Difference between revisions of "FAQAnar:A.2.9 - Quelle sorte de société les anarchistes veulent-ils ?"

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Nous nous devons d'indiquer ici qu'une société anarchiste n'est pas une sorte d'état idyllique d'harmonie où tout le monde est d'accord sur tout. La réalité est bien éloignée. Comme [[Luigi Galleani]] le montre : « les désaccords et les frictions existeront toujours. En fait ils sont une condition essentielle d'un progrès sans limite. Mais une fois l'instinct animalier primaire de compétition — la lutte pour la nourriture — éliminé, les problèmes de désaccord pour être résolus sans la moindre menace à l'ordre social et la liberté individuelle. »<ref>[[Luigi Galleani]], ''The End of Anarchism?'' (''La fin de l'anarchisme ?''), p. 28.</ref> L'anarchisme a pour but de « réveiller l'esprit d'initiative des individus et des groupes, ceux qui arriveront à créer dans leurs rapports mutuels une action et une vie basées sur ces principes, ceux qui comprendront que la variété, le conflit même, sont la vie, et que l’uniformité c’est la mort, travailleront non pour les siècles à venir, mais bel et bien pour la prochaine révolution. »<ref>[[Piotr Kropotkine]], ''[[L'Anarchie, sa philosophie, son idéal]]''.</ref>
 
Nous nous devons d'indiquer ici qu'une société anarchiste n'est pas une sorte d'état idyllique d'harmonie où tout le monde est d'accord sur tout. La réalité est bien éloignée. Comme [[Luigi Galleani]] le montre : « les désaccords et les frictions existeront toujours. En fait ils sont une condition essentielle d'un progrès sans limite. Mais une fois l'instinct animalier primaire de compétition — la lutte pour la nourriture — éliminé, les problèmes de désaccord pour être résolus sans la moindre menace à l'ordre social et la liberté individuelle. »<ref>[[Luigi Galleani]], ''The End of Anarchism?'' (''La fin de l'anarchisme ?''), p. 28.</ref> L'anarchisme a pour but de « réveiller l'esprit d'initiative des individus et des groupes, ceux qui arriveront à créer dans leurs rapports mutuels une action et une vie basées sur ces principes, ceux qui comprendront que la variété, le conflit même, sont la vie, et que l’uniformité c’est la mort, travailleront non pour les siècles à venir, mais bel et bien pour la prochaine révolution. »<ref>[[Piotr Kropotkine]], ''[[L'Anarchie, sa philosophie, son idéal]]''.</ref>
  
Ainsi, une société anarchiste devra être basée sur des conflits coopératifs, car un « conflit, en soi, n'est pas dangereux [...], les désaccords existent [et ne doivent pas être pas être cachés] [...]. Ce qui fait que les désaccords deviennent destructifs n'est pas le conflit en lui-même mais l'ajout de la compétition. » En fait, « une exigence d'accords signifie que les gens seront en réalité empêché(e)s de faire partager leur sagesse à l'effort de groupe. »<ref>[[Alfie Kohn]], ''No Contest: The Case Against Competition'' (L'absence de contestation : le cas contre la compétition''), p. 156.</ref> C'est pour cela que la plupart des anarchistes rejettent les consensus pris dans de grandes assemblées (voir pour cela la section [[FAQAnar:A.2.12 - Le consensus est-il une alternative pour s'organiser en démocratie ?|A.2.12]]).
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Ainsi, une société anarchiste devra être basée sur des conflits [[coopération|coopératifs]], car un « conflit, en soi, n'est pas dangereux [...], les désaccords existent [et ne doivent pas être pas être cachés] [...]. Ce qui fait que les désaccords deviennent destructifs n'est pas le conflit en lui-même mais l'ajout de la compétition. » En fait, « une exigence d'accords signifie que les gens seront en réalité empêché(e)s de faire partager leur sagesse à l'effort de groupe. »<ref>[[Alfie Kohn]], ''No Contest: The Case Against Competition'' (L'absence de contestation : le cas contre la compétition''), p. 156.</ref> C'est pour cela que la plupart des anarchistes rejettent les consensus pris dans de grandes assemblées (voir pour cela la section [[FAQAnar:A.2.12 - Le consensus est-il une alternative pour s'organiser en démocratie ?|A.2.12]]).
  
