Difference between revisions of "Athéisme"

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=== L'athéisme philosophique ===
 
=== L'athéisme philosophique ===
  
L'attitude des philosophes à l'égard des croyances religieuses de leur temps a toujours été ambiguë et fut souvent mal perçue par les autorités politiques et religieuses. Rares sont en effet les [[philosophe]]s, qui à l'instar de [[Blaise Pascal|Pascal]], ont fait le [[pari de Pascal|pari]] de considérer l'existence d'un dieu telle que celle-ci peut être révélée par une tradition écrite. C'est pourquoi Pascal parle avec mépris du ''Dieu des philosophes'', expression ironique, puisque ce Dieu, comme le Dieu de [[René Descartes|Descartes]] par exemple, est si métaphysique qu'il ne paraît plus pouvoir se comparer que de loin au Dieu de la [[Bible]]. En effet, lorsque les philosophes reprennent l'idée de Dieu ou du divin à leur compte, ils la transforment à ce point qu'elle peut se trouver en contradiction avec la foi ou la tradition, et semble quelquefois se confondre avec l'idée de nature ( [[Baruch Spinoza]]). À quelques nuances près, la réflexion philosophique tend en général à naturaliser le divin, à le ramener dans le monde, préparant ainsi la voie à un véritable athéisme.  
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L'attitude des philosophes à l'égard des croyances religieuses de leur temps a toujours été ambiguë et fut souvent mal perçue par les autorités politiques et religieuses. Rares sont en effet les [[philosophe]]s, qui à l'instar de Pascal, ont fait le pari de considérer l'existence d'un dieu telle que celle-ci peut être révélée par une tradition écrite. C'est pourquoi Pascal parle avec mépris du ''Dieu des philosophes'', expression ironique, puisque ce Dieu, comme le Dieu de Descartes par exemple, est si métaphysique qu'il ne paraît plus pouvoir se comparer que de loin au Dieu de la Bible. En effet, lorsque les philosophes reprennent l'idée de Dieu ou du divin à leur compte, ils la transforment à ce point qu'elle peut se trouver en contradiction avec la foi ou la tradition, et semble quelquefois se confondre avec l'idée de nature ( Baruch Spinoza). À quelques nuances près, la réflexion philosophique tend en général à naturaliser le divin, à le ramener dans le monde, préparant ainsi la voie à un véritable athéisme.  
  
En ce qui concerne l'athéisme philosophique proprement dit, dont on trouve l'origine chez le philosophe grec [[Démocrite]], il s'appuie sur des arguments variés, du domaine du  [[relativisme]], du [[rationalisme]], du [[nihilisme]], et même de la  [[morale]]. L'athéisme refuse de postuler l'existence d'entités dont l'existence n'est ni prouvée ni observable, et souligne également l'immoralité éventuelle de cette existence (''La seule excuse de Dieu, c'est qu'il n'existe pas'', [[Stendhal]]). Il n'y a pas d'arguments valables pour soutenir la croyance en l'existence d'un dieu quelconque, qu'il soit conçu par l'homme (anthropomorphique) ou qu'il soit une abstraction métaphysique. Une partie de ce point est reconnue par [[Blaise Pascal|Pascal]] lorsqu'il dit que l'argument ontologique ne convainc que ceux qui croient déjà. La croyance en un être surnaturel et suprême peut alors être suspectée de cacher quelque dévaluation implicite de la vie humaine, une expression de l'abandon des hommes à leurs craintes et de leur espoir que « quelqu'un » veille tout de même sur eux.
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En ce qui concerne l'athéisme philosophique proprement dit, dont on trouve l'origine chez le philosophe grec [[Démocrite]], il s'appuie sur des arguments variés, du domaine du  relativisme, du rationalisme, du [[nihilisme]], et même de la  morale. L'athéisme refuse de postuler l'existence d'entités dont l'existence n'est ni prouvée ni observable, et souligne également l'immoralité éventuelle de cette existence (''La seule excuse de Dieu, c'est qu'il n'existe pas'', Stendhal). Il n'y a pas d'arguments valables pour soutenir la croyance en l'existence d'un dieu quelconque, qu'il soit conçu par l'homme (anthropomorphique) ou qu'il soit une abstraction métaphysique. Une partie de ce point est reconnue par Pascal lorsqu'il dit que l'argument ontologique ne convainc que ceux qui croient déjà. La croyance en un être surnaturel et suprême peut alors être suspectée de cacher quelque dévaluation implicite de la vie humaine, une expression de l'abandon des hommes à leurs craintes et de leur espoir que « quelqu'un » veille tout de même sur eux.
  
