FAQAnar:A.2.11 - Pourquoi la plupart des anarchistes soutiennent-ils la démocratie directe ?
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Pour la plupart des anarchistes, la démocratie directe, par le biais du vote des décisions politiques au sein d'associations libres, est la contrepartie du libre-accord (ou autogestion). La raison en est que « beaucoup de formes de domination peuvent exister de manière "libre", non-coercitive ou contractuelle [...] et c'est être naïf [...] que penser la simple opposition au contrôle politique mènera par lui-même à la fin de l'oppression. »[1] Par conséquent les relations que nous créons au sein d'une organisation sont aussi importantes pour déterminer sa nature libertaire que sa nature volontaire (voir la section A.2.14 pour plus de précisions).
Il est évident que les individus doivent travailler ensemble afin de une vie humaine entière. Ainsi, « quand un individu doit se joindre à d'autres », il [ou elle] a trois options : « il [ou elle] doit se soumettre à la volonté d'autrui (devenir esclave) ou soumettre les autres à sa volonté (être l'autorité) ou vivre avec autrui dans un accord fraternel portant sur le bien commun de tous (être associé(e)s). Personne ne peut échapper à cette nécessité. »[2]
Bien évidemment, les anarchistes choisissent la dernière option, l'association, comme seul moyen qu'ont les individus pour travailler ensemble comme des êtres humains libres et égaux, en respectant l'unicité et la liberté de chacun. Il n'y a qu'à travers la démocratie directe que les individus peuvent s'exprimer, exercer leur pensée critique et l'auto-gouvernement, et ainsi développer pleinement leur aptitudes intellectuelles, éthiques et sociales. Pour cela, il vaut parfois mieux faire partie d'une minorité que d'être soumis continument à la volonté d'un chef. Quelle est-donc la théorie derrière la démocratie directe anarchiste ?
Comme le notait Bertrand Russell, les anarchistes « ne veulent pas abolir les gouvernements dans leur sens d'appareils de décisions collectives : ce qu'ils veulent abolir c'est le système grâce auquel une décision est imposée à ceux qui s'y opposent.»[3] Les anarchistes voient l'autogestion comme le moyen d'atteindre cela. Une fois qu'un individu a rejoint une communauté ou un lieu de travail, il ou elle devient un(e) "citoyen(ne)" (par sa volonté d'un monde meilleur) de cette association. Celle-ci est organisée autour d'assemblées composées de tous/tes les membres ou, dans le cas de grands lieux de travail ou de grandes villes, de sous-groupes fonctionnels, comme des bureaux spécifiques ou des comités de quartiers. Dans ces assemblées, de concert avec les autres citoyen(ne)s, les teneurs des obligations politiques de chaque citoyen(ne) sont définies. Dans cette association, les gens doivent porter des jugements critiques et faire des choix, c'est-à -dire de gérer leur propre activité. Plutôt que de promettre d'obéir (comme dans les organisations hiérarchiques, comme l'État ou les entreprises capitalistes), les individus participent en prenant leurs propres décisions collectives, leurs propres engagements auprès de leurs camarades. Cela signifie que l'obligation politique n'a pas pour but de placer l'entité au-dessus du groupe ou de la société, comme l'État ou l'entreprise capitaliste, mais de différencier un(e) citoyen(ne) des autres citoyen(ne)s membres.
