiste, un héros ; c'est celui qui affirme de nouvelles valeurs. C'est l'enfant qui joue et qui dit oui à la vie, au devenir, à lui-même. C'est l'aristocrate de Nietzsche, l'individu souverain et créateur de ses propres valeurs.
Le surhomme[edit]
L'individu n'est pas la fin de l'individualisme aristocratique - il en est plutôt le commencement. L'individu est pour Nietzsche un pont vers le surhomme.
Selon Nietzsche, l'homme n'est pas un produit fini, le sommet de l'évolution. Il est encore en devenir, un devenir qui n'est toutefois pas tracé par des déterminismes biologiques inéluctables ou par l'intervention d'une divinité quelconque. Le devenir de l'homme peut être la décadence et mener au nihilisme ; l'homme ne songera alors qu'à son confort et sera sans idéal. Mais ce devenir peut être mû par l'effort de l'individu de se dépasser lui-même et tendre vers le surhomme.
Le surhomme n'est ni un idéal fumeux, ni une idole abstraite et encore moins un rêve nazi de race supérieure. Il représente le refus de l'homme de se contenter de ce qu'il est, le désir de tendre vers son propre dépassement et d'atteindre un état supérieur à ce qu'il est. Et quel est cet état ? Nul peut le savoir, puisque le surhomme est en devenir. Mais la voie est tracée par le grand individu : c'est le « deviens ce que tu es » du Gai Savoir. Ainsi, l'individualisme est un moyen de parvenir au surhomme, à condition qu'il porte en lui l'exigence de sélection de ce qui est le meilleur et le plus fort en l'homme.
Le surhumain est donc radicalement individuel et non collectif. La voie de sa réalisation ne peut en aucun cas être celle de l'embrigadement fasciste ou la réduction de l'individu au rang de petit soldat au service de quelque idéologie que ce soit. Si l'individu est un pont, un moyen, ce n'est pas pour quelque chose qui se situe à l'extérieur de lui. L'individu ne peut être l'instrument d'une grande cause qui ne risque que de le broyer. Bref : le surhomme est la réalisation de la volonté de puissance de l'individu et non la réalisation de la volonté de domination de quelque dictateur sanguinaire et ambitieux.
La société aristocratique[edit]
La liberté et le droit[edit]
Critique de l'instinct grégaire[edit]
Selon Nietzsche, ce ne sont pas les forts qui oppriment les faibles, mais les faibles qui oppriment les forts. Les faibles sont les individus du ressentiment. Ils ont érigé des structures sociales basées sur la morale des esclaves et l'instinct grégaire (obéissance, renoncement de soi, peur) dont la fonction est de triompher des valeurs individuelles des forts (courage, fierté, volonté). Comment ? En offrant au fort le pouvoir, ce qui le réduit au rang de faible en le transformant en berger, l'obligeant à mettre sa force au service du troupeau. Mais quand l'individu fort refuse de commander tout autant que d'obéir, la société toute entière est unie pour le culpabiliser. Sa non-intégration au troupeau est interprétée par les faibles comme un défaut, une anormalité.
Critique de la démocratie[edit]
Critique de l'État[edit]
Critique de l'individualisme libéral[edit]
Critique de l'individualisme anarchiste[edit]
La fécondité de l'affrontement[edit]
La société aristocratique telle que prévue par Nietzsche n'a donc rien à voir à la société aristocratique du Moyen Âge. Elle est constituée d'individus libres. Mais contrairement aux individualistes anarchistes, elle ne repose pas sur la libre association ou le contrat librement consenti. Il s'agit d'une société des meilleurs, de grands individus dans le sens nietzschéen, d'individus forts qui sont des ponts vers le surhomme. Leur association n'a pas pour but, comme pour les faibles, de les protéger, puisqu'ils ont la capacité de défendre seuls leurs intérêts. En fait, l'individu supérieur de Nietzsche n'a pas besoin des autres et ne s'associe pas par nécessité. Ils s'associent pour donner, non pour recevoir. Ils cherchent des «cocréateurs» qui participent dans l'élaboration de nouvelles valeurs, des égaux (amis ou ennemis) dignes de lui.
Nietzsche croit en la fécondité de l'affrontement, à la fraternelle concurence qui permet à l'individu de se surmonter dans un total respect de l'ennemi. Pour Nietzsche, la confrontation des volontés de puissance et leur libre jeu aboutissent à une harmonie, à un équillibre de la même façon que le libre jeu des pulsions de l'individu qui se combattent entre elles aboutit à cette unité qui est le moi. C'est lorsque notre raison prétend imposer le silence à nos passions et à nos instincts que nous nous détruisons nous-mêmes en retournant contre nous notre volonté de puissance. De la même façon, au niveau social, c'est lorsque l'autorité d'une église, d'un gouvernement, d'un État prétend faire cesser le combat entre les volontés individuelles et imposer une paix artificielle venue d'en haut que la société conduit au pourissement des énergies individuelles et consacre la victoire des faibles sur les forts.