Dans une société anarchiste, les associations seraient dirigées par des assemblées de masse où chacun est impliqué, et basées sur des discussions et des débat approfondis, ainsi que sur des "conflits" coopératifs entre individus égaux. Les tâches purement administratives seraient confiées à des comités élus. Ces comités seraient composés de délégué(e)s avec un mandat temporaire et révocable qui accompliraient leurs tâches sous la vigilance de l'assemblée qui les aura élu(e)s. Ainsi, dans une société anarchiste « nous nous occuperons de nos affaires nous-mêmes et déciderons quoi faire à leur sujet. Et, lorsqu'il sera nécessaire pour mettre en pratique nos idées de confier la charge d'un projet à quelqu'un, nous lui dirons d'agir de telle ou telle façon [...], rien ne pourra être fait sans notre décision. Alors nos délégués, au lieu d'être des individus auxquel(le)s nous aurions donné le droit de nous gouverner, seront des individus [...] sans autorité, seulement le devoir de mener à bien ce que tous/tes ceux/celles impliqué(e)s désirent. »<ref>[[Errico Malatesta]], ''Fra Contadini'' (''Entre paysans''), p. 34. [http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k81781m Lire en ligne cette œuvre].</ref> Si les délégué(e)s agissent à l'encontre de leur mandat ou tentent d'étendre leur influence ou travaillent en opposition à ce qui a déjà été décidé par l'assemblée (c'est-à-dire s'ils/elles commencent à prendre des décisions politiques), ils/elles peuvent être rappelé(e)s sur le champ et les décisions qu'ils/elles ont prises abolies. De cette façon, l'organisation reste dans les mains de l'union des individus qui l'a créée.
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Dans une société anarchiste, les associations seraient dirigées par des '''assemblées de masse''' où chacun est impliqué, et basées sur des discussions et des débat approfondis, ainsi que sur des "conflits" coopératifs entre individus égaux. Les tâches purement administratives seraient confiées à des comités élus. Ces comités seraient composés de délégué(e)s avec un mandat temporaire et révocable qui accompliraient leurs tâches sous la vigilance de l'assemblée qui les aura élu(e)s. Ainsi, dans une société anarchiste « nous nous occuperons de nos affaires nous-mêmes et déciderons quoi faire à leur sujet. Et, lorsqu'il sera nécessaire pour mettre en pratique nos idées de confier la charge d'un projet à quelqu'un, nous lui dirons d'agir de telle ou telle façon [...], rien ne pourra être fait sans notre décision. Alors nos délégués, au lieu d'être des individus auxquel(le)s nous aurions donné le droit de nous gouverner, seront des individus [...] sans autorité, seulement le devoir de mener à bien ce que tous/tes ceux/celles impliqué(e)s désirent. »<ref>[[Errico Malatesta]], ''Fra Contadini'' (''Entre paysans''), p. 34. [http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k81781m Lire en ligne cette œuvre].</ref> Si les délégué(e)s agissent à l'encontre de leur mandat ou tentent d'étendre leur influence ou travaillent en opposition à ce qui a déjà été décidé par l'assemblée (c'est-à-dire s'ils/elles commencent à prendre des décisions politiques), ils/elles peuvent être '''rappelé(e)s sur le champ''' et les décisions qu'ils/elles ont prises abolies. De cette façon, l'organisation reste dans les mains de l'union des individus qui l'a créée.
  
Cette [[autogestion]] et le pouvoir de rappeler les délégué(e)s sont les éléments fondamentaux de toute organisation anarchiste. La différence essentielle entre un système étatique ou hiérarchique et une communauté anarchiste est qui détient le pouvoir. Par exemple, dans un système parlementaire, le peuple confie le pouvoir à une groupe de représentant(e)s pour qu'ils/elles prennent les décisions à leur place pendant une période donnée. Le fait qu'ils/elles tiennent ou non leurs promesses est hors-de-propos car le peuple ne peut les rappeler avant les élections suivantes. Le pouvoir est entre les mains de ceux d'en haut et le peuple doit se contenter d'obéir. De la même façon, dans une entreprise capitaliste, le pouvoir est détenu par une minorité de patrons et de gestionnaires et les ouvriers doivent obéir.
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Cette '''[[autogestion]]''' et le pouvoir de rappeler les délégué(e)s sont les éléments fondamentaux de toute organisation anarchiste. La différence essentielle entre un système [[État|étatique]] ou [[hiérarchie|hiérarchique]] et une communauté anarchiste est qui détient le pouvoir. Par exemple, dans un système parlementaire, le peuple confie le pouvoir à une groupe de représentant(e)s pour qu'ils/elles prennent les décisions à leur place pendant une période donnée. Le fait qu'ils/elles tiennent ou non leurs promesses est hors-de-propos car le peuple ne peut les rappeler avant les élections suivantes. Le pouvoir est entre les mains de ceux d'en haut et le peuple doit se contenter d'obéir. De la même façon, dans une entreprise [[capitalisme|capitaliste]], le pouvoir est détenu par une minorité de patrons et de gestionnaires et les ouvriers doivent obéir.
  
Dans une société anarchiste, ces relations seraient inversées. Personne, individu ou groupe, élu ou non, ne détiendrait le pouvoir dans une communauté anarchiste. À la place, les décisions seraient prises par les principes de [[démocratie directe]] et, quand cela serait nécessaire, la communauté pourrait élire ou nommer des délégué(e)s pour mettre en place ces décisions. Il y aurait une distinction très nette entre la prise de décision (qui est faite par tous/tes ceux/celles qui sont affecté(e)s) et la coordination et l'administration des décisions adoptées (qui sont réalisées par les délégué(e)s).
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Dans une société anarchiste, ces relations seraient inversées. Personne, individu ou groupe, élu ou non, ne détiendrait le pouvoir dans une communauté anarchiste. À la place, les décisions seraient prises par les principes de '''[[démocratie directe]]''' et, quand cela serait nécessaire, la communauté pourrait élire ou nommer des délégué(e)s pour mettre en place ces décisions. Il y aurait une distinction très nette entre la prise de décision (qui est faite par tous/tes ceux/celles qui sont affecté(e)s) et la coordination et l'administration des décisions adoptées (qui sont réalisées par les délégué(e)s).
  
