La mort de la mère Cognacq
La mort de la mère Cognacq est un poème de Benjamin Péret.
À l'âge ou les enfants roulés dans le sable
tel des escalopes panés
cherchent le chemin du centre de la terre
la mère Cognacq les seins lourds du lait
que sa mère lui avait légué
ramassait ses aiguilles brisés pour fabriquer des canons
Un jour le canon de ses rêves fut fondu
puis vendu aux ennemis
par le père Cognacq
En souvenir de cet événement la Samaritaine fut ouverte
Et chaque matin en s'y rendant
la mère Cognacq ramassait le crottin de ses chevaux
pour les pissenlits de son époux
Hélas elle est crevé la mère Cognacq
elle est crevé comme la France
De sa panse verte comme un pâturage
s'échappent les familles nombreuses
qui pour chaque enfant
recevaient une pelle à feu
Plus de mère Cognacq
plus d'enfant venant après dix-huit autres
à Pâques ou à Noël
pisser dans la marmite familiale
Elle est crevé la mère Cognacq
dansons dansons en rond
sur sa tombe surmontée d'un étron
- Première parution 1926, dans La Révolution Surréaliste n°6, repris dans Je ne mange pas de ce pain-là en 1936