Difference between revisions of "Squat"

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==L'autoréquisition==
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L'autoréquisition est une action illégale qui touche directement à la propriété privée. Mais elle s'appuie sur les failles de la loi. Au bout de quarante-huit heures d'occupation, avec évidemment les preuves à l'appui, aucune expulsion sauvage ne peut avoir lieu. Le propriétaire, et lui seul, doit poursuivre les occupants au tribunal. En cas de violation de domicile, le propriétaire peut mettre en œuvre la procédure de flagrant délit prévue par les articles 53 et suivants du code de procédure pénale. L’autorité administrative peut alors procéder à l’expulsion du squatteur sans titre exécutoire, sur réquisition du propriétaire des locaux investis, dans un délai de 48 heures. Concrètement, si le propriétaire constate très rapidement l’occupation de son local, qui constitue un domicile, il alerte la police, qui intervient en tant que police administrative. La jurisprudence constante a retenu que cette incrimination n’avait pas pour objet de garantir d’une manière générale les propriétés immobilières, mais uniquement les domiciles (Crim. 15 fev. 1955, Bull.VI n°106).
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Pourquoi "autoréquisition", et surtout pourquoi « auto ». Il faut savoir que le préfet, représentant de l'État dans les départements, « sur proposition du service municipal du logement et après avis du maire [...] peut procéder, par voie de réquisition, pour une durée maximale d'un an renouvelable, à la prise de possession partielle ou totale des locaux à usage d'habitation vacants, inoccupés ou insuffisamment occupés » . C'est la fameuse ordonnance de 1945, émise par le Conseil national de la résistance, reprise dans le Code de la construction et de l'habitat (art. L641-1). Cette ordonnance n'est jamais appliquée, ou très rarement. Certains anarchistes (fédération d'Orléans) partant du constat que cette loi n'est pas utilisée il revient à chacun de l'appliquer avec les premiers acteurs concernés: les mal-logés et les sans-logis.
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==Le droit==
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Voir [http://infokiosques.net/imprimersans2.php?id_article=41 Le squat de A à Z]
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* Définition du domicile et inviolabilité / Rappel à la loi avec article 102 du code civil :
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« Le domicile de tout français, quant à l’exercice de ses droits civils, est au lieu où il a son principal établissement ». Code civil. Titre III : Du domicile, Article 102 (loi du 12 novembre 1938 - Ordonnance n°58-923 du 7 octobre 1958 art.1 Journal officiel du 9 octobre 1958 - Loi n°69-3 du 3 janvier 1969 art.13 Journal officiel du 5 janvier 1969 en vigueur le 1er janvier 1970)
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* Introduction ou maintien dans le domicile d’autrui / article 226-4 du code pénal
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« L’introduction ou le maintien dans le domicile d’autrui à l’aide de manoeuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, hors les cas où la loi le permet, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende » Code pénal. section 1 : De l’atteinte à la vie privée. Article 226.4
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* Inviolabilité du domicile par les représentant-e-s de la loi / article 432-8 du code pénal
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« Le fait par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée de mission auprès du service public, agissant dans l’exercice de ses fonctions on de sa mission, de s’introduire ou de tenter de s’introduire dans le domicile d’autrui contre le gré de celui-ci hors les cas prévus par la loi est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende ». Article 432-8 du code pénal
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* Du respect de la vie privée / Code civil - Article 9 (Loi n°70-643 du 17 juillet 1970 art. 22 Journal officiel du 19 juillet 1970)
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« Chacun a droit au respect de sa vie privée. les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommages subi, prescrire toute mesure, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l’intimité de la vie privée ; ces mesures peuvent, s’il y a urgence, être ordonnées en référé »
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*La violation de domicile et son inapplicabilité lorsque le local est vide de toute occupation (Crim. 28 janv. 1958, Bull. crim. N°94)
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La violation de domicile s’entend de l’introduction dans la demeure d’un tiers (Crim. 15 fev. 1995, Bull. crim n°106), qu’elle soit permanente ou temporaire (Crim. 28 janv. 1958, Bull. crim. N°94).
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Mais si le local est vide de toute occupation, la qualification de violation de domicile ne peut pas être retenue (Versailles 31 jan. 1995, GP 10-12 mars 1996). Seuls les logements loués en meublés vacants pour cause de travaux peuvent être considérés comme domiciles, alors qu’ils ne sont pas occupés.
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La plupart des locaux squattés étant vacants depuis longtemps lors de l’entrée des squatteur-euse-s dans les lieux, la violation de domicile est très rarement constituée.
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* La voie de fait (R.38-5° du Code Pénal) et le flagrant délit (articles 53 et suivant du code de procédure pénale)
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La voie de fait en matière de squat est le fait d’entrer par la force dans un lieu se traduisant par une occupation temporaire ou définitive d’un local privé.