Bien que les individus instaurent collectivement les règles qui régissent leur association, et qu'ils y soient liés en tant que membres de cette association, ils sont supérieurs à ces règles car elles peuvent toujours être modifiées ou abrogées. Collectivement, les "citoyens" associés ensemble constituent une "autorité" politique, mais comme cette "autorité" est basée sur des relations horizontales entre elles/eux plutôt que des relations verticales entre elles/eux et une élite, l'"autorité" est non-hiérarchique ("rationnelle" ou "naturelle", voir la section B.1 - Pourquoi les anarchistes sont opposés à l'autorité et à la hiérarchie ?. Ainsi, Proudhon explique :
« Ce que nous mettons à la place des lois, ce sont les contrats. — Point de lois votées ni à la majorité ni à l'unanimité ; chaque citoyen, chaque commune ou corporation fait la sienne. »[4]
Un tel système ne signifie pas, bien sûr, que tout le monde participe à chaque décision nécessaire, quelque soit sa trivialité. Comme toute décision peut être présentée devant l'assemblée (si l'assemblée le décide, peut-être incitée en cela par certain(e)s de ses membres), en pratique, certaines activités (et certaines décisions purement fonctionnelles) seraient prises en charge par une administration élue par l'assemblée. Car, pour reprendre un activiste anarchiste espagnol, « une telle collectivité ne peut pas rédiger une simple lettre ou additionner une suite de nombres ou faire des centaines de tâches qu'un individu seul peut faire.» D'où le besoin de « mettre en place une administration. » Cela suppose une association « organisée sans conseil directif ou sans aucun bureau hiérarchique [qui] se rencontre en assemblée générale une fois par semaine ou plus souvent, pour mettre en place tous les moyens nécessaires pour son progrès et pour nommer une commission aux fonctions purement administratives. » Toutefois, cette assemblée « dresse une ligne de conduite définitive pour cette commission ou lui confère un mandat impérieux [et ainsi] serait parfaitement anarchiste. Il s'ensuit que déléguer ces tâches à des individus qualifiés, qui savent à l'avance comment procéder [...] ne signifie pas que la collectivité abandonne sa propre liberté. »[5] On rejoint, il faut le noter, les idées de Proudhon, notamment le fait qu'au sein des associations de travailleurs « les fonctions sont électives, et les réglements soumis à l'adoption des associés. »[6]
L'autogestion (c'est-à -dire la démocratie directe) serait, en remplacement de la hiérarchie capitaliste ou étatique, le principe directeur de la libre association fondatrice de la société libre. Ce qui veut dire qu'une société anarchiste aurait besoin pour fonctionner de fédérations d'associations. « Toutes les commissions ou délégations créées dans une société anarchiste » explique fort à propos Jose Llunas Pujols, « doivent être à tout moment sujettes au remplacement et à la révocation par les électeurs qui les ont élues. » En association avec « le mandat impérieux » et « les fonctions purement administratives », cela « rendrait par conséquent impossible à chacun(e) de s'arroger une once d'autorité. »[7] Là aussi, Pujols rejoint Proudhon qui demande vingt ans plus tôt « l’application du mandat impératif. Les hommes politiques y répugnent ! Ce qui veut dire qu’à leurs yeux le peuple, en élisant des représentants, ne se donne point des mandataires, il aliène sa souveraineté ! »[8]
Grâce à un fédéralisme basé sur le mandat et les élections, les anarchistes s'assurent que les décisions vont de bas en haut. En prenant nous-mêmes les décisions, en cherchant notre propre intérêt, nous interdisons aux autres de décider à notre place. Pour les anarchistes, l'autogestion est essentielle pour garantir la liberté au sein des organisations ainsi qu'une existence humaine décente.
Bien sûr, on pourra opposer que si vous êtes en minorité, vous êtes gouverné(e)s par les autres (« La domination démocratique reste de la domination. »[9]) En fait, le concept de démocratie directe comme nous l'avons décrit n'est pas nécessairement lié à celui de domination par la majorité. Si quelqu'un se retrouve en minorité lors d'un vote, il ou elle hésite entre accepter et refuser de s'y soumettre. Refuser à une minorité d'exercer son jugement ou de choisir revient à renier son autonomie et à lui imposer d'accepter quelque chose qui n'a pas été librement accepté. L'acceptation forcée de la volonté d'une majorité est contraire à l'idéal de l’autodétermination, et est ainsi contraire à la démocratie directe et à la libre-association. Par conséquent, loin d'être un déni de liberté, la démocratie directe dans le contexte de la libre-association et de l'autodétermination est le seul moyen d'encourager la liberté. Malatesta en donne une définition : la démocratie directe est « l'autonomie individuelle limitée par l'obligation de tenir les promesses engagées. »[10] Nul besoin de dire qu'une minorité, si elle continue de faire partie de l'association, peut débattre et essayer de convaincre la majorité de son erreur.