Ces communautés égalitaires, fondées sur le [[libre accord]], s'associeraient elles-aussi librement en confédérations. Une confédération de ce type fonctionnerait de bas en haut, les décisions suivant le même chemin vers les assemblées en-haut. Les confédérations fonctionneraient comme les collectifs. Il y aurait des conférences régulières au niveau régional, "national" et international où tous les problèmes importants qui pourraient affecter les collectifs qui y seraient impliqués seraient débattus. De plus, et c'est fondamental, les principes et idées qui guident la société y seraient débattus et les décisions politiques prises, mises en pratique, revues et coordonnées.  Les délégué(e)s se contenteraient « d'exercer leur mandat pendant les réunions et d'essayer d'harmoniser leurs besoins et désirs divers et variés. Les délibérations devraient toujours être sous le contrôle et l'accord de ceux/celles qui les ont délégué(e)s » et par conséquent « il n'y aurait pas de danger que l'intérêt du peuple soit oublié. »<ref>[[Errico Malatesta]], ''Op. Cit.'', p. 36.</ref>
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Ces communautés égalitaires, fondées sur le [[libre accord]], s'associeraient elles-aussi librement en '''confédérations'''. Une confédération de ce type fonctionnerait de bas en haut, les décisions suivant le même chemin vers les assemblées en-haut. Les confédérations fonctionneraient comme les collectifs. Il y aurait des conférences régulières au niveau régional, "national" et international où tous les problèmes importants qui pourraient affecter les collectifs qui y seraient impliqués seraient débattus. De plus, et c'est fondamental, les principes et idées qui guident la société y seraient débattus et les décisions politiques prises, mises en pratique, revues et coordonnées.  Les délégué(e)s se contenteraient « d'exercer leur mandat pendant les réunions et d'essayer d'harmoniser leurs besoins et désirs divers et variés. Les délibérations devraient toujours être sous le contrôle et l'accord de ceux/celles qui les ont délégué(e)s » et par conséquent « il n'y aurait pas de danger que l'intérêt du peuple soit oublié. »<ref>Errico Malatesta, ''Op. Cit.'', p. 36.</ref>
  
Si nécessaire, des comités d'action seraient créés, pour coordonner et administrer les décisions des assemblées et de leur congrès, sous le strict contrôle mentionné plus haut. Les délégué(e)s de ces comités auraient une tenure et, comme les délégué(e)s aux congrès, auraient un mandat limité — ils/elles ne sont pas capable de prendre les décisions à la place du peuple qui les a élu(e)s. De plus, comme leurs confrères et consœurs mandaté(e)s aux conférences et congrès, ils/elles pourraient être rappelé(e)s par les assemblées et les congrès qui les a élu(e)s. De cette façon, chaque comité nécessaire pour coordonner des activités communes serait, pour citer [[Errico Malatesta]], « toujours sous le contrôle direct de la population » et exprimerait « les décisions prises lors des assemblées populaires. »<ref>[[Errico Malatesta]], ''Sa vie et ses idées'', p. 129 et 175.</ref>
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Si nécessaire, des comités d'action seraient créés, pour coordonner et administrer les décisions des assemblées et de leur congrès, sous le strict contrôle mentionné plus haut. Les délégué(e)s de ces comités auraient une tenure et, comme les délégué(e)s aux congrès, auraient un mandat limité — ils/elles ne sont pas capable de prendre les décisions à la place du peuple qui les a élu(e)s. De plus, comme leurs confrères et consœurs mandaté(e)s aux conférences et congrès, ils/elles pourraient être rappelé(e)s par les assemblées et les congrès qui les a élu(e)s. De cette façon, chaque comité nécessaire pour coordonner des activités communes serait, pour citer [[Errico Malatesta]], « toujours sous le contrôle direct de la population » et exprimerait « les décisions prises lors des assemblées populaires. »<ref>Errico Malatesta, ''Sa vie et ses idées'', p. 129 et 175.</ref>
  
Plus important encore, les communautés peuvent révoquer toute décision prise lors des conférences et se retirer de n'importe quelle confédération. Chaque compromis pris par un(e) délégué(e) lors de négociations doit retourner à une assemblée générale pour qu'elle soit ratifiée. Sans cette ratification, tout compromis adopté par un(e) délégué(e) n'entraîne aucun engagement de la part de la communauté qui l'a délégué(e). Elles peuvent demander l'organisation de conférences pour discuter de nouveaux développements et pour informer les comités d'action des souhaits de changement et pour leur indiquer quoi faire à propos de n'importe quel développement ou idée.
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Plus important encore, les communautés peuvent révoquer toute décision prise lors des conférences et se retirer de n'importe quelle confédération. Chaque '''compromis''' pris par un(e) délégué(e) lors de négociations doit retourner à une assemblée générale pour qu'elle soit ratifiée. Sans cette ratification, tout compromis adopté par un(e) délégué(e) n'entraîne aucun engagement de la part de la communauté qui l'a délégué(e). Elles peuvent demander l'organisation de conférences pour discuter de nouveaux développements et pour informer les comités d'action des souhaits de changement et pour leur indiquer quoi faire à propos de n'importe quel développement ou idée.
  
 
En d'autres termes, au sein d'une société ou d'une organisation anarchiste, chaque délégué n'est pas un représentant,(comme ils le sont dans un gouvernement démocratique). [[Piotr Kropotkine]] fait bien la différence :
 
En d'autres termes, au sein d'une société ou d'une organisation anarchiste, chaque délégué n'est pas un représentant,(comme ils le sont dans un gouvernement démocratique). [[Piotr Kropotkine]] fait bien la différence :
  
« La question de la vraie délégation contre la représentation peut être mieux appréhendée si on imagine une ou deux centaines d'hommes [et de femmes], qui se voient tous les jours au travail et qui partagent des intérêts communs [...] et qui ont discuté chaque aspect de la question qui les occupe et ont pris une décision. Ils choisissent ensuite quelqu'un et l'envoient pour parvenir à un accord avec les autres délégués du même genre [...]. Le [ou la] délégué[e] n'est pas autorisé[e] de faire plus qu'expliquer aux autres délégués les facteurs qui ont conduit ses collègues à cette conclusion. En étant incapable d'imposer quoi que ce soit, il [ou elle] cherchera à obtenir un arrangement et retournera avec une simple proposition que ses mandataires peuvent accepter ou refuser. C'est ce qui se passe quand des vraies délégations sont créées. »<ref>[[Piotr Kropotkine]], ''Paroles d'un révolté'', p. 132.</ref>
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« La question de la vraie délégation contre la représentation peut être mieux appréhendée si on imagine une ou deux centaines d'hommes [et de femmes], qui se voient tous les jours au travail et qui partagent des intérêts communs [...] et qui ont discuté chaque aspect de la question qui les occupe et ont pris une décision. Ils choisissent ensuite quelqu'un et l'envoient pour parvenir à un accord avec les autres délégués du même genre [...]. Le [ou la] délégué[e] n'est pas autorisé[e] de faire plus qu'expliquer aux autres délégués les facteurs qui ont conduit ses collègues à cette conclusion. En étant incapable d'imposer quoi que ce soit, il [ou elle] cherchera à obtenir un arrangement et retournera avec une simple proposition que ses mandataires peuvent accepter ou refuser. C'est ce qui se passe quand des vraies délégations sont créées. »<ref>Piotr Kropotkine, ''Paroles d'un révolté'', p. 132.</ref>
  
