FAQAnar:I.5 - À quoi ressemblera la structure sociale en anarchie ?
Catégorie:À quoi une société anarchiste ressemblerait-elle ?
La structure sociale et politique de l'anarchie est semblable à la structure économique i.e., elle est basée sur une fédération volontaire de corps politique prenant des mesures sur la base de la démocratie directe. Ce sont les assemblées quartier et communauté et leurs confédérations. Dans ces unités politiques populaires, le concept d' "auto-gestion" devient celui d' "auto-gouvernement", une forme d'organisation municipale dans laquelle les gens reprennent à l'état bureaucratique et à la classe capitaliste le contrôle de leurs lieux de vie.
"Une nouvelle phase économique nécessite une nouvelle phase politique," soutenait Kropotkine, "Une révolution aussi profonde que celle rêvée par les socialistes [libertaires] ne peut pas accepter le moule d'une vie politique dépassée. Une nouvelle société reposant sur l'égalité des conditions, sur la possession collective des instruments du travail, ne peut pas tolérer en serait-ce qu'une semaine … le système représentatif … si nous voulons une révolution sociale, nous devons chercher une forme d'organisation politique qui corresponde aux nouvelles méthodes d'organisation économique … Le futur appartient aux groupements libres d'intérêts et non à la centralisation gouvernementale; il appartient à la liberté et non l'autorité." [Mots d'un Rebelle, pp. 143-4]
Ainsi, la structure sociale d'une société anarchique sera à l'opposé du système actuel. Au lieu d'être centralisée et de haut-en-bas comme pour l'état, elle sera décentralisée et organisée de bas-en-haut. Comme Kropotkine le dit, "le socialisme doit devenir plus populaire, plus communaliste, et moins dépendant de gouvernement indirect par le biais de représentants élus. Il doit devenir plus auto-gouverné." [Kropotkine, Tracts Révolutionnaires, p.185] Bien que les anarchistes aient différentes conceptions de comment ce système communal serait constitué (comme nous allons le voir), il y a un accord complet pour trois visions et principes basiques.
Ce renforcement du pouvoir des citoyens ordinaires par le biais de la décentralisation et la démocratie directe éliminera l'aliénation et l'apathie qui sont maintenant endémique dans les villes modernes, et (comme toujours lorsque les gens sont libres) libèrera un flot d'innovations pour faire face à l'effondrement social qui affecte nos décharges urbaines. La gigantesque métropole avec son administration hiérarchique et impersonnelle, ses "résidents" atomisés et isolés, sera transformée en un réseau de communautés à taille humaine (habituellement appelées "communes"), chacune avec son propre caractère unique et formes d'auto-gouvernement, qui sera co-opérativement liée aux autres communautés sur différents niveaux par une fédération, du municipal au bio-régional au global.
Bien entendu, il peut (et a été) soutenu que les gens ne sont tout simplement pas intéressés par la "politique". De plus, certains disent que ce désintérêt est la raison pour laquelle les gouvernements exiltent -- les gens délèguent leurs responsabilités aux autres parce qu'ils ont mieux à faire. Un tel argument, cependant, présente des défauts d'ordre empiriques. Comme indiqué en section B.2.6, la centralisation du pouvoir pendant les révolutions française et américaine s'est produite parce les ouvriers avaient trop d'intérêt pour la politique et les problèmes sociaux, et non l'inverse ("Attaquer le pouvoir central, l'extirper de ses prérogatives, décentraliser et dissoudre l'autorité, aurait été pareil que d'abandonner aux gens le contrôle de leurs affaires, de courir le risque d'une réelle révolution populaire. C'est pourquoi la bourgeoisie a cherché à renforcer encore plus le gouvernement central…" [Kropotkine, Mots d'un Rebelle, p. 143]).