Les philosophes suspects d'athéisme, d'impiété ou d'hérésie furent parfois persécutés. Les Athéniens brûlèrent les livres de [[Protagoras]] et offrirent une récompense pour qui le tuerait. [[Platon]] observe dans ses écrits une sorte de ''black-out'' sur le matérialiste [[Démocrite]]. [[Cicéron]], en revanche, rappelle qu'à son époque plus personne ne croit ''réellement'' qu'Atlas porte la voûte céleste sur ses épaules.
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Les philosophes suspects d'athéisme, d'impiété ou d'hérésie furent parfois persécutés. Les Athéniens brûlèrent les livres de [[Protagoras]] et offrirent une récompense pour qui le tuerait. [[Platon]] observe dans ses écrits une sorte de ''black-out'' sur le matérialiste [[Démocrite]]. Cicéron, en revanche, rappelle qu'à son époque plus personne ne croit ''réellement'' qu'Atlas porte la voûte céleste sur ses épaules.
  
En [[1600]], [[Giordano Bruno]] fut brûlé pour sa théorie sur la pluralité des mondes habités, ainsi que des philosophes accusés de panthéisme. À partir des [[Lumières]], qui s'inspirent de l'antiquité gréco-romaine, et jusqu'à aujourd'hui, plusieurs philosophes parvinrent à disserter avec liberté sur l'hypothèse de l'existence de Dieu ou des dieux, soit pour la remettre entièrement en cause, soit pour la reformuler. À titre d'exemple, la critique [[Friedrich Nietzsche|nietzschéenne]] du [[christianisme]] soulève la question des fondements théologiques de la morale, critique qui aboutit à la négation de valeurs immuables et à la thèse de l'[[immoralisme]] du [[devenir]], thèse également défendue par [[Baruch de Spinoza|Spinoza]]. L'œuvre de Spinoza (notamment le ''Traité théologico-politique'' et l'''Éthique'') propose une philosophie matérialiste radicale et constitue l'une des critiques les plus remarquables du phénomène religieux.
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En [[1600]], [[Giordano Bruno]] fut brûlé pour sa théorie sur la pluralité des mondes habités, ainsi que des philosophes accusés de panthéisme. À partir des Lumières, qui s'inspirent de l'antiquité gréco-romaine, et jusqu'à aujourd'hui, plusieurs philosophes parvinrent à disserter avec liberté sur l'hypothèse de l'existence de Dieu ou des dieux, soit pour la remettre entièrement en cause, soit pour la reformuler. À titre d'exemple, la critique [[Friedrich Nietzsche|nietzschéenne]] du [[christianisme]] soulève la question des fondements théologiques de la morale, critique qui aboutit à la négation de valeurs immuables et à la thèse de l'[[immoralisme]] du [[devenir]], thèse également défendue par [[Baruch de Spinoza|Spinoza]]. L'œuvre de Spinoza (notamment le ''Traité théologico-politique'' et l'''Éthique'') propose une philosophie matérialiste radicale et constitue l'une des critiques les plus remarquables du phénomène religieux.
  
 
(Pour un exposé didactique sur la philosophie de Spinoza et son impact historique, voir ''Les Lumières radicales. La philosophie, Spinoza et la naissance de la modernité (1650-1750)'' (Éditions Amsterdam, Paris, 2005)).  
 
(Pour un exposé didactique sur la philosophie de Spinoza et son impact historique, voir ''Les Lumières radicales. La philosophie, Spinoza et la naissance de la modernité (1650-1750)'' (Éditions Amsterdam, Paris, 2005)).  

Revision as of 18:57, 11 September 2010