 
À l'inverse d'un système représentatif, le pouvoir n'est pas délégué dans les mains d'une minorité. C'est plutôt que tout(e) délégué(e) est simplement le/la porte-parole d'une association qui l'a élu(e) (ou sinon sélectionné(e)) en premier lieu. Tous les délégué(e)s et tous les comités d'action seraient mandaté et soumis à la possibilité d'un rappel immédiat pour s'assurer qu'ils/elles expriment les désirs des assemblées plutôt que leurs propres souhaits. De cette façon, le gouvernement est remplacé par l'anarchie, un réseau d'associations libres et de communautés coopérant en égales, basé sur un système de délégué(e)s mandaté(e)s, de rappel immédiat, de libre accord et de libre fédération de bas en haut.
 
À l'inverse d'un système représentatif, le pouvoir n'est pas délégué dans les mains d'une minorité. C'est plutôt que tout(e) délégué(e) est simplement le/la porte-parole d'une association qui l'a élu(e) (ou sinon sélectionné(e)) en premier lieu. Tous les délégué(e)s et tous les comités d'action seraient mandaté et soumis à la possibilité d'un rappel immédiat pour s'assurer qu'ils/elles expriment les désirs des assemblées plutôt que leurs propres souhaits. De cette façon, le gouvernement est remplacé par l'anarchie, un réseau d'associations libres et de communautés coopérant en égales, basé sur un système de délégué(e)s mandaté(e)s, de rappel immédiat, de libre accord et de libre fédération de bas en haut.
  
Il n'y a que ce système qui pourrait assurer l'émergence d'« une organisation nouvelle n’ayant d’autre base que les intérêts, les besoins et les attractions naturelles des populations, ni d’autre principe que la fédération libre des individus dans les communes, des communes dans les provinces, des provinces dans les nations, enfin de celles-ci dans les États-Unis de l’Europe d’abord et plus tard du monde entier. »<ref>[[Michel Bakounine]], ''Œuvres, Tome I, Fédéralisme, socialisme et antithéologisme'', I Le fédéralisme. À lire sur [http://fr.wikisource.org/wiki/Bakounine/%C5%92uvres_compl%C3%A8tes/TomeI2 Wikisource].</ref> Ce réseau de communautés anarchistes fonctionnerait à trois niveaux différents.
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Il n'y a que ce système qui pourrait assurer l'émergence d'« une organisation nouvelle n’ayant d’autre base que les intérêts, les besoins et les attractions naturelles des populations, ni d’autre principe que la fédération libre des individus dans les communes, des communes dans les provinces, des provinces dans les nations, enfin de celles-ci dans les États-Unis de l’Europe d’abord et plus tard du monde entier. »<ref>[[Michel Bakounine]], ''Œuvres, Tome I, Fédéralisme, socialisme et antithéologisme'', I Le fédéralisme. À lire sur [http://fr.wikisource.org/wiki/Bakounine/%C5%92uvres_compl%C3%A8tes/TomeI2 Wikisource].</ref> Ce réseau de communautés anarchistes fonctionnerait à trois niveaux différents. Il y aurait « des communes indépendantes pour l'organisation territoriale, et des fédérations de syndicats pour l'organisation des hommes [et des femmes] en accord avec leurs fonctions respectives [...] et des groupes et sociétés libres [...] pour la satisfaction de tous les besoins économiques, sanitaires et éducatifs possibles et imaginables ; pour la protection mutuelle, pour la diffusion des idées, pour les arts, pour le divertissement, et ainsi de suite. »<ref>Piotr Kropotkine, ''Evolution and Environment'', p. 79. '''A ressourcer'''</ref>. Tout cela serait basé sur l'autogestion, sur la libre association, sur des organisations et des fédérations libres fonctionnant de bas en haut.
  
Only this system would ensure the "free organisation of the people, an organisation from below upwards." This "free federation from below upward" would start with the basic "association" and their federation "first into a commune, then a federation of communes into regions, of regions into nations, and of nations into an international fraternal association." [Michael Bakunin, The Political Philosophy of Bakunin, p. 298] This network of anarchist communities would work on three levels. There would be "independent Communes for the territorial organisation, and of federations of Trade Unions [i.e. workplace associations] for the organisation of men [and women] in accordance with their different functions. . . [and] free combines and societies . . . for the satisfaction of all possible and imaginable needs, economic, sanitary, and educational; for mutual protection, for the propaganda of ideas, for arts, for amusement, and so on." [Peter Kropotkin, Evolution and Environment, p. 79] All would be based on self-management, free association, free federation and self-organisation from the bottom up.
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En s'organisant de cette façon, la [[hiérarchie]] est abolie sous tous ses aspects rencontrés dans la vie. Seule cette forme d'organisation peut remplacer le gouvernement (c'est-à-dire une minorité qui possède l'initiative et l'autonomisation) par l'[[anarchie]] (l'initiative et l'autonomisation pour tous). Cette forme d'organisation peut exister dans toutes les activités qui requièrent un travail en groupe et la coordination de beaucoup d'individus. Ce serait, d'après [[Michel Bakounine]], le moyen « d'intégrer les individus dans des structures qu'ils [ou elles] puissent comprendre et contrôler. »<ref>Michel Bakounine, cité par [[Cornelius Castoriadis]], ''Le contenu du socialisme'', p. 116. Voir [http://www.magmaweb.fr/spip/spip.php?rubrique26 des extraits de l'ouvrage] et [http://www.magmaweb.fr/spip/spip.php?article219 un article à propos des liens entre Castoriadis et l'anarchisme.]</ref> Les initiatives individuelles seraient gérées par les individus.
  