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Cet usage de la force se traduit par une dégradation des systèmes de clôture (portes, fenêtres, cadenas,...). Ce bris de clôture est le fait de « causer volontairement du dommage à un objet mobilier ou un bien immobilier appartenant à autrui ». C’est une contravention pénale (R.38- 5° du Code Pénal). C’est cette voie de fait qui est censée caractériser le squatteur.
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* Cadre juridique concernant les expulsions / art. 61 de la Loi du 9 juillet 1991
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« Sauf disposition spéciale, l’expulsion ou l’évacuation d’un immeuble ou d’un lieu habité ne peut être poursuivie qu’en vertu d’une décision de justice ou d’un procès-verbal de conciliation exécutoire et après signification d’un commandement d’avoir à libérer les locaux. S’il s’agit de personnes non dénommées, l’acte est remis au parquet à toutes fins ».
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* Délai de procédure de deux mois / art. 62 de la Loi du 9 juillet 1991
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A priori, un commandement de quitter les lieux, lorsqu’il est signifié, doit accorder deux mois à l’occupant-e pour quitter les lieux.
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« Si l’expulsion porte sur un local affecté à l’habitation principale de la personne expulsée ou de tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu, sans préjudice des dispositions des articles L.613-1 à L.613-5 du code la construction et de l’habitation, qu’à l’expiration du délai de deux mois », y compris lorsque la voie de fait n’est pas établie.
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Là encore, la pratique va au delà des intentions du législateur.
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A l’inverse, le juge a également la possibilité d’accorder un délai supplémentaire n’excédant pas trois mois si l’expulsion menace l’occupant-e de conséquences d’une exceptionnelle dureté. « Lorsque l’expulsion aurait pour la personne concernée des conséquences d’une exceptionnelle dureté, notamment du fait de la période de l’année considérée ou des conditions atmosphériques, le délai peut être prorogé pour une période n’excédant pas trois mois » (également art.62 de la Loi du 9 juillet 1991).
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* Délais prévus par les articles L.613-1, L.613-2 et L.613-3 (trêve d’hiver) du CCH plus jurisprudence sur leur applicabilité vis-à-vis des squatteur-euse-s
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Article L.613-1 du code de la construction et de l’habitation : « Le juge de l’exécution (...) peut (...) accorder des délais renouvelables excédant deux années aux occupants de locaux d’habitation dont l’expulsion aura été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne pourra avoir lieu dans des conditions normales, sans que les dits occupants aient à justifier d’un titre à l’origine de l’occupation. »
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Article L.613-2 du code de la construction et de l’habitation : « La durée des délais (...) ne peut en aucun cas être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans. Pour la fixation de ces délais, il doit être tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l’occupant dans l’exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l’occupant, notamment en ce qui concerne l’âge, l’état de santé, la qualité de sinistré par fait de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d’eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l’occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. »
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Article L.613-3 du code de la construction et de l’habitation : « Nonobstant toute décision d’expulsion passée en force de chose jugée et malgré l’expiration des délais accordés en vertu des articles précédents, il doit être soumis à toute mesure d’expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu’au 15 mars de l’année suivante à moins que le relogement des intéressés soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l’unité et les besoins de la famille. Les dispositions du présent article ne sont toutefois pas applicables lorsque les personnes dont l’expulsion a été ordonnée sont entrées dans les locaux par voie de fait ou lorsque ceux-ci sont situés dans un immeuble ayant fait l’objet d’un arrêté de péril. »
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Ces articles s’appliquent-ils aux occupant-e-s sans droit ni titre ?
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La Cour d’appel de Montpellier, dans son arrêt du 15 mars 1995 (D. 15 mars 1995, Rev. huissiers 1995, 587, obs. J.-J. Bourdillat), a retenu la recevabilité d’une demande de délais faite par des squatteur-euse-s, au fondement des articles L.613-1 et L.613-2 du code de la construction et de l’habitation, et a considéré qu’il y avait bien dans cette espèce « des occupants de locaux d’habitation » qui avaient vocation à bénéficier des dispositions protectrices contenues dans ces deux articles. Cette position a ensuite été confirmée par la huitième chambre civile de la Cour d’appel de Paris (CA Paris, 8ème ch B, 2 mars 2000, D.2000, IR, p. 103) : « les dispositions des articles L.613-1 et L.613-2 du Code de la construction et de l’habitation, sur le sursis à l’exécution de décision de justice, ne contiennent aucune exclusive à l’égard des personnes qui se sont introduites illégalement dans un local d’habitation ; ce mode d’occupation fait partie des circonstances dont le juge doit tenir compte pour accorder des délais d’expulsion. »
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*Compensation des frais de procédure / Article 700 du NCPC
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« Comme il est dit au I de l’article 75 de la loi nº 91-647 du 10 juillet 1991, dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. »
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(Décret nº76-714 du 29 juillet 1976 art. 5 Journal officiel du 30 juillet 1976)
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(Décret nº91-1266 du 19 décembre 1991 art. 163 Journal officiel du 20 décembre 1991 en vigueur le 1er janvier 1992)
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Cette somme n’est généralement pas assignée aux squatteur-euse-s et à ne pas payer si vous n’êtes pas solvables.
