Individualisme anarchiste

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L'individualisme se distingue des autres courants de l'anarchisme par son refus radical de tout principe directeur, de tout ce qui vient entraver le libre jugement de l'individu unique et tente de se substituer à lui. L'individualisme anarchiste s'oppose non seulement à l'État et à toutes les formes d'organisation sociale se proposant des fins collectives supérieures à celles de l'individu, mais également à toutes les causes prétendues supérieures aux intérêts égoïstes (la Société, la Patrie, la Morale, la Justice, Dieu, la Révolution, le Prolétariat, l'Humanité et même la Liberté). Au niveau social, l'individualisme propose la libre association, par nature temporaire et motivée par les intérêts égoïste de l'individu.


Les deux traditions de l'individualisme anarchiste

Max Stirner est considéré comme le fondateur et le premier théoricien de l'individualisme anarchiste, même s'il se défend dans L'Unique et sa propriété d'être anarchiste. En fait, l'individualisme stirnérien a eu peu d'impact sur le développement de l'anarchisme au XIXe siècle. Ce n'est qu'avec la parution des ouvrages de John Henry Mackay que l'individualisme stirnérien est redécouvert, vulgarisé et adapté aux revendications anarchistes. Mackay peut ainsi être considéré comme le principal initiateur de la tendance anarcho-individualiste.

Les théories unicistes de Stirner ont été lu, commentées et assimilées principalement en France et aux États-Unis, où elles ont donné naissance à deux types d'individualisme anarchiste distincts.

L'école américaine

N'ayant été que très peu exposée au défi que représente les théories holistes radicales portées par le mouvement ouvrier européen, la pensée individualiste américaine évolue, au cours du XIXe siècle, d'un libéralisme influencé par John Stuart Mill et Spencer vers une position ultra-libérale, antiétatiste et antiautoritaire. S'appuyant sur des expériences pratiques de libre entreprise privée (comme c'est le cas pour Josiah Warren), de vie en autarcie (comme l'a expérimenté Thoreau à Walden) ou d'actions juridiques antiétatistes (comme celles de Lysander Spooner), ce courant ultra-libéral, exposé à l'individualisme strinérien et au mutualisme proudhonien, se mue en une forme d'anarchisme original et spécifiquement américain.

Deux penseurs font figure d'inspirateurs : Josiah Warren et James L. Walker qui posent dès les années 1860 les bases d'une philosophie faisant de l'égoïsme l'unique base de toutes les actions humaines. Les thèses anarchistes de Warren et de Walker sont ensuite reprises par Lysander Spooner et surtout Benjamin Tucker qui, bien avant Mackay, a redécouvert et vulgarisé l'égoïsme stirnérien.

De façon générale, les anarchistes individualistes américains préconisent la libre association et rejettent les révolutions violentes. Ils optent plutôt pour la résistence pâssive et le refus d'obéissance comme moyen de faire advenir l'anarchie. Par exemple, Tucker préconise le refus de payer l'impôt ainsi que la création de coopératives indépendantes, pratiquant le libre-échange commercial et même la fondation d'un système bancaire dégagé de l'emprise de l'État. Les anarchistes individualistes américains ne sont donc pas opposés par principe à la propriété privée mais en critiquent l'utilisation qu'en font les institutions de domination sociale que sont la grande entreprise et l'État. Reconnaissant pour l'essentiel la notion de possession telle que définie par Proudhon, ils ne s'opposent en réalité qu'à la nue-propriété, et donc à tout revenu de prêt - tels que les bénéfices ou les loyers et le salariat - tout en reconnaissent à chacun le droit de posséder son logement ou de travailler sa terre. C'est, selon les anarchistes individualistes, en ce sens l'usage seul qui fonde et légitime la propriété individuelle.

Après la Seconde Guerre mondiale, les principaux thèmes de la pensée individualiste anarchiste américaine ont été repris par Ayn Rand qu'on peut considérer comme la fondatrice du libertarianisme et de l'anarcho-capitalisme. Ses disciples, dont Murray Rothbard est le plus brillant représentant, proposent à partir des années soixante un forme radicale de libéralisme économique préconisant le remplacement du gouvernement par une simple agence rétribuée, chargée de protéger les individus, et un capitalisme libéré de toute ingérence étatique. Les héritiers de l'individualisme anarchiste américain sont actuellement divisés entre les minarchistes du parti libertarien et anarcho-capitalistes qui souhaitent la disolution de l'État dans le marché.

L'école française

En France, la philosophie de Stirner se développe dans un terreau riche d'une longue tradition de luttes sociales. Alors que l'individualisme stirnérien se greffe aux États-Unis sur un support libéral et capitaliste, ce même individualisme se greffe en France sur un support plus révolutionnaire et résolument anticapitaliste. L'individualisme anarchiste français conserve donc des préoccupations sociales et égalitaires qui n'appariassent pas chez les individualistes anarcho-capitalistes américains. Certains anarchistes comme Charles-Auguste Bontemps vont jusqu'à parler d'individualisme social, en considérant le Marché et la Propriété comme des fantômes stirnériens, des idées oppressives qui exigent le sacrifice de l'individu.

Ce double héritage fait que certains anarchistes américains, collaborateurs de la revue Anarchy, a Journal of Desire Armed (comme Jason McQuinn, Hakim Bey ou Bob Black) refusent l'étiquette individualiste même si leur pensée rejoint pour l'essentiel celle des individualistes anarchistes français, principalement par souci de se démarquer des libertariens et des anarcho-capitalistes. Ils se disent alors partisans de l'anarchie post-gauchiste (Post-Left Anarchy) ou de l'anarchie, tout simplement.

Citations

"Nous sommes tous les deux, l'État et moi, des ennemis... Tout État est une tyrannie." "L'État ne poursuit jamais qu'un but : limiter, enchaîner, assujettir l'individu, le subordonner à une généralité quelconque."

Max Stirner L'Unique et sa propriété, 1844

"L’anarchie c’est l’ordre, et le gouvernement la guerre civile."

Anselme Bellegarrigue, 1848

Voir aussi

Anarchistes individualistes

Anarchistes individualistes contemporains

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