Nous devons ainsi indiquer ici que la revendication de la démocratie directe par les anarchistes ne suggèrent en aucun cas que la majorité ait tout le temps raison. Au contraire ! Le but des élections démocratiques n'est pas que la majorité ait toujours raison, mais qu'aucune minorité ne puisse préférer ses propres avantages au bien commun. L'Histoire prouve ce que le bon-sens commun prédit : quiconque avec des pouvoirs dictatoriaux (en tant que chef d'État, que patron ou que mari) utilisera ses pouvoirs pour s'enrichir et pour acquérir plus de pouvoir au dépens de ceux assujettis à ses décisions.
Les anarchistes savent que les majorités peuvent faire et font des erreurs, c'est pourquoi nos théories associatives donnent une place primordiale aux droits des minorités? Cela peut-être vu au travers de l'autodétermination, qui se base elle-même comme le droit des minorités de protester contre les décisions de la majorité et de faire de la dissidence un facteur-clé dans le processus de décision. Ainsi, Carole Pateman explique :
« Si la majorité a agi de mauvaise foi [...] la minorité devra mener une action politique, qui peut inclure la désobéissance civile si elle est appropriée, pour défendre leur citoyenneté et leur indépendance, et l'action politique elle-même. [...] La désobéissance civile n'est qu'un des moyens d'expression possibles de la citoyenneté active sur laquelle la démocratie autogérée est basée. [...] La pratique sociale de promettre implique le droit de refuser ou de changer son engagement ; de même, la pratique de l'autodétermination politique n'a aucun sens sans la reconnaissance pratique du droit des minorités de refuser ou de retirer son consentement, ou, si nécessaire, de désobéir. »[11]
Moving beyond relationships within associations, we must highlight how different associations work together. As would be imagined, the links between associations follow the same outlines as for the associations themselves. Instead of individuals joining an association, we have associations joining confederations. The links between associations in the confederation are of the same horizontal and voluntary nature as within associations, with the same rights of "voice and exit" for members and the same rights for minorities. In this way society becomes an association of associations, a community of communities, a commune of communes, based upon maximising individual freedom by maximising participation and self-management.
The workings of such a confederation are outlined in section A.2.9 ( What sort of society do anarchists want?) and discussed in greater detail in section I (What would an anarchist society look like?).
This system of direct democracy fits nicely into anarchist theory. Malatesta speaks for all anarchists when he argued that "anarchists deny the right of the majority to govern human society in general." As can be seen, the majority has no right to enforce itself on a minority -- the minority can leave the association at any time and so, to use Malatesta's words, do not have to "submit to the decisions of the majority before they have even heard what these might be." [The Anarchist Revolution, p. 100 and p. 101] Hence, direct democracy within voluntary association does not create "majority rule" nor assume that the minority must submit to the majority no matter what. In effect, anarchist supporters of direct democracy argue that it fits Malatesta's argument that:
"Certainly anarchists recognise that where life is lived in common it is often necessary for the minority to come to accept the opinion of the majority. When there is an obvious need or usefulness in doing something and, to do it requires the agreement of all, the few should feel the need to adapt to the wishes of the many . . . But such adaptation on the one hand by one group must be on the other be reciprocal, voluntary and must stem from an awareness of need and of goodwill to prevent the running of social affairs from being paralysed by obstinacy. It cannot be imposed as a principle and statutory norm. . ." [Op. Cit., p. 100]
As the minority has the right to secede from the association as well as having extensive rights of action, protest and appeal, majority rule is not imposed as a principle. Rather, it is purely a decision making tool which allows minority dissent and opinion to be expressed (and acted upon) while ensuring that no minority forces its will on the majority. In other words, majority decisions are not binding on the minority. After all, as Malatesta argued:
"one cannot expect, or even wish, that someone who is firmly convinced that the course taken by the majority leads to disaster, should sacrifice his [or her] own convictions and passively look on, or even worse, should support a policy he [or she] considers wrong." [Errico Malatesta: His Life and Ideas, p. 132]
Even the Individual Anarchist Lysander Spooner acknowledged that direct democracy has its uses when he noted that "[a]ll, or nearly all, voluntary associations give a majority, or some other portion of the members less than the whole, the right to use some limited discretion as to the means to be used to accomplish the ends in view." However, only the unanimous decision of a jury (which would "judge the law, and the justice of the law") could determine individual rights as this "tribunal fairly represent[s] the whole people" as "no law can rightfully be enforced by the association in its corporate capacity, against the goods, rights, or person of any individual, except it be such as all members of the association agree that it may enforce" (his support of juries results from Spooner acknowledging that it "would be impossible in practice" for all members of an association to agree) [Trial by Jury, p. 130-1f, p. 134, p. 214, p. 152 and p. 132]
Thus direct democracy and individual/minority rights need not clash. In practice, we can imagine direct democracy would be used to make most decisions within most associations (perhaps with super-majorities required for fundamental decisions) plus some combination of a jury system and minority protest/direct action and evaluate/protect minority claims/rights in an anarchist society. The actual forms of freedom can only be created through practical experience by the people directly involved.