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* Changement de compétence du T.G.I. au T.I. / art. 2 de la Loi n°2005-47 du 26 janvier 2005
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Sur le changement de compétence (du Tribunal de Grande Instance au Tribunal d’Instance), c’est l’article 2 de la loi n°2005-47 du 26 janvier 2005 relative aux compétences du tribunal d’instance qui modifie la précédente loi (dans le code de l’organisation judiciaire). « Art. L. 321-2-2 - Le tribunal d’instance connaît à charge d’appel des actions aux fins d’expulsion des occupants sans droit ni titre des immeubles à usage d’habitation. »
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* Articles de loi relatifs au droit au logement
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Le fait d’expulser des personnes dont on sait qu’elles ne trouveront pas d’autres solutions d’habitat pourrait être compris comme une « soumission à des conditions d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine » et à ce titre, tomber sous le coup de l’article 225-14 du code pénal.
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Dans un premier temps, la loi du 8 juillet 1989 a affirmé l’existence de ce droit pour les locaux à usage d’habitation, ou à usage mixte d’habitation et professionnel (Loi n° 89-462 du 8 juillet 1989, tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 déc. 1986, "La loi du 6 juillet 1989 et le droit au logement", AJPI 1989, p. 609 et s). Ensuite, le législateur a décidé que la garantie de ce droit constituait un véritable devoir de solidarité pour l’ensemble de la Nation (Loi n° 90-449 du 31 mai 1990, visant à la mise en œuvre du droit au logement, Journal officiel juin 1990, p. 8551 et s., art. 1er : « Garantir le droit au logement constitue un devoir de solidarité pour l’ensemble de la Nation »).
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Enfin, le Conseil constitutionnel a reconnu que « la possibilité pour toute personne de disposer d’un logement décent était un objectif de valeur constitutionnelle » (Conseil constitutionnel, 19 janvier 1995, décision n° 94-359 DC : loi relative à la diversité de l’habitat, AJDA juin 1995, note B. Joron).
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L’article 55 de la Constitution Française dispose que les traités régulièrement ratifiés ou approuvés ont dès leur publication une autorité supérieure à celle des Lois. Or la France a signé plusieurs traités internationaux reconnaissant la valeur du droit au logement, en tant que droit social fondamental, ou partie d’un droit fondamental. Un arrêt de la Cour d’Appel de Paris s’est ainsi basé sur l’existence d’un droit au logement inscrit dans plusieurs traités internationaux, en particulier le Pacte des Nations Unies sur les droits économiques, sociaux et culturels, en son article 11"2, pour accorder des délais aux squatteur-euse-s. Même si l’enjeu était modeste (quelques mois de délai), l’invocation de ces traités comme moyen de prise en compte des besoins des occupant-e-s est intéressante.
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L’article 3 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme précise que « nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ». L’expulsion sans proposition de relogement pourrait être envisagée comme une peine ou un traitement inhumain ou dégradant, en fonction de l’évolution des mœurs de la société.
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L’article 8 de la Convention prévoit que toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Là encore, l’expulsion sans proposition de relogement menace évidemment le domicile, la vie privée et familiale.
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* L’état de nécessité :
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L’état de nécessité est une vieille notion de droit pénal, qui a été prise en compte par une décision de la Cour d’Appel de Paris (17 sept. 1993) et plus récemment, par une décision du tribunal correctionnel de Paris (28 nov. 2000), qui a relaxé un homme ayant avoué avoir cassé une porte pour intégrer le logement d’un office HLM, estimant qu’il avait agi en état de nécessité.
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Trois conditions sont nécessaires pour faire application de l’état de nécessité :
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l’existence d’un danger actuel ou imminent menaçant une personne ou un bien,
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la nécessité pour conserver cette personne ou ce bien de commettre une infraction,
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la proportion entre les moyens employés et la gravité de la menace.
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* L’abandon de propriété :
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Certains immeubles vacants depuis de longues années peuvent être considérés par les occupant-e-s comme laissés à l’abandon par leurs propriétaires. Dans les faits, les conditions pour qu’un tel état de fait soit prouvé devant un tribunal (abandon depuis plus de 20 ans) font que c’est à peu près impossible.

Revision as of 19:12, 16 July 2007

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