By organising in this manner, hierarchy is abolished in all aspects of life, because the people at the base of the organisation are in control, not their delegates. Only this form of organisation can replace government (the initiative and empowerment of the few) with anarchy (the initiative and empowerment of all). This form of organisation would exist in all activities which required group work and the co-ordination of many people. It would be, as Bakunin said, the means "to integrate individuals into structures which they could understand and control." [quoted by Cornelius Castoriadis, Political and Social Writings, vol. 2, p. 97] For individual initiatives, the individual involved would manage them.
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Comme on peut le voir, les anarchistes cherchent à créer une société qui repose sur des structures qui garantissent qu'aucun individu ou groupe ne peut exercer un quelconque pouvoir sur les autres. Le libre accord, la confédération et le pouvoir de rappeler les élus, les mandats limités sont les mécanismes par lequel le pouvoir est retiré des mains du gouvernement et placé dans celles de celles et ceux directement affecté(e)s par les décisions prises.
  
As can be seen, anarchists wish to create a society based upon structures that ensure that no individual or group is able to wield power over others. Free agreement, confederation and the power of recall, fixed mandates and limited tenure are mechanisms by which power is removed from the hands of governments and placed in the hands of those directly affected by the decisions.
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Pour une discussion plus complète sur ce à quoi ressemblerait une société anarchiste, voir la [[FAQAnar:I - À quoi une société anarchiste ressemblerait-elle ?|section I]]. Par conséquent l'anarchie n'est pas un but lointain, une [[utopie]], mais plutôt l'aspect des luttes actuelles contre l'oppression et l'exploitation. Les fins et les moyens sont liés et l''''[[action directe]]''' aboutit à des organisations avec une participation massive et prépare le peuple à gérer directement ses intérêts propres et communs, car les anarchistes, comme nous le verront dans la section [[Modification de FAQAnar:I.2 - Est-ce un plan de travail pour une société anarchiste ?|I.2]], voit la charpente d'une société libre comme étant basée sur les organisations créées par les opprimé(e)s dans leur lutte contre le capitalisme ici et maintenant. Dans ce sens, les luttes collectives créent aussi bien les organisations que les attitudes individuelles dont l'anarchisme a besoin pour fonctionner. La lutte contre l'oppression est l'école de l'anarchie. Elle nous apprend certes comment être des anarchistes mais aussi nous donne un aperçu de ce à quoi une société anarchiste ressemblerait, quelle serait son organisation initiale et surtout les expériences pour gérer nos activités pour qu'une telle société puisse fonctionner. Ainsi, nous, les anarchistes, essayons de créer le type de monde que nous voulons à travers nos luttes actuelles et ne pensons pas que nos idées soient seulement applicables « après la révolution. » En fait, en appliquant nos principes maintenant, nous accélérons l'établissement de l'anarchie.
  
For a fuller discussion on what an anarchist society would look like see section I. Anarchy, however, is not some distant goal but rather an aspect of current struggles against oppression and exploitation. Means and ends are linked, with direct action generating mass participatory organisations and preparing people to directly manage their own personal and collective interests. This is because anarchists, as we discuss in section I.2.3, see the framework of a free society being based on the organisations created by the oppressed in their struggle against capitalism in the here and now. In this sense, collective struggle creates the organisations as well as the individual attitudes anarchism needs to work. The struggle against oppression is the school of anarchy. It teaches us not only how to be anarchists but also gives us a glimpse of what an anarchist society would be like, what its initial organisational framework could be and the experience of managing our own activities which is required for such a society to work. As such, anarchists try to create the kind of world we want in our current struggles and do not think our ideas are only applicable "after the revolution." Indeed, by applying our principles today we bring anarchy that much nearer.
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==Notes et références==
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{{source|http://www.infoshop.org/faq/secA2.html#seca29}}

Revision as of 21:20, 21 April 2010

Catégorie:Que représente l'Anarchisme?

FAQ anarchiste
Anarchy-symbol.svg
« L'anarchie c'est l'ordre moins le pouvoir »
A - Qu'est-ce que l'anarchisme ?

Introduction

A.1 - Qu'est ce que l'Anarchisme ?


A.1.1 - Qu'est-ce que "Anarchie" signifie ?
A.1.2 - Qu'est-ce que "Anarchisme" signifie ?
A.1.3 - Pourquoi l'Anarchisme est appelé aussi socialisme libertaire ?
A.1.4 - Les Anarchistes sont-ils socialistes ?
A.1.5 - D'où vient l'anarchisme ?


A.2 - Que représente l'Anarchisme?