Lastly, we must stress that anarchist support for direct democracy does not mean that this solution is to be favoured in all circumstances. For example, many small associations may favour consensus decision making (see the next section on consensus and why most anarchists do not think that it is a viable alternative to direct democracy). However, most anarchists think that direct democracy within free association is the best (and most realistic) form of organisation which is consistent with anarchist principles of individual freedom, dignity and equality.
Notes et références
- ↑ John P. Clark, Max Stirner's Egoism, p. 93.
- ↑ Errico Malatesta, Sa vie et ses idées, p. 85.
- ↑ Bertrand Russell, Roads to Freedom (Les routes de la Liberté), p. 85.
- ↑ Pierre-Joseph Proudhon, Idée générale de la Révolution au XIXe siècle, p. 283-284. À lire sur Google Books.
- ↑ « A collectivity as such cannot write a letter or add up a list of figures or do hundreds of chores which only an individual can perform. » Thus the need « to organise the administration. » Supposing an association is « organised without any directive council or any hierarchical offices » which « meets in general assembly once a week or more often, when it settles all matters needful for its progress » it still « nominates a commission with strictly administrative functions. » However, the assembly « prescribes a definite line of conduct for this commission or gives it an imperative mandate » and so « would be perfectly anarchist. » As it « follows that delegating these tasks to qualified individuals, who are instructed in advance how to proceed, . . . does not mean an abdication of that collectivity's own liberty. »
Jose Llunas Pujols, cité par Max Nettlau, A Short History of Anarchism (Une brève histoire de l'anarchie), p. 187. - ↑ Pierre-Joseph Proudhon, Op. Cit., p. 256.
- ↑ « All the commissions or delegations nominated in an anarchist society must be subject to replacement and recall at any time by the permanent suffrage of the section or sections that elected them. » « this "make[s] it thereby impossible for anyone to arrogate to himself [or herself] a scintilla of authority. »
Jose Llunas Pujols, cité par Max Nettlau, Op. Cit., pp. 188-189. - ↑ Pierre-Joseph Proudhon, Manifeste électroral du peuple, 1848. À lire sur le site Monde-Nouveau.
Cité par Daniel Guérin dans No Gods, No Masters (Ni Dieu Ni Maître), p. 79. À lire sur Google Books. - ↑ « Democratic rule is still rule. »
L. Susan Brown, The Politics of Individualism (La politique de l'individualisme), p. 53. - ↑ Errico Malatesta, cité par Max Nettlau, Errico Malatesta : Biographie d'un anarchiste.
- ↑ « If the majority have acted in bad faith. . . [then the] minority will have to take political action, including politically disobedient action if appropriate, to defend their citizenship and independence, and the political association itself. . . Political disobedience is merely one possible expression of the active citizenship on which a self-managing democracy is based . . . The social practice of promising involves the right to refuse or change commitments; similarly, the practice of self-assumed political obligation is meaningless without the practical recognition of the right of minorities to refuse or withdraw consent, or where necessary, to disobey. »
Carole Pateman, The Problem of Political Obligation (Le problème de la détermination politique), p. 162.
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