Dit simplement, l'état est centralisé pour facilité la domination de la minorité en excluant les masses de gens des processus de prise de décisions dans la société. Il faut s'y attendre puisque les structures sociales n'évoluent pas par hasard -- au contraire, elles se développent pour combler des besoins et obligations spécifiques. Le besoin spécifique de la classe dirigeante est de diriger, ce qui veut dire marginaliser le gros de la population. Ses obligations sont pour le pouvoir de la minorité et cela se transforme en la structure de l'état (et l'entreprise capitaliste).
Même si on ignore les évidences historiques sur le sujet, les anarchistes ne tirent pas cette conclusion de l'actuelle apathie qui nous entoure. En fait, nous pensons que cette apathie n'est pas la cause du gouvernement mais son résultat. Le gouvernement est un système hiérarchique par nature dans lequel les gens ordinaires sont délibérément marginalisés. L'impuissance que les gens ressentent à cause des mécanismes du système assure qu'ils y soient indifférents. Garantissant ainsi que les élites riches et puissantes gouvernent la sociéé sans être dérangés par la majorité d'oppressés et d'exploités.
De plus, le gouvernement colle habituellement son nez dans les affaires pour lesquelles la plupart des gens n'ont que peu d'intérêt. Quelques choses, comme dans la régulation de l'industrie ou la sécurité et les droits des travailleurs, qu'une société libre pourrait laissé à ceux qui sont touchés pour qu'ils puissent prendre leurs propres décisions (nous doutons que les ouvriers s'assujettiraient à des conditions de travail dangereuses, par exemple). Ou bien, la question d'actes et moralité personnels, qu'un peuple libre n'aurait que faire (à moins qu'ils portent atteinte à autrui, bien entendu). Ceci, encore, réduirait le nombre de problèmes qui seraient discutés dans une commune libre.
Aussi, par le biais de la décentralisation, un peuple libre discuterait principalement les problèmes locaux, réduisant ainsi la complexité de bien des questions et solutions. Les problèmes plus larges seraient bien entendu discutés mais ça serait pour traiter de problèmes bien spécifiques et donc plus restreint de par leurs natures que ceux soulevés par le corps législatif de l'état. Donc, une combinaison de centralisation et un désir irrationnel de discuter toutes les questions aident aussi à faire penser que la "politique" est ennuyeuse et hors de propos. Comme mentionné ci-dessus, ce n'est pas le résultat d'un accident et la marginalisation des gens "ordinaires" est en fait célébrée par la théorie "démocratique" bourgeoise. Noam Chomsky note que :
"Les théorises démocratiques du 20ème siècle conseille au "public de rester en ordre," pour que "les hommes responsables" puissent "vivre libre du piétinement et rugissement de la horde déconcertée", "les outsiders ignorants et indiscrets" dont "la fonction" est d' "être des spectateurs intéressés de l'action", et non des participants, en donnant périodiquement du poids à l'une ou l'autre des classes dirigeantes (élections), puis retournant à leurs affaires privées. (Walter Lippman). La grande partie de la population, est "ignorante et mentalement déficiente" et doit être tenue en place pour le bien commun, nourrie par une "illusion nécessaire" et des "simplifications excessives qui soient émotionellement fortes" (Robert Lansing et Reinhold Niebuh, secrétaire d'état de Wilson). Leurs homologues "conservateurs" sont simplement plus extrêmes dans leur adulation des Hommes Sages qui sont les dirigeants légitimes --- au service des riches et puissants, une note de bas de page mineure et régulièrement oubliée." [Année 501, p. 18]
Comme discuté dans la section B.2.6 ("Qui bénéficie de la centralisation ?") cette marginalisation du public de la vie politique assure les riches puissent être "laissés seuls" pour utiliser leur pouvoir comme ils l'entendent. Autrement dit, une telle marginalisation est une partie nécessaire d'une société capitaliste fonctionnant pleinement. Donc, sous le capitaliseme, les structures sociales libertaires doivent être découragées. Ou comme Chomsky le dit, la "populace doit être instruite selon des valeurs de subordination et quête restreinte d'enrichissement personnel selon les paramètres définis par les institutions des dirigeants; une démocratie constructive, avec des associations et actions populaires, est une menace qu'il faut évincer." [Op. Cit., p. 18] Cette philosophie peut être vu dans la déclaration d'un banquier américain au Venezuela sous la dictature assassine de Jimenze :