A.2.1 - Quelle est l'essence de l'anarchisme ?
A.2.2 - Pourquoi les anarchistes prônent-ils la liberté ?
A.2.3 - Les Anarchistes sont-ils en faveur de l'organisation ?
A.2.4 - Les Anarchistes sont-ils en faveur de la liberté "absolue" ?
A.2.5 - Pourquoi les anarchistes sont-ils en faveur de l'égalité ?
A.2.6 - Pourquoi la solidarité est importante pour les anarchistes ?
A.2.7 - Pourquoi les anarchistes plaident-ils pour l'émancipation individuelle ?
A.2.8 - Est-il possible d'être un anarchiste sans s'opposer à la hiérarchie ?
A.2.9 - Quelle sorte de société les anarchistes veulent-ils ?
A.2.10 - Qu'est-ce que la suppression de la hiérarchie signifiera et amènera ?
A.2.11 - Pourquoi la plupart des anarchistes soutiennent-ils la démocratie directe ?
A.2.12 - Le consensus est-il une alternative pour s'organiser en démocratie ?
A.2.13 - Les anarchistes sont-ils des individualistes ou des collectivistes ?
A.2.14 - Pourquoi le volontarisme n'est pas suffisant ?
A.2.15 - Que dites-vous de la nature humaine ?
A.2.16 - L'anarchisme exige-t-il des personnes "parfaites" pour qu'une société anarchiste puisse exister ?
A.2.17 - Est-ce que la plupart des gens ne sont pas trop stupides pour qu'une société libre puisse exister ?
A.2.18 - Est-ce que les anarchistes supportent le terrorisme ?
A.2.19 - Quelles vues éthiques les anarchistes tiennent-ils ?
A.2.20 - Pourquoi la plupart des anarchistes sont athées ?


A.3 - Quelles sortes d'anarchisme existe-t-il ?


A.3.1 - Quelles sont les différences entre les individualistes et les socialistes anarchistes ?
A.3.2 - Y-a-t-il des différents types d'anarchisme socialiste ?
A.3.3 - Quels sortes d'écologisme anarchiste y a t il ?
A.3.4 - Est-ce que l'anarchisme est pacifiste ?
A.3.5 - Qu'est-ce que l'anarcha-feminisme ?
A.3.6 - Quelle est la culture Anarchiste ?
A.3.7 - Existe-t-il des anarchistes religieux ?
A.3.8 - Qu'est-ce que "anarchisme sans adjectif" ?
A.3.9 - Qu'est ce que l'anarcho-primitivisme ?


A.4 - Qui sont les penseurs reconnus dans l'anarchisme ?


A.5 - Quels sont des exemples "d'anarchie en action" ?


A.5.1 - La commune de Paris
A.5.2 - Les martyrs de Haymarket
A.5.3 - La création des unions syndicales
A.5.4 - Les anarchistes dans la Révolution russe
A.5.5 - Les anarchistes dans les occupations d'usines en Italie
A.5.6 - L'anarchisme et la révolution en Espagne
A.5.7 - Révolte en France en Mai/Juin 1968

Sommaire complet et détaillé


Les anarchistes veulent une société décentralisée, basée sur la libre association. Nous considérons que cette forme de société est la plus à même de maximiser les valeurs que nous avons soulignées auparavant — la liberté, l'égalité et la solidarité. Il n'y a que grâce à une décentralisation rationnelle du pouvoir, autant structurellement que territorialement, que la liberté individuelle peut être nourrie et encouragée. La délégation du pouvoir dans les mains d'une minorité est un déni flagrant de la liberté individuelle et de la dignité. Plutôt que d'éloigner la gestion de leurs affaires loin du peuple et de la confier à d'autres, les anarchistes sont en faveur d'organisations qui minimisent l'autorité, en gardant le pouvoir à la base, dans les mains de celles et ceux qui sont affecté(e)s par chaque décision prise.

La libre association est la pierre angulaire de la société anarchiste. Les individus doivent être libre de se réunir comme ils le veulent car c'est la base de la liberté et de la dignité humaine. Cependant, chaque accord libre doit être basé sur la décentralisation du pouvoir, sinon il ne serait qu'un faux-semblant (comme dans le capitalisme), car seule l'égalité peut donner le contexte sociale nécessaire à la liberté de développement et de croissance. Ainsi les anarchistes soutiennent les collectifs de démocratie directe qui sont basés sur le principe d'« une personne, un vote » (pour les justifications de la démocratie directe en tant que contrepartie du libre accord, voir la section A.2.11).

Nous nous devons d'indiquer ici qu'une société anarchiste n'est pas une sorte d'état idyllique d'harmonie où tout le monde est d'accord sur tout. La réalité est bien éloignée. Comme Luigi Galleani le montre : « les désaccords et les frictions existeront toujours. En fait ils sont une condition essentielle d'un progrès sans limite. Mais une fois l'instinct animalier primaire de compétition — la lutte pour la nourriture — éliminé, les problèmes de désaccord pour être résolus sans la moindre menace à l'ordre social et la liberté individuelle. »[1] L'anarchisme a pour but de « réveiller l'esprit d'initiative des individus et des groupes, ceux qui arriveront à créer dans leurs rapports mutuels une action et une vie basées sur ces principes, ceux qui comprendront que la variété, le conflit même, sont la vie, et que l’uniformité c’est la mort, travailleront non pour les siècles à venir, mais bel et bien pour la prochaine révolution. »[2]

Ainsi, une société anarchiste devra être basée sur des conflits coopératifs, car un « conflit, en soi, n'est pas dangereux [...], les désaccords existent [et ne doivent pas être pas être cachés] [...]. Ce qui fait que les désaccords deviennent destructifs n'est pas le conflit en lui-même mais l'ajout de la compétition. » En fait, « une exigence d'accords signifie que les gens seront en réalité empêché(e)s de faire partager leur sagesse à l'effort de groupe. »[3] C'est pour cela que la plupart des anarchistes rejettent les consensus pris dans de grandes assemblées (voir pour cela la section A.2.12).

Dans une société anarchiste, les associations seraient dirigées par des assemblées de masse où chacun est impliqué, et basées sur des discussions et des débat approfondis, ainsi que sur des "conflits" coopératifs entre individus égaux. Les tâches purement administratives seraient confiées à des comités élus. Ces comités seraient composés de délégué(e)s avec un mandat temporaire et révocable qui accompliraient leurs tâches sous la vigilance de l'assemblée qui les aura élu(e)s. Ainsi, dans une société anarchiste « nous nous occuperons de nos affaires nous-mêmes et déciderons quoi faire à leur sujet. Et, lorsqu'il sera nécessaire pour mettre en pratique nos idées de confier la charge d'un projet à quelqu'un, nous lui dirons d'agir de telle ou telle façon [...], rien ne pourra être fait sans notre décision. Alors nos délégués, au lieu d'être des individus auxquel(le)s nous aurions donné le droit de nous gouverner, seront des individus [...] sans autorité, seulement le devoir de mener à bien ce que tous/tes ceux/celles impliqué(e)s désirent. »[4] Si les délégué(e)s agissent à l'encontre de leur mandat ou tentent d'étendre leur influence ou travaillent en opposition à ce qui a déjà été décidé par l'assemblée (c'est-à-dire s'ils/elles commencent à prendre des décisions politiques), ils/elles peuvent être rappelé(e)s sur le champ et les décisions qu'ils/elles ont prises abolies. De cette façon, l'organisation reste dans les mains de l'union des individus qui l'a créée.

Cette autogestion et le pouvoir de rappeler les délégué(e)s sont les éléments fondamentaux de toute organisation anarchiste. La différence essentielle entre un système étatique ou hiérarchique et une communauté anarchiste est qui détient le pouvoir. Par exemple, dans un système parlementaire, le peuple confie le pouvoir à une groupe de représentant(e)s pour qu'ils/elles prennent les décisions à leur place pendant une période donnée. Le fait qu'ils/elles tiennent ou non leurs promesses est hors-de-propos car le peuple ne peut les rappeler avant les élections suivantes. Le pouvoir est entre les mains de ceux d'en haut et le peuple doit se contenter d'obéir. De la même façon, dans une entreprise capitaliste, le pouvoir est détenu par une minorité de patrons et de gestionnaires et les ouvriers doivent obéir.

Dans une société anarchiste, ces relations seraient inversées. Personne, individu ou groupe, élu ou non, ne détiendrait le pouvoir dans une communauté anarchiste. À la place, les décisions seraient prises par les principes de démocratie directe et, quand cela serait nécessaire, la communauté pourrait élire ou nommer des délégué(e)s pour mettre en place ces décisions. Il y aurait une distinction très nette entre la prise de décision (qui est faite par tous/tes ceux/celles qui sont affecté(e)s) et la coordination et l'administration des décisions adoptées (qui sont réalisées par les délégué(e)s).

Ces communautés égalitaires, fondées sur le libre accord, s'associeraient elles-aussi librement en confédérations. Une confédération de ce type fonctionnerait de bas en haut, les décisions suivant le même chemin vers les assemblées en-haut. Les confédérations fonctionneraient comme les collectifs. Il y aurait des conférences régulières au niveau régional, "national" et international où tous les problèmes importants qui pourraient affecter les collectifs qui y seraient impliqués seraient débattus. De plus, et c'est fondamental, les principes et idées qui guident la société y seraient débattus et les décisions politiques prises, mises en pratique, revues et coordonnées. Les délégué(e)s se contenteraient « d'exercer leur mandat pendant les réunions et d'essayer d'harmoniser leurs besoins et désirs divers et variés. Les délibérations devraient toujours être sous le contrôle et l'accord de ceux/celles qui les ont délégué(e)s » et par conséquent « il n'y aurait pas de danger que l'intérêt du peuple soit oublié. »[5]

Si nécessaire, des comités d'action seraient créés, pour coordonner et administrer les décisions des assemblées et de leur congrès, sous le strict contrôle mentionné plus haut. Les délégué(e)s de ces comités auraient une tenure et, comme les délégué(e)s aux congrès, auraient un mandat limité — ils/elles ne sont pas capable de prendre les décisions à la place du peuple qui les a élu(e)s. De plus, comme leurs confrères et consÅ“urs mandaté(e)s aux conférences et congrès, ils/elles pourraient être rappelé(e)s par les assemblées et les congrès qui les a élu(e)s. De cette façon, chaque comité nécessaire pour coordonner des activités communes serait, pour citer Errico Malatesta, « toujours sous le contrôle direct de la population » et exprimerait « les décisions prises lors des assemblées populaires. »[6]

Plus important encore, les communautés peuvent révoquer toute décision prise lors des conférences et se retirer de n'importe quelle confédération. Chaque compromis pris par un(e) délégué(e) lors de négociations doit retourner à une assemblée générale pour qu'elle soit ratifiée. Sans cette ratification, tout compromis adopté par un(e) délégué(e) n'entraîne aucun engagement de la part de la communauté qui l'a délégué(e). Elles peuvent demander l'organisation de conférences pour discuter de nouveaux développements et pour informer les comités d'action des souhaits de changement et pour leur indiquer quoi faire à propos de n'importe quel développement ou idée.