"Ici, vous avez la liberté de faire ce que vous voulez de votre argent, et pour moi, cela vaut bien toutes les libertés politiques du monde." [cité par Chomsky, Op. Cit., p. 99] Empêcher toute alternative libertaire à l'étatisme est une caractéristique courante du système actuel. En marginalisant et affaiblissant les gens, la capacité des individus à gérer leurs propres activités sociales est ébranlée et affaiblie. Ils développent une "peur de la liberté" et acceptent les institutions autoritaires et les "dirigeants puissants" ce qui en retour renforce leur marginalisation. Cette conséquence n'est pas très surprenante. Les anarchistes soutiennent que le désir de participer et la capacité à participer sont en symbiose : la participation se nourrie d'elle-même. En créant les structures sociales qui permettent la participation, la participation augmentera. Au fur et à mesure que les gens prennent le contrôle de leurs vies, leur capacité à prendre ce contrôle augmente aussi. Le défi d'être responsable de décisions qui font la différence est en même temps une occasion pour se développer personnellement. Commencer à sentir le pouvoir, après s'être auparavant senti impuissant, gagner l'accès aux ressources nécessaires pour une participation effective et apprendre à les utiliser, est une expérience libératrice. Lorsque les gens deviennent des sujets actifs, en faisant se provoquer les événements et choses dans un aspect de leurs vies, ils sont moins susceptibles de rester des objets passifs, en laissant les choses arriver à leur insu dans d'autres aspects de leurs vies. Dans l'ensemble, la "politique" est un sujet bien trop important pour le laisser entre les mains des politiciens, des riches et des bureaucrates. Après tout, c'est ce qui touche les amis, la communauté, et au bout du compte, la planète Terre. De tels problèmes ne peuvent être laissés entre les mains de personnes que soi.
Ainsi, une vie communale constructive faite d'individus qui s'auto-responsabilisent est une possibilité distincte (en effet, cela s'est répété et avéré vrai tout au long de l'histoire). Ce sont les structures hiérarchiques de l'étatisme et du capitalisme, marginalisant et déresponsabilisant la majorité, qui sont aux racines de l'actuelle apathie de grande taille face aux perturbations sociale et écologique. Les socialistes libertaires font ainsi appel à une forme de système politique radicalement différente pour remplacer l'état-nation centralisé, une forme qui serait basé autour de confédérations de communautés auto-gouvernées. En d'autres mots, dans l'anarchisme "la société est une société de sociétés; une ligue de ligues de ligues; une communauté de communautés de communautés; une république de républiques de républiques. C'est la seul qu'il y a la liberté et l'ordre, seulement là qu'il y a l'esprit, un esprit qui est l'auto-suffisance et la communauté, l'unité et l'indépendance." [Gustave Landauer, Pour le Socialisme, pp. 125-6]
Créer un tel système demanderait de détruire l'état-nation et reconstituer des relations entre les communautés sur la base de l'auto-détermination, et de confédérations libres et égales par le bas. Dans les sous-parties qui vont suivent, on verra plus en détail pourquoi ce nouveau système est nécessaire et ce à quoi il ressemblerait. Comme souligné dans l'introduction, ce ne sont que des suggestions de possibles solutions anarchiques à une organisation sociale. La plupart des anarchistes reconnaissent que les communautés anarchistes co-existeront avec les communautés non-anarchiques après la destruction de l'état existant. Comme tout anarchiste, ici sont discutées les visions anarchiques. Les non-anarchistes sont libres de dépeindre leur propre futur possible.