En d'autres termes, au sein d'une société ou d'une organisation anarchiste, chaque délégué n'est pas un représentant,(comme ils le sont dans un gouvernement démocratique). Piotr Kropotkine fait bien la différence :

« La question de la vraie délégation contre la représentation peut être mieux appréhendée si on imagine une ou deux centaines d'hommes [et de femmes], qui se voient tous les jours au travail et qui partagent des intérêts communs [...] et qui ont discuté chaque aspect de la question qui les occupe et ont pris une décision. Ils choisissent ensuite quelqu'un et l'envoient pour parvenir à un accord avec les autres délégués du même genre [...]. Le [ou la] délégué[e] n'est pas autorisé[e] de faire plus qu'expliquer aux autres délégués les facteurs qui ont conduit ses collègues à cette conclusion. En étant incapable d'imposer quoi que ce soit, il [ou elle] cherchera à obtenir un arrangement et retournera avec une simple proposition que ses mandataires peuvent accepter ou refuser. C'est ce qui se passe quand des vraies délégations sont créées. »[7]

À l'inverse d'un système représentatif, le pouvoir n'est pas délégué dans les mains d'une minorité. C'est plutôt que tout(e) délégué(e) est simplement le/la porte-parole d'une association qui l'a élu(e) (ou sinon sélectionné(e)) en premier lieu. Tous les délégué(e)s et tous les comités d'action seraient mandaté et soumis à la possibilité d'un rappel immédiat pour s'assurer qu'ils/elles expriment les désirs des assemblées plutôt que leurs propres souhaits. De cette façon, le gouvernement est remplacé par l'anarchie, un réseau d'associations libres et de communautés coopérant en égales, basé sur un système de délégué(e)s mandaté(e)s, de rappel immédiat, de libre accord et de libre fédération de bas en haut.

Il n'y a que ce système qui pourrait assurer l'émergence d'« une organisation nouvelle n’ayant d’autre base que les intérêts, les besoins et les attractions naturelles des populations, ni d’autre principe que la fédération libre des individus dans les communes, des communes dans les provinces, des provinces dans les nations, enfin de celles-ci dans les États-Unis de l’Europe d’abord et plus tard du monde entier. »[8] Ce réseau de communautés anarchistes fonctionnerait à trois niveaux différents. Il y aurait « des communes indépendantes pour l'organisation territoriale, et des fédérations de syndicats pour l'organisation des hommes [et des femmes] en accord avec leurs fonctions respectives [...] et des groupes et sociétés libres [...] pour la satisfaction de tous les besoins économiques, sanitaires et éducatifs possibles et imaginables ; pour la protection mutuelle, pour la diffusion des idées, pour les arts, pour le divertissement, et ainsi de suite. »[9]. Tout cela serait basé sur l'autogestion, sur la libre association, sur des organisations et des fédérations libres fonctionnant de bas en haut.

En s'organisant de cette façon, la hiérarchie est abolie sous tous ses aspects rencontrés dans la vie. Seule cette forme d'organisation peut remplacer le gouvernement (c'est-à-dire une minorité qui possède l'initiative et l'autonomisation) par l'anarchie (l'initiative et l'autonomisation pour tous). Cette forme d'organisation peut exister dans toutes les activités qui requièrent un travail en groupe et la coordination de beaucoup d'individus. Ce serait, d'après Michel Bakounine, le moyen « d'intégrer les individus dans des structures qu'ils [ou elles] puissent comprendre et contrôler. »[10] Les initiatives individuelles seraient gérées par les individus.

Comme on peut le voir, les anarchistes cherchent à créer une société qui repose sur des structures qui garantissent qu'aucun individu ou groupe ne peut exercer un quelconque pouvoir sur les autres. Le libre accord, la confédération et le pouvoir de rappeler les élus, les mandats limités sont les mécanismes par lequel le pouvoir est retiré des mains du gouvernement et placé dans celles de celles et ceux directement affecté(e)s par les décisions prises.

Pour une discussion plus complète sur ce à quoi ressemblerait une société anarchiste, voir la section I. Par conséquent l'anarchie n'est pas un but lointain, une utopie, mais plutôt l'aspect des luttes actuelles contre l'oppression et l'exploitation. Les fins et les moyens sont liés et l'action directe aboutit à des organisations avec une participation massive et prépare le peuple à gérer directement ses intérêts propres et communs, car les anarchistes, comme nous le verront dans la section I.2, voit la charpente d'une société libre comme étant basée sur les organisations créées par les opprimé(e)s dans leur lutte contre le capitalisme ici et maintenant. Dans ce sens, les luttes collectives créent aussi bien les organisations que les attitudes individuelles dont l'anarchisme a besoin pour fonctionner. La lutte contre l'oppression est l'école de l'anarchie. Elle nous apprend certes comment être des anarchistes mais aussi nous donne un aperçu de ce à quoi une société anarchiste ressemblerait, quelle serait son organisation initiale et surtout les expériences pour gérer nos activités pour qu'une telle société puisse fonctionner. Ainsi, nous, les anarchistes, essayons de créer le type de monde que nous voulons à travers nos luttes actuelles et ne pensons pas que nos idées soient seulement applicables « après la révolution. » En fait, en appliquant nos principes maintenant, nous accélérons l'établissement de l'anarchie.

Notes et références

  1. Luigi Galleani, The End of Anarchism? (La fin de l'anarchisme ?), p. 28.
  2. Piotr Kropotkine, L'Anarchie, sa philosophie, son idéal.
  3. Alfie Kohn, No Contest: The Case Against Competition (L'absence de contestation : le cas contre la compétition), p. 156.
  4. Errico Malatesta, Fra Contadini (Entre paysans), p. 34. Lire en ligne cette Å“uvre.
  5. Errico Malatesta, Op. Cit., p. 36.
  6. Errico Malatesta, Sa vie et ses idées, p. 129 et 175.
  7. Piotr Kropotkine, Paroles d'un révolté, p. 132.
  8. Michel Bakounine, Œuvres, Tome I, Fédéralisme, socialisme et antithéologisme, I Le fédéralisme. À lire sur Wikisource.
  9. Piotr Kropotkine, Evolution and Environment, p. 79. A ressourcer
  10. Michel Bakounine, cité par Cornelius Castoriadis, Le contenu du socialisme, p. 116. Voir des extraits de l'ouvrage et un article à propos des liens entre Castoriadis et l'